Les ROMS (1) : l’Europe coordonne ses efforts en faveur des Roms. La Commission demande aux Etats membres d’utiliser les fonds structurels pour favoriser leur intégration sociale et économique.

Responsables gouvernementaux, fonctionnaires européens et représentants d’associations se réunissent à Cordoue jeudi 8 et vendredi 9 avril, pour le deuxième sommet européen sur les Roms. Les Européens se penchent sur la situation des Roms. Organisé jeudi 8 et vendredi 9 avril à Cordoue à l’initiative de l’Espagne, qui préside le conseil des ministres de l’Union, le deuxième sommet ministériel consacré au sort de cette minorité doit servir à mobiliser les gouvernements.

Ces communautés rom sont présentes dans l’ensemble des 27 pays de l’Union européenne, sous différents noms (« Gens du voyage » en France, « Gitans » en Espagne, « Tsiganes » en Europe centrale). Ils forment la plus importante minorité à l’échelle du continent puisque leur nombre total est évalué à 12 millions.À plus de 90 % sédentaires, ils sont souvent indésirables et s’entassent dans des bidonvilles ou subissent des expulsions. Partout, ils font face à des difficultés d’intégration dues, en particulier, au faible pourcentage d’entre eux qui font des études. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, 250 000 à 500 000 d’entre eux furent massacrés par les nazis qui les considéraient comme membres d’une « race inférieure ».

Cet  intérêt  de la part de l’UE est récent : l’Union n’a que récemment pris conscience de la dimension européenne du sujet. C’est surtout avec l’élargissement que cette question a commencé à intéresser la Commission européenne, alors que les populations roms sont particulièrement nombreuses en Europe centrale. Un premier sommet européen à ce sujet avait eu lieu en 2008, à Bruxelles. Il avait abouti à la rédaction d’une « Plate-forme européenne pour l’inclusion des Roms ». Le 31 janvier 2008, le Parlement européen avait également adopté une résolution réclamant « une stratégie européenne pour les Roms » (cf. Nea Say). Mais depuis deux ans, peu de chose a réellement avancé, malgré la multiplication au cours de ces derniers mois de colloques, conférences, réunions interministériels où Parlement européen et Commission rivalisent dans a multiplication « d’évènements » dont le chroniqueur a du mal à rendre compte. Le point d’orgue de toutes ces manifestations c’est la réunion de Cordoue.

Le sommet de Cordoue s’est  en particulier penché sur les questions sociales et les politiques de santé publique. Ses conclusions devraient être avalisées par le Conseil ministériel européen de juin prochain. Cette journée a été instituée par les organisations roms en référence au premier congrès européen organisé le 8 avril 1971 à Londres, au cours duquel elles avaient tenté de s’organiser et avaient mis sur pied une première série de revendications communes. Elles avaient aussi adopté un drapeau commun, représentant une roue sur un fond bleu et vert.

La Commission européenne

Dans sa communication rappelle son engagement, exhorte les États membres à utiliser les Fonds de l’Union pour favoriser l’intégration économique et sociale des Roms. Selon ce rapport, l’intégration sociale des Roms passe par l’accès à l’emploi et la non-ségrégation dans les domaines de l’enseignement, du logement et des services de santé. L’intégration des Roms, dont la population est estimée à quelque 10 à 12 millions de personnes – ce qui est l’équivalent de la population belge ou grecque – relève de la responsabilité conjointe des États membres et des institutions de l’Union européenne. Un autre rapport contient une évaluation des progrès réalisés en matière d’intégration au cours des deux dernières années. Ces deux documents http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=MEMO/10/121&format=HTML&aged=0&language=EN&guiLanguage=en constituent les pièces maitresses soumises à l’examen du sommet de Cordoue. Dans cette communication, qu’elle veut stratégique, la Commission trace également les grandes lignes d’un programme à moyen terme ambitieux visant à aplanir les principaux obstacles à l’inclusion des Roms. Ce programme prévoit entre autres:

-. la contribution des Fonds structurels, y compris du Fonds social européen, (qui représentent ensemble près de la moitié du budget de l’Union) aux efforts d’inclusion des Roms;

-. la prise en considération de la problématique des Roms dans l’ensemble des domaines d’action pertinents aux niveaux national et européen, de l’emploi au développement urbain et de la santé publique à l’élargissement de l’Union;

-.la valorisation du potentiel des communautés roms afin qu’elles soutiennent la croissance inclusive dans le contexte de la stratégie Europe 2020.

Communication sur l’intégration économique et sociale des ROMS en Europe (FR) (EN) http://ec.europa.eu/social/main.jsp?langId=fr&catId=89&newsId=749&furtherNews=yes

Progress Report 2008-2010 (EN) http://ec.europa.eu/social/main.jsp?langId=fr&catId=89&newsId=749&furtherNews=yes

Dans son discours, http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=SPEECH/10/147&format=HTML&aged=0&language=EN&guiLanguage=en Viviane Reding a souligné que  «L’Union, qui est fondée sur des valeurs solides, doit garantir le respect des droits fondamentaux des Roms. Il est inacceptable que cette minorité ethnique subisse des discriminations (…) apporter des solutions aux problèmes des Roms sera tout profit pour nos sociétés et nos économies. Seule une action soutenue et coordonnée permettra d’améliorer réellement la situation des Roms partout en Europe.» De son côté László Andor, commissaire européen chargé de l’emploi, des affaires sociales et de l’inclusion, a insisté sur le fait que  «Les efforts d’intégration des Roms doivent s’appliquer à l’intégralité du cycle de vie des gens, ce qui suppose que des actions soient menées en faveur de cette minorité du jardin d’enfants aux services de soins pour personnes âgées en passant par l’enseignement ordinaire et l’emploi des adultes. Les communautés roms bénéficient des efforts que nous accomplissons pour lutter contre la pauvreté et le chômage.» Et d’ajouter: «Les Roms n’ont pas besoin d’un marché du travail distinct; ils n’ont pas besoin d’écoles qui perpétuent la ségrégation de leurs enfants et ils ne souhaitent pas vivre dans des ghettos rénovés. Notre objectif est que les Roms soient acceptés sans discriminations et qu’ils soient intégrés dans la société. Le Fonds social européen est un excellent moyen de soutenir cette vision transversale de l’intégration.»

La Commission ne cache pas que la situation de nombreux Roms d’Europe reste certes difficile, mais des progrès importants ont été réalisés aux niveaux européen et national. Au cours des deux dernières années, l’Union européenne et les États membres se sont efforcés d’améliorer l’efficacité de la législation antidiscriminatoire et du financement de l’UE dans le contexte des actions menées en faveur de l’inclusion des Roms. Leurs efforts portent notamment sur la lutte contre la discrimination, la ségrégation et la violence raciste ainsi que sur le soutien aux programmes visant à affranchir les Roms du cercle vicieux de la pauvreté, de la marginalisation sociale, des mauvais résultats scolaires et des problèmes de logement et de santé. La Commission a notamment engagé des procédures judiciaires contre vingt-quatre États membres afin d’obtenir que la législation européenne interdisant les discriminations fondées sur la race soit correctement transposée dans les législations nationales. Sur ces vingt-quatre affaires, douze sont toujours pendantes et douze ont abouti au résultat escompté. Afin d’encourager les États membres à utiliser efficacement les Fonds structurels, la Commission réalise deux études qui mettront en évidence les projets, programmes et politiques conduisant à l’inclusion des Roms; la première de ces études porte sur les Fonds considérés globalement et la seconde sur le soutien du Fonds social européen aux Roms.

Ce ne sont pas les premières initiatives prises par la Commission (cf. Nea say) : ainsi que l’avaient demandé les chefs d’État ou de gouvernement de l’Union, la Commission a publié un rapport détaillé sur les instruments et politiques de l’UE en faveur de l’inclusion des Roms et sur les progrès réalisés en la matière, qui a été présenté à l’occasion du premier sommet européen sur les Roms en septembre 2008. Les chefs d’État ou de gouvernement de l’UE ont confirmé en décembre 2008 la volonté de leurs gouvernements de recourir aux outils disponibles pour soutenir l’intégration des Roms. En 2009, la Commission a mis sur pied une plateforme européenne pour l’inclusion des Roms rassemblant des experts et des responsables politiques. Cette plateforme a élaboré dix principes de base communs pour l’inclusion des Roms qui doivent aider les responsables politiques à concevoir et à mettre en œuvre des actions efficaces.

Informations complémentaires

L’Union européenne et les Roms :http://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=518&langId=fr

Deuxième sommet européen sur les Roms :  http://ec.europa.eu/social/main.jsp?catId=88&langId=fr&eventsId=234&furtherEvents=yes

La tenue du sommet est d’abord l’expression de la volonté de la présidence espagnole et a fixé comme objectif de simplement progresser dans le respect des engagements et dans la mise en œuvre des instruments prévus pour éliminer les situations d’inégalités et de discriminations en matière d’accès aux biens et au bien-être social. La présidence espagnole a souhaité essentiellement des avancées portant sur les principes fondamentaux adoptés par la plate-forme européenne en matière de développement régional, d’emploi, d’éducation, d’égalité de traitement, de droits et de liberté. Elle rappelle que les Roms font partie de la civilisation européenne depuis 1000 ans. Ils sont présents dans les 27 Etats membres. C’est pourquoi cette question, inscrite dans tous les agendas, faisant l’objet de plusieurs résolutions a pris une importance politique de grande envergure au cours de ces dernières années.

Le Parlement européen :

Lors de la session plénière du 25 mars les députés ont demandé une intensification des efforts et souligné la nécessité d’une analyse critique des échecs des politiques en matière d’intégration des Roms, compte tenu des « progrès insuffisants « constatés à ce jour. Le Parlement demande une stratégie d’intégration des Roms depuis 2008 et les députés estiment que des engagements politiques devraient être pris lors du second sommet européen des Roms . (CF ; supra). Dans une résolution au nom de sept groupes politiques du PE, adoptée  par 572 voix pour, 28 contre et 23 abstentions, les députés condamnent la récente montée du racisme à l’égard des Roms dans plusieurs Etats membres de l’UE et expriment leurs inquiétudes face aux discriminations dont les Roms font l’objet en matière d’éducation, de logement, d’emploi, d’accès aux soins de santé et au vu de leur faible participation politique. Le rapatriement forcé des Roms vers les pays des Balkans, où ils risquent d’être discriminés et de se retrouver sans logement, est préoccupante, ont également souligné les députés.

Le Parlement demande des efforts concertés pour « obliger les parties concernées à s’acquitter de leurs engagements ». Le Parlement réitère sa demande de 2008 d’élaborer une stratégie européenne sur les Roms, à laquelle la Commission européenne n’a pas encore répondu. Les nouveaux commissaires doivent accorder la priorité aux questions liées aux Roms qui relèvent de leurs compétences et une approche horizontale doit être adoptée, estiment les députés. Un programme précis de développement doit être établi, avec une possibilité d’intervention dans « les zones de ghetto », confrontées à de graves désavantages structurels, estiment les députés. Les mesures anti-discrimination « ne sont pas suffisantes » et les parties concernées doivent s’acquitter des engagements qu’elles ont pris. L’utilisation des fonds de préadhésion doivent être évalués en fonction de leurs impacts sociaux et les autorités locales doivent être incitées à faire un meilleur usage des opportunités de financements structurels.

Texte de la résolution (FR) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7-TA-2010-0085+0+DOC+XML+V0//FR&language=FR

(EN) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7-TA-2010-0085+0+DOC+XML+V0//EN

L’Agence européenne des droits fondamentaux :

Dans sa déclaration (FR) http://www.fra.europa.eu/fraWebsite/attachments/Statement_Intl_Roma_Day_2010_FR.pdf (EN) http://www.fra.europa.eu/fraWebsite/attachments/Statement_Intl_Roma_Day_2010.pdf elle souligne qu’une fois encore on n’a pas agi de manière adéquate contre la discrimination dont les Roms sont les victimes en Europe. Les Roms doivent être impliqués dans la définition, la mise en œuvre et l’évaluation des stratégies les concernant. Se référant à son enquête EU-MIDIS (publié en son temps dans Nea Say)  de décembre 2009, http://fra.europa.eu/fraWebsite/eu-midis/index_en.htm l’Agence rappelle qu’environ un Rom sur quatre se dit victime de violences, y compris des attaques, menaces et harcèlements intenses, au moins une fois au cours des douze derniers mois. Un Rom sur cinq se dit victime de haine raciale au cours de cette même période. De 66% à 92% d’entre eux n’ont pas souhaité faire part de leur expérience par manque d’informations et crainte de représailles éventuelles. L’Agence constate par ailleurs que les instruments légaux pour combattre l’exclusion et la discrimination existent. Mais si ces instruments légaux doivent avoir des effets positifs, il faut absolument que soient mises en place de façon rigoureuse des mesures pratiques de lutte contre l’exclusion sociale des Roms. « Il est des secteurs où des améliorations peuvent être constatées, mais dans la plupart des cas, la situation est mauvaise. Lorsque nous sommes témoins de l’intensité des crimes raciaux contre les Roms, les plus hautes autorités européennes et nationales devraient s’exprimer à haute voix contre tout ce qui est anti-gypsy. Plus particulièrement en ces temps de crise économique, les droits humains doivent être vus une base de notre bien-être, non comme un coût «  a déclaré le directeur de l’Agence des droits fondamentaux, Morten Kjaerum.

Stratégie Europe 2020 : les Roms figurent dans l’une des trois priorités retenues au titre de « l’initiative phare » de la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale http://europa.eu/press_room/press_packs/europe_2020/index_en.htm

WEBSITES :

-. http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=MEMO/10/121&format=HTML&aged=0&language=EN&guiLanguage=en

-. http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=MEMO/10/121&format=HTML&aged=0&language=EN&guiLanguage=en

(1)    Que veut dire « ROM » ?

Rom signifie « être humain » dans la langue indo-européenne romani ou tsigane. C’est par ce terme que l’Union romani internationale (IRU) a désigné, lors de son premier congrès en 1971, l’ensemble des populations originaires de l’Inde, dont les langues découlent de celles parlées naguère dans le nord-ouest du sous-continent indien. Ces populations, qui exerçaient de petits métiers (bouchers, tanneurs, chiffonniers, saltimbanques…), formaient une communauté considérée comme « impure » dans l’Inde des castes. Désignés comme « hors castes », ces populations n’avaient pas le droit d’être sédentaires. À partir de l’an 1000, elles se sont exilées vers l’Europe, puis sur tous les continents. Ces groupes nomades sont aussi appelés en fonction d’étymologies différentes : Tsiganes (« intouchable » en grec), Manouches (« être humain » en sanskrit), Romanichels (« groupes d’hommes » en romani), Gipsies ou Gitans évoquant une ancienne légende selon laquelle ils étaient originaires d’Égypte.

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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