Prochain sommet Etats-Unis/Union européenne : le Parlement européen indique ses priorités, dont pour la première fois, l’espace de liberté sécurité et justice qui occupe une place significative.

  Avant le Sommet du 20 novembre UE-États-Unis, les députés ont remis leurs recommandations au Conseil sur la façon d’aborder les questions transatlantiques clés telles que la coopération économique nécessaire pour sortir de la crise, la protection des données à caractère personnel, l’introduction d’une taxe de voyage vers les Etats-Unis et la fuite de documents militaires américains classifiés sur l’Irak. Mais aussi les négociations sur la contrefaçon (Acta).Cette importance donnée à l’ELSJ est le reflet d’une déception réelle : la déclaration conjointe du 28 octobre 2009, UE-Etats-Unis , sur le renforcement de la coopération transatlantique  dans le domaine de la liberté, la sécurité et la justice  comme n’a pas porté ses fruits la déclaration conjointe du 3 juin 2010 sur la lutte contre le terrorisme.

La période qui s’est écoulée entre les deux sommets a été jalonnée de crises dont le summum a été atteint avec SWIFT. Les contentieux sont nombreux d’où cet appel du Parlement européen qui invite « les deux partenaires à faire la promotion du respect de la démocratie et des droits de l’homme dans le monde un élément essentiel de leur action ». Dans le même ordre d’idées, le Parlement européen a souligné »la nécessité d’une coordination intensive en matière de diplomatie de crise et de diplomatie préventive ; il invite une nouvelle fois le gouvernement des Etats-Unis à ratifier le statut de Rome de la Cour pénale internationale et à y adhérer ; il réitère son appel à l’abolition de la peine de mort. » Par ailleurs « tout en étant pleinement conscient du fait que la divulgation de documents militaires classifiés risque de mettre en péril le personnel militaire, le Parlement se déclare extrêmement préoccupé par la gravité des récentes allégations selon lesquelles la torture avait été tolérée en Iraq. Il demande que cette question soit examinée lors du Sommet UE-Etats-Unis dans l’optique de la mise en place d’une enquête indépendante transatlantique ». La diffusion controversée par Wikileaks a provoqué des interventions virulentes dans le débat qui a précédé le vote de la résolution. A nouveau le Parlement européen emprunte la même voie que celle qu’il avait utilisée il y a quelques années avec les prisons secrètes de la CIA, les vols secrets et les « extraordinary renditions ». Démarches qui n’ont pas reçu à ce jour une conclusion véritable.

Les relations commerciales avec les États-Unis dans le contexte de la crise économique ainsi que la prochaine réunion du Conseil économique transatlantique (CET) sont des questions clés pour les députés. Le Parlement, dans sa résolution, renouvelle son soutien à la création d’un marché transatlantique sans entraves d’ici à 2015, mais montre des préoccupations quant aux différences de règlementation sur les nouveaux aliments, aux produits génétiquement modifiés et au clonage animal. Ils invitent la Commission à insister pour que les autorités américaines acceptent les produits de l’Union européenne étiquetés uniquement en mesures métriques. Mais à bien des égards le fonctionnement du CET reste lui aussi décevant, c’est pourquoi le parlement demande qu’il devienne plus stratégique par une meilleure programmation des réunions, des calendriers, des feuilles de route, des rapports d’activité qui devraient aussi être rendus publics en vue d’une plus grande transparence. Dans ce contexte, le parlement appelle une nouvelle fois les co-présidents du CET à tenir compte du rôle essentiel des législateurs pour la réussite du CET. Il convient donc d’associer directement les représentants du Dialogue transatlantique des législateurs (TLD) car ce sont eux qui sont compétents pour adopter et contrôler de nombreuses décisions du CET. En conséquence, les principaux membres du Congrès et du Parlement européen doivent participer au dialogue des législateurs et aux travaux du CET : la législation qui en sortirait ne doit pas avoir d’effets indésirables sur le commerce et les investissements. Il souhaite que l’actuel DTL puisse progressivement évoluer dans le sens d’une assemblée interparlementaire, conformément au recommandations du Parlement exprimées dans sa résolution du 26 mars 2009.

La conception d’une stratégie d’action commune UE-États-Unis pour la protection des droits de propriété intellectuelle, y compris en ce qui concerne les négociations en cours pour un accord commercial anti-contrefaçon (ACAC ou ACTA en anglais), est un autre aspect essentiel des relations commerciales avec les États-Unis, soulignent les députés. Dans ce contexte le Parlement a souligné l’importance d’une coopération transatlantique étroite en ce qui concerne l’agenda numérique, notamment la liberté pour internet dans le monde, la neutralité de l’internet, le droit à la vie privée,, les normes communes, la transparence et l’état de droit en relation avec Acta.

Frais de voyage aux États-Unis : les députés se sont déclarés également « extrêmement préoccupés » par le projet de loi sur la promotion des voyages (Travel Promotion Act, ou TPA) » en raison de ses effets discriminatoires, dans la mesure où il ne s’appliquerait qu’aux voyageurs se déplaçant dans le cadre du régime américain d’exemption de visa, ainsi que par ses incidences en termes de protection des données, sachant que les frais ne pourront être acquittés qu’en utilisant l’une des quatre cartes de crédit principales dont les sociétés sont toutes basées sur le territoire des États-Unis ». Depuis janvier, les citoyens de l’UE des États membres relevant du programme américain d’exemption de visa doivent payer 14 dollars pour voyager aux États-Unis. Le Parlement européen demande donc expressément que le problème soit traité lors de la prochaine réunionJAI UE-Etats-Unis du mois de décembre.

Les Etats-Unis … et le reste du monde : le Parlement a fixé ses priorités sur les relations internationales de l’UE et des États-Unis avec le reste du monde, y compris la lutte contre le terrorisme mondial, les efforts de négociation au Moyen-Orient et la menace des armes nucléaires(Iran).En ce qui concerne le conflit israélo-palestinien, les députés félicitent les Etats-Unis pour leur nouvelle approche vis-à-vis d’Israël, « rappellent la nécessité de reprendre les négociations en vue de parvenir, dans des délais convenus, à une solution fondée sur la coexistence, dans la paix et la sécurité, de deux États, l’État d’Israël et un État Palestinien indépendant, démocratique et viable ». Le texte invite également  le gouvernement israélien à proroger le moratoire sur la construction de colonies.

Mais c’est la coopération judiciaire et policière, les visas, les transferts de données qui occupent une place de choix de façon inédite. Un appel à « explorer des alternatives moins intrusives » que la collecte de données PNR La protection des données personnelles est un domaine sensible dans les relations UE-États-Unis, comme dans le cas de l’accord sur les transferts de données bancaires (rapport Swift). Un éventuel accord général UE-États-Unis sur la protection des données est actuellement en discussion, ainsi qu’un nouvel accord sur le partage des données des passagers aériens (PNR). Le Parlement aura un droit de veto sur les deux textes, a-t-il rappelé. Dans une autre résolution déposée par les groupes PPE, S&D, ADLE, Verts/ALE, ECR et GUE/NGL, le Parlement Souligne que les données PNR ne devraient en aucun cas être utilisées pour l’exploitation de données ou à des fins de profilage. (cf. autre information. Les députés réitèrent leur appel à la Commission de fournir les preuves factuelles que « la collecte, le stockage et le traitement des données PNR est nécessaire ». Ils invitent également la Commission à « envisager des alternatives moins intrusives ».

A cet égard le Parlement :

      -. «  insiste sur le fait que l’Union européenne doit négocier l’admission au programme américain d’exemption de visa en tant qu’entité unique, afin de veiller à ce que les quatre États membres – Bulgarie, Chypre, Pologne et Roumanie – qui se trouvent exclus du programme américain d’exemption ne soient pas obligés de conclure des accords bilatéraux avec les États-Unis pour obtenir le régime sans visa; demande à nouveau à la Commission de continuer à tout mettre en œuvre pour signifier aux États-Unis, aux niveaux politiques et techniques, l’importance que revêt aux yeux de l’Union l’accès de ces quatre États membres au régime d’exemption de visa, dans les plus brefs délais;

      -.   souligne l’esprit de coopération qui règne entre l’Union européenne et les États-Unis dans leur lutte contre le terrorisme mondial et invite instamment l’Union européenne et les États-Unis à continuer d’air de manière coopérative afin de lutter contre le renouveau de la menace terroriste; rappelle sa détermination dans ce domaine ainsi que sa ferme conviction de la nécessité de garantir que les mesures de sécurité ne portent pas atteinte à la protection des libertés civiles et des droits fondamentaux, et s’inscrivent dans le plus grand respect de la vie privée et de la protection des données; rappelle que les principes de nécessité et de proportionnalité sont essentiels pour mener une lutte efficace contre le terrorisme;

      -.   salue le fait que l’accord entre l’Union européenne et les États-Unis en matière de transfert de données bancaires reflète la volonté des États-Unis de répondre positivement aux exigences en matière de protection des données, énoncées par le Parlement européen dans le cadre du rapport SWIFT;

      -.   demande au Conseil de donner rapidement son aval à un mandat de négociation en vue d’un accord UE-États-Unis sur la protection des données; invite instamment le négociateur de l’Union à faire avancer les négociations de manière à garantir la protection pleine et entière des droits fondamentaux; soutient l’approche de la Commission consistant à disposer d’un accord-cadre de ce type applicable à tous les accords futurs ou existants entre l’Union ou les États membres et les États-Unis sur le transfert et le traitement des données à caractère personnel dans le cadre de la coopération policière et judiciaire;

      -.   demande, aussi bien aux États-Unis qu’à l’Union européenne, de poser des limites à la collecte des données et de ne traiter que ce qui est strictement nécessaire compte tenu des objectifs de sécurité visés, de façon à réduire autant que possible les atteintes à la liberté et aux libertés civiles, et demande instamment que les requêtes portant sur des transferts de données, ainsi que diverses dispositions concernant la justice et les affaires intérieures soient, de façon générale, traitées dans un cadre multilatéral UE-États-Unis plutôt que dans un cadre bilatéral, au cas par cas, avec les États membres;

      -.   se déclare extrêmement préoccupé par le projet de loi sur la promotion des voyages (Travel Promotion Act, ou TPA) en raison de ses effets discriminatoires, dans la mesure où il ne s’appliquerait qu’aux voyageurs se déplaçant dans le cadre du régime américain d’exemption de visa, ainsi que par ses incidences en termes de protection des données, sachant que les frais ne pourront être acquittés qu’en utilisant l’une des quatre cartes de crédit principales dont les sociétés sont toutes basées sur le territoire des États-Unis; demande que la question du Système électronique d’autorisation de voyage ESTA) soit évoquée lors de la prochaine réunion ministérielle JAI UE-États-Unis du mois de décembre ».

La Conclusion du Parlement s’impose, à ses yeux, comme une évidence : « compte tenu des évolutions à l’œuvre d’une rive à l’autre de l’Atlantique qui mettent en cause l’harmonie et la diversité de nos sociétés, se déclare favorable à ce que s’instaure un dialogue ouvert entre nos pouvoirs publics et nos sociétés sur la manière de renforcer collectivement la tolérance et le respect pour la diversité au sein de nos communautés respectives, dans le contexte du respect universel des droits humains fondamentaux ». L’allusion aux problèmes qui déchirent nos sociétés est évidente qu’il s’agisse de la discrimination et de l’intégration des minorités, du racisme , de la xénophobie, de l’immigration, de la tolérance religieuse du port des insignes religieux ou de la pratique religieuse.

Texte de la Résolution (FR) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?type=MOTION&reference=P7-RC-2010-0608&language=FR

 (EN) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+MOTION+P7-RC-2010-0608+0+DOC+XML+V0//EN

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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