L’entrée en vigueur de l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE).

L’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) est entrée en vigueur lundi 1er avril 2012. Organisée par le Comité Economique et Social Européen (CESE) et le Comité des Régions (CdR), la conférence sonnait comme une dernière mise au point avant son lancement. Elle permettait également aux deux comités consultatifs de l’Union Européenne (UE) d’éclairer leurs rôles dans la mise en œuvre de cette innovation politique.

 

L’ICE, un outil de communication pour les institutions européennes

L’ICE apparaît à l’article 11, alinéa 4 du Traité de Lisbonne où sont mentionnées les deux conditions fondamentales de la recevabilité d’une telle initiative, à savoir le nombre (1 million de signatures au minimum) et la diversité de la provenance (« nombre significatif d’Etats membres »). Elle a ensuite fait l’objet d’une concrétisation dans le droit dérivé de l’UE via un règlement provenant de la procédure ordinaire de décision (Conseil et Parlement) et publié le 16 février 2011. Le 17 novembre 2011,la Commissiona émis son règlement d’exécution pour acter définitivement l’existence de cette nouvelle procédure. Ainsi, il a été décidé de le rendre effectif le 1er avril 2012, plus de trois ans après l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne.

 

La conférence  revenait tout d’abord sur les ambitions de cette procédure et laissait les acteurs à l’origine de cette Initiative exprimer leurs espérances vis-à-vis de ce projet inédit. Nombre de participants sont revenus sur le rôle que devrait jouer cette Initiative dans la reformulation d’un contrat démocratique entre les citoyens européens et l’Union Européenne. Il a été présenté comme un des futurs éléments pouvant combler le fameux « fossé » entre l’Union Européenne et ses citoyens. Ainsi, Mercedes Bresso (Présidente du CE), dans son discours d’ouverture, exprimait explicitement ce besoin en soulignant que « seulement 31% des européens, selon l’Eurobaromètre, avaient une image positive de l’UE » et qu’il fallait que l’Initiative « améliore la connaissance du processus décisionnel de l’UE ». L’Initiative est là pour « abattre certains obstacles, créer ou recréer une appartenance à l’Union Européenne » (Staffan Nilsson, Président du CESE). Il s’agit ainsi de re-légitimer les structures de l’Union Européenne en prolongeant la démocratie représentative par une démocratie participative (« ouvrir le triangle institutionnel qui apparaît fermé » selon le mot de Luc Van den Brande, Commission Européenne). Ainsi, dans un souci pédagogique, la communication est au centre du travail qui accompagnera la mise en œuvre de l’Initiative – Maroš Šefčovič, vice-président dela Commission Européenne, n’a-t-il pas fait un appel à la salle en lui demandant de faire le plus de publicité possible ? Dans cette optique également, il n’est pas étonnant que Anna Maria Darmanin, Vice-Présidente du CESE et responsable de la communication, fasse les remarques de clôture en insistant encore une fois sur le rôle de communication et de diffusion que chacun et chacune doit tenir afin d’amener la plus grande population possible – jusqu’aux taxi-men selon l’exemple de Maureen O’Neill, membre de du CESE et directrice de Faith in Older People -, à s’approprier cette Initiative et, par là, à se rapprocher du travail de l’Union Européenne.

 

Essayer de garder le rôle de relais de la « société civile » et des collectivités pour les deux comités

« Initiative citoyenne », cette innovation n’a pas vocation non plus à se trouver désincarnée et se doit d’être en lien direct avec ce « tissu » qu’est la société civile (associations, ONG mais pas seulement comme on l’a rappelé, il faut ajouter syndicats et entreprises également). Ainsi, la conférence faisait office de tribune aux deux comités consultatifs afin qu’ils expliquent leur rôle dans la mise en œuvre de cette procédure. Pourla Présidentedu Comité des Régions, ce dernier doit soutenir formellement cette Initiative en la promouvant et en l’évaluant mais également en recueillant les initiatives à leur base. Sonia Masini, rapporteuse du projet « Initiative Citoyenne » pour le Comité des Régions, va dans le même sens en affirmant que le rôle du CdR est avant tout d’informer et d’essayer de sortir des enceintes de l’UE en auditionnant de façon décentralisée des collectivités étant, selon elle, à l’origine de bon nombre d’initiatives en matière de participation citoyenne – commela Région RhôneAlpes, représentée par sa Vice-Présidente Lela Bencharif, qui a initié de nombreux projets dans ce sens et a créé une délégation « Démocratie participative » en son sein. Le Comité Economique et Social Européen, lui, devrait jouer un rôle de soutien institutionnel (Staffan Nilsson, président du CESE) et de « plateforme d’information et de communication » (Anne Marie Sigmund, ancienne présidente du CESE et rapporteur pour l’ICE) pour la « société civile ».

Les inquiétudes sur la mise en œuvre de cette Initiative (par exemple la fracture numérique ne permettant pas à tout le monde de pouvoir voter via Internet, les critères de recevabilité parla Commission Européenne, le caractère antagoniste par rapport  aux politiques nationales des pays…) n’ont pas été soulevées par les différents panels appelés à s’exprimer mais par l’auditoire (notamment une membre du CESE, Laure Batut), ce à quoila Commission, pour sa part, – par l’intermédiaire de Margaritis Schinas, membre du BEPA -, a répondu qu’elle n’aura pas loisir d’improviser et qu’il faudra lui laisser du temps et « faire preuve de patience et de confiance ».

Si le  représentant dela Commissionne veut pas, lui, faire de l’Initiative un objet de débat sur le peuple et les élites de Bruxelles, Sonia Masini rappelle néanmoins que la promotion d’un projet est permis par la confiance qui a été mis en lui.

 

Cet instrument inédit mis à la portée des citoyens est  aussi d’une extrême complexité, notamment juridique, et c’est ce qui explique que tant de questions restent posées. Mais finalement, la première interrogation demeure de savoir si les citoyens s’approprieront cet instrument.

 

 

Pour en savoir plus :

 

      -. Discours des différents intervenants : http://www.eesc.europa.eu/?i=portal.en.events-and-activities-european-citizens-initiative-speeches

 

      -. Communiqué de presse relatif à la conférence du 30 mars : http://pr.euractiv.com/press-release/european-citizenship-initiative-cor-and-eesc-stimulate-pan-european-civic-participatio

 

 

      -. Site du Parlement Européen : http://www.europarl.europa.eu/aboutparliament/en/001eb38200/European-citizens%27-initiative.html

 

 

      -. RÈGLEMENT (UE) No 211/2011 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 16 février 2011 relatif à l’initiative citoyenne :

(FR) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2011:065:0001:0022:FR:PDF

 

 

(EN) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2011:065:0001:0022:EN:PDF

 

 

      -. RÈGLEMENT D’EXÉCUTION (UE) No 1179/2011 DE LA COMMISSION du 17 novembre 2011 :

(FR) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2011:301:0003:0009:FR:PDF

 

(EN) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2011:301:0003:0009:EN:PDF

 

 

Mathieu Arnaudet

 (Master, Institut d’études européennes de l’Université libre de Bruxelles)

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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