La Turquie prend la présidence du Conseil de l’Europe. Une présidence ambitieuse qui essayera de se faire pardonner de nombreux manquements.

La Turquie prend la présidence du Conseil de l’Europe au oment même où la Commission européenne rend public le rapport la concernant (Cf. autre information) et où ses négociations semblent marquer le pas et où le scepticisme grandit de part et d’autre( cf. autre information sur les réactions des parlementaires européens. Raison supplémentaire, semble-t-il, pour que la Turquie veuille imprimer sa marque pendant sa présidence du Conseil de l’Europe.

La Turquie,  membre fondateur du Conseil de l’Europ, mais aussi l’un de ses mauvais élèves en matière de droits de l’homme, veut montrer son engagement vis-à-vis des valeurs européennes et sa capacité à les faire progresser. « Les priorités de la présidence turque ont été définies dans le but de renforcer le rôle politique, la visibilité et l’influence, en Europe et dans le monde, de la plus ancienne organisation paneuropéenne », affirme le Comité des ministres dans un communiqué.

Chargé depuis 1949 de veiller au respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit, le Conseil de l’Europe a toujours été, pour les pays européens, l’antichambre d’une Union européenne à laquelle Ankara souhaite adhérer. Les négociations, qui ont commencé en 2005, butent sur la non reconnaissance de Chypre par la Turquie et la lenteur des réformes qui doivent renforcer la démocratie et les droits de l’homme dans le pays. Le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan fait donc du renforcement des mécanismes de suivi des engagements des Etats membres l’une des priorités de sa présidence de six mois.

Sur un plan plus symbolique, il souhaite apporter durant celle-ci une réponse aux « défis » auxquels son confrontées « des sociétés européennes multiculturelles ». Un groupe « d’éminentes personnalités », présidé par l’ancien ministre des Affaires étrangères allemand, le Vert Joschka Fischer, fera des propositions sur le sujet en mai 2011, lors d’une réunion ministérielle des 47″ à Istanbul. (cf. Nea say)

Ankara s’engage également à faire avancer la réforme de la Cour européenne des droits de l’homme, menacée depuis des années d’asphyxie par le volume croissant des requêtes. L’un des noeuds du problème réside dans la non prise en compte par les Etats de la jurisprudence de la Cour, laquelle doit trancher en majorité des affaires au caractère répétitif. La Turquie n’a, à ce jour, guère réussi,  à trouver un remède au plan intérieur. De ce fait a-t-elle toute la crédibilité pour réussir ?

La Turquie était à l’origine, en 2009, de 11,3% des affaires pendantes devant la Cour. Elle est aussi le pays le plus souvent condamné, année après année. Ankara a subi 341 condamnations en 2009, soit 22% des constats de violations prononcés, et ce au titre d’articles protégeant le droit à la vie, l’interdiction de la torture, le droit à un procès équitable, le droit à la liberté d’expression ou encore le droit de propriété. Les réformes mises en place depuis 2002 par l’AKP, le parti islamiste modéré au pouvoir, dans la perspective d’un alignement sur les standards européens, ne semblent pas avoir encore porté leurs fruits. Si l’on s’en tient aux requêtes confiées à une juridiction de la Cour, après le contrôle formel de validité, leur nombre a paradoxalement doublé entre 2006 et 2009.

Mais peut-être les Turcs, mieux informés de leurs droits, sont-ils aussi plus nombreux à se tourner vers Strasbourg. Mais aussi les défaillances du système judiciaire turc les poussent à s’en remettre de façon préférentielle à la justice européenne comme le font d’ailleurs les Russes.

En résumé ce sont cinq grandes priorités qui sont retenues dans le but de renforcer le rôle politique, la visibilité et l’influence du Conseil de l’Europe

      -1. Réformer le Conseil de l’Europe : la Turquie soutiendra l’ambitieux train de réformes présenté par le Secrétaire General afin que le Conseil de l’Europe s’impose à nouveau sur la scène internationale en tant qu’organisation innovante, flexible et visible, capable de s’adapter à l’évolution du paysage politique européen.

      -2. Réformer la Cour européenne des droits de l’homme: afin de garantir à long terme l’efficacité du système européen de protection des droits de l’homme, la Turquie poursuivra le travail mené par ses prédécesseurs et accueillera une conférence sur la réforme de la Cour suite au processus entamé à Interlaken en février 2010.

     -3. Renforcer les mécanismes de suivi indépendants : la présidence turque organisera des séminaires, tables rondes et ateliers qui permettront de mieux faire connaître ces mécanismes qui font l’originalité de l’Organisation. D’autres acteurs européens et internationaux y seront associés, permettant ainsi de mettre en valeur les avantages comparatifs des mécanismes du Conseil de l’Europe.

     -4. L’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme : la Turquie encouragera tous les partenaires à accélérer le processus d’adhésion et apportera son aide pour trouver des solutions aux problèmes techniques qui se poseront.

      -5. Faire face aux défis des sociétés multiculturelles en Europe: la Turquie est convaincue que le Conseil de l’Europe est l’acteur régional et international le mieux placé pour relever les nouveaux défis engendrés par la résurgence de l’intolérance et de la discrimination en Europe. A son initiative, un Groupe d’éminentes personnalités a été chargé d’ouvrir de nouvelles pistes de réflexion et de formuler de nouvelles propositions sur « comment vivre ensemble ».

Programme complet et projet de calendrier des activités https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=CM/Inf(2010)41&Language=lanFrench&Ver=original&BackColorInternet=DBDCF2&BackColorIntranet=FDC864&BackColorLogged=FDC864

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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