Le regard des européens sur l’Islam : un malaise, mais une préoccupation secondaire

L’ Ifop publie les résultats d’un sondage de 2011 sur les Européens et l’islam. « Depuis plusieurs années reviennent de façon récurrente dans les sociétés européennes des polémiques et controverses relatives à l’islam », note l’institut de sondage Ifop. Réalisé du 9 au 18 avril 2011 par questionnaires auto-administrés en ligne, il a été mené en Allemagne, aux Pays-Bas, en France et au Royaume-Uni, sur des échantillons assez réduits : de 600 à 800 personnes selon les pays.

Dans les quatre pays sélectionnés, une majorité relative des personnes interrogées estime que la présence d’une communauté musulmane dans leur pays respectif représente une menace pour l’identité de leur pays (notamment en Grande-Bretagne avec 47 % des réponses et aux Pays-Bas avec 44 %). Mais « ces résultats cachent une réalité plus nuancée », affirme l’Ifop : en effet, plus de 50 % des personnes interrogées dans chaque pays expriment soit de l’indifférence à l’égard de cette question (entre 34 % en Grande-Bretagne et 37 % au Pays-Bas) soit l’idée que la présence d’une communauté musulmane est plutôt un facteur d’enrichissement (19 % des Néerlandais et des Britanniques, 22 % des Français et 24 % des Allemands).

 « Il est, d’ailleurs, intéressant de noter que les interrogations qui se posent ne portent plus sur l’origine géographique des personnes issues de l’immigration mais sur leur appartenance culturelle et religieuse », notent les sondeurs, qui constatent que la terminologie « population d’origine musulmane » a peu à peu remplacé en France celle de « population d’origine maghrébine », aussi bien du côté des dirigeants que des citoyens.

L’institut de sondage a choisi de tester les quatre pays européens où la population musulmane est, en proportion, la plus importante. Il distingue toutefois dans son analyse, « le Royaume-Uni et les Pays-Bas d’un côté, qui ont longtemps promu un modèle multiculturaliste débouchant sur un communautarisme seulement récemment remis en cause », et de l’autre la France, « qui a maintenu une politique républicaine de cohésion nationale reposant sur un modèle d’assimilation qui ne cesse de montrer ses limites et ses échecs ». Quant à l’Allemagne, récemment passée d’un pays d’immigration provisoire vers un pays d’immigration permanente, elle en est encore à s’interroger « sur les fondements de la nation allemande en tant qu’entité ethnico-religieuse, avec la conception du « droit du sang ».

L’IFOP  constate que, « quel que soit le modèle retenu », la perception d’un échec de l’intégration des musulmans dans la société est largement partagée parmi les citoyens européens, constate l’Ifop. Les Néerlandais (77 %), les Allemands (75 %) se montrent les plus critiques sur cette question suivie de près par les Français (68 %) et les Britanniques (65 %). Interrogés sur les raisons de cet échec selon eux, les sondés mettent en avant le refus de ces populations de s’intégrer, très loin devant les causes économiques ou sociales.

L’attitude des jeunes n’est pas  très différente de celle de leurs aînés à cet égard : en France et de façon plus prononcée encore en Grande-Bretagne, une forte proportion des moins de 35 ans tend à considérer la présence d’une communauté musulmane comme un facteur d’enrichissement culturel. « À l’inverse, en Allemagne et aux Pays-Bas cette génération est beaucoup plus critique à l’égard de l’islam que leurs aînés », notent les auteurs de l’étude.

 

Parmi les symboles les plus emblématiques de l’islam en Europe, l’Ifop a choisi de tester le voile, la présence de mosquées et la possibilité de partis musulmans. 90 % des sondés s’opposent au port du voile islamique à l’école en France, 62 % aux Pays-Bas (70 % en Allemagne et 64 % au Royaume-Uni).

Dans la rue, « l’indifférence domine en Allemagne, tandis que les Néerlandais se montrent les plus tolérants sur ce point (20 % sont favorables au port du voile, 38 % y sont indifférents quand 42 % y sont opposés) ». En revanche, les Français sont les plus nombreux à s’y opposer (59 %). Quant à la possibilité de partis politique ou de syndicats ayant une référence à l’islam, en France « le rejet est unanime » : 74 % des Français (contre 32 % des Allemands) y sont hostiles. Mais seuls 33 % des Français s’opposeraient à l’élection d’un maire musulman dans leur commune. Ce sondage corrobore les résultats d’un sondage effectue  où il apparaissait que 60% des français étaient en faveur de la participation des immigrés aux élections locales alors que la majorité politique, le gouvernement et le président de la République s’y opposent avec constance.

« Les résultats sont à interpréter, comme toujours, avec nuance », note la chercheuse Anne-Laure Zwilling, sur le blog Sociologie des religions. http://sociorel.wordpress.com/2012/02/16/regard-europeens-islam/  « Il serait vraiment intéressant cependant de savoir ce que chacun met derrière la réponse donnée à la phrase de l’interview : « diriez-vous qu’aujourd’hui les musulmans et les personnes d’origine musulmane sont bien intégrés dans la société ?» On pourrait aussi s’interroger sur ce que porte le fait de poser une question en assimilant « musulmans et personnes d’origine musulmane ». Mais la sociologue reconnait la grande qualité de l’étude, y compris dans sa rédaction et en recommande la lecture.

Un précédent sondage Ifop pour Europe 1 et Paris Match début décembre 2011 avait révélé que, pour 76 % des Français, « l’islam progresse trop ». Ils n’étaient plus que 14 % à penser que l’État devrait aider à financer la construction des mosquées. Surtout, une enquête du même institut de sondage, réalisé en décembre 2010 en France et en Allemagne et révélée le 4 janvier 2011 par Le Monde , illustrait déjà « la crispation des opinions publiques sur les différences culturelles et religieuses liées à l’islam » mais uniquement en France et en Allemagne.

Que retenir ?

Tout d’abord un constat d’échec de l’intégration pour des r      isons tenant au sentiment d’incompatibilité entre tradition chrétienne ou culture laïque et pratique musulmane. Mais les échecs de l’intégration sont largement attribués à l’incapacité des politiques à prendre en compte et au changement de paradigme : il ne s’agit pas d’empêcher les immigrés d’entrer, mais de mieux gérer ceux qui sont déjà présents en toute légalité. Parallèlement subsiste la crainte d’afflux massifs.

L’Islam  apparait plus visible sous le double effet d’une installation désormais définitive et de leur médiatisation croissante. C’est cette plus grande visibilité qui pose réellement problème est-on tenté  de reconnaîtrez.. Tout se passe comme si c’était moins le  poids que la visibilité et l’adéquation au système des valeurs nationales. C’est cette visibilité de  l’Islam perçue comme excessive dans l’espace public qui apparait comme incompatible avec les valeurs nationales et le mode de vie européen.

Enfin autant on rejette fortement l’Islam politique autant le respect des croyances personnelles reste fort. On observe une hostilité plus forte à un parti confessionnel ; à une organisation de l’Islam susceptible de donner plus de poids encore et de visibilité politique à cette religion, qu’à un individu qui exprimerait une foi personnelle. Les opinions européennes ne font pas tant montre d’hostilité  à l’égard de la religion musulmane qu’à une remise en cause de la laïcité. Ils sont globalement pour l’expression d’une foi individuelle quelle qu’elle soit, mais rejettent toute forme de revendication collective.

Au bout du compte, la menace ressentie n’est pas d’ordre économique (des concurrents sur le marché de l’emploi et aussi pour le partage des prestations sociales), malgré la crise durablement installée, mais la menace est d’ordre culturel avec le sentiment dominant d’une mise en danger de l’identité culturelle des des sociétés de tradition chrétienne.

      – . Commentaires des résultats du sondage IFOP http://www.ifop.fr/media/pressdocument/410-1-document_file.pdf

      -. Résultat du sondage IFOP sur les valeurs des français à six mois des élections de 2012 http://www.ifop.com/?option=com_publication&type=poll&

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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