Ayant parlé à plusieurs reprises de l’islamophobie, (cf. l’éditorial de Nea say N° 97 « L’Islamophobie pourquoi ce déferlement….) pouvait-on éviter de parler de « christianophobie » ? L’Observatoire de l’intolérance et de la discrimination contre les chrétiens en Europe publie un rapport de 40 pages regroupant les atteintes recensées ces dernières années en Europe. Dans le journal la Croix du 28 novembre dernier Isabelle de Gaulmyn, correspondante au Vatican, a publié un article de ton plus serein : « Vous avez dit Christianophobie ? » qui a suscité beaucoup de commentaires les plus diverses de la part des lecteurs.
Qu’est-ce que « l’Observatoire de l’intolérance et de la discrimination contre les chrétiens en Europe » ? C’est le cardinal Péter Erdö, président du Conseil des conférences épiscopales d’Europe (CCEE), qui a annoncé la création de cette ONG fin septembre, prenant soin de préciser que cet observatoire « ne voulait pas être un instrument de polémique », mais « une aide pour créer une société plus respectueuse de la liberté religieuse » et faciliter « le développement d’une démocratie authentique basée sur l’égalité » en Europe. Ce continent, ajoutait-il, « a besoin de Dieu, de se souvenir de ses propres racines et de regarder l’avenir avec réalisme et espérance ». Le rapport publié recense des faits constatés ces cinq dernières années dans toute l’Europe.
Le rapport commence par citer des personnalités très diverses ayant souligné récemment l’intolérance croissante envers les chrétiens : Benoît XVI, bien sûr, le métropolite Hilarion de Volokolamsk (de l’Église orthodoxe russe), mais aussi Tony Blair ou encore Edward Green, chercheur à Harvard. Tous constatent que, en ce contexte de sécularisation parfois « agressive », l’expression des chrétiens dans l’espace public devient de plus en plus délicate. L’idée de « chritianophobie », apprend-on encore, a été admise par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui a tenu en mars 2009 une réunion sur ce thème qui a fait l’objet d’un communiqué de presse de l’Observatoire de l’intolérance et de la discrimination le 7 décembre dernier http://www.intoleranceagainstchristians.eu/index.php?id=628&tx_ttnews[tt_news]=71&cHash=d19c87e175
De nombreux cas concrets, rapportés par la presse ou des témoins directs, sont ensuite passés en revue : atteintes à la « liberté de conscience » (juge suspendu en Espagne pour avoir exprimé ses convictions), atteintes « à la liberté d’expression » (annulation de la visite du pape à l’université de La Sapienza en Italie), atteintes à la « dimension collective » de la liberté religieuse (provocations à Notre-Dame de Paris par des activistes homosexuels), atteintes à « l’emploi » (conférencier d’Oxford malmené après sa conversion au christianisme) ou encore atteintes relatives à « l’éducation » (notamment en milieu scolaire).
Peut-on vraiment parler de discrimination ? Certains faits rapportés demanderaient à être approfondis, car présentés de façon trop laconique, ou sujets à interprétation. Plus convaincantes, en revanche, la troisième et la quatrième parties du rapport recensent d’innombrables exemples de « diffamations et insultes », atteintes aux « symboles religieux », « profanations et actes de vandalisme » en tout genre, sans oublier des agressions physiques, notamment en Bosnie, en Italie, en Turquie ou en Russie. Le document s’achève sur une série de recommandations adressées aux gouvernements et aux instances européennes. Là nous sommes au cœur d’une pédagogie de la tolérance qu’il reste à construire tout azmut.
Selon Mario Mauro, eurodéputé PPE italien proche du Vatican, et vice-président du Parlement européen ce rapport « prouve que la discrimination à l’encontre des chrétiens ne se produit pas seulement dans les pays où ceux-ci sont minoritaires ».
Espérons que les débats qui ont eu lieu au sein du Parlement européen (débouchant sur des résolutions écrites comme celle de janvier dernier ou de novembre dernier(http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+CRE+20100121+ITEM-003-01+DOC+XML+V0//FR) permettront un débat d’ensemble sur l’intolérance religieuse en Europe qu’il s’agisse d’islamophobie ou de christianophobie ou autre encore. La déclaration écrite en voie d’adoption (échéance 10.03.2011) sur la liberté de religion constitue la dernière initiative en date à ce sujet http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//NONSGML+WDECL+P7-DCL-2010-0090+0+DOC+PDF+V0//FR&language=FR. Les auteurs estiment que le politique extérieure de l’Union européenne doit prendre en considération cette dimension (cf. Eulogos Nea say n°95 « La liberté religieuse ne va pas de soi : le Parlement européen se saisit du problème. Des députés demandent que l’UE mette en place une action diplomatique ferme et efficace. Un écho indirect au Synode du Proche- Orient qui s’est déroulé récemment au Vatican ») http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?idr=4&idnl=1736&nea=71&lang=fra&lst=0 La Charte des droits fondamentaux est désormais une obligation, nous le savons tous.
Texte du Rapport (FR) http://www.intoleranceagainstchristians.eu/fileadmin/user_upload/Five-Year_Report_Intolerance_against_Christians_in_Europe_-_online_version.pdf