A la date d’échéance prévue pour la transposition de la directive européenne, seulement 6 États ont transposé la directive sur la lutte contre la traite des êtres humains à la date d’échéance.

Dans le communiqué de presse du 15 avril 2013, la Commission européenne s’est exprimée sur l’entrée en vigueur de la directive de l’UE sur la lutte contre la traite des êtres humains. Même si la date limite pour la transposition était le 6 avril, seulement six États européens (la République tchèque, la Lettonie, la Finlande, la Hongrie, la Pologne et la Suède) l’ont complètement transposée dans leur droit national.

  « La traite des êtres humains est l’esclavage de nos jours, et une violation flagrante des droits de l’homme. Il s’agit d’un crime grave qui touche les femmes, les hommes, les filles et les garçons de toutes nationalités, causant de graves dommages aux vies de ses victimes » – a déclaré Cecilia Malmström.

 Les victimes de la traite des êtres humains sont souvent recrutées, transportées ou hébergées par la force, la contrainte ou la fraude dans des conditions abusives, y compris l’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, la servitude domestique forcée ou des formes moins connues d’exploitation, telles que la mendicité, les activités criminelles forcées ou le prélèvement d’organes.

La traite des êtres humains constitue une violation des droits de l’homme et un crime grave. Les victimes ont souvent à fournir des services sept jours par semaine pour rembourser des montants astronomiques à leurs trafiquants en échange de leur liberté future – ou sont en tout cas amenés à le croire. Les victimes sont souvent privées de leur passeport et ne sont autorisées à sortir que pour le « travail ».

 Le nombre de personnes victimes de la traite vers et depuis l’UE s’est élevé à 23.632 au cours de la période 2008-2010, mais parallèlement, moins de trafiquants finissent derrière les barreaux (les condamnations ayant reculé de 13 % au cours de cette période). Alarmante, telle est la situation décrite dans le rapport d’Eurostat, qui est le premier rapport au niveau européen sur les statistiques concernant la traite des êtres humains et qui couvre les années 2008, 2009, 2010. Les données collectées dans les États membres ont mis en évidence une augmentation progressive de 18 % du nombre de victimes identifiées et présumées sur la période 2008-2010, dont les femmes restent le groupe le plus important (68 %, rapportés, pour 17 % des hommes, 12 % des filles et 3 % des garçons sur le total du nombre des victimes de la traite des êtres humains). En ce qui concerne le but, on peut voir que pour la majorité des victimes (62 %), il s’agit d’une exploitation sexuelle, alors que pour 25 % d’entre elles, il s’agit d’exploitation du travail (y compris le travail et les services forcés, et de servitude domestique). La catégorie « autres » (exploitation à des fins de mendicité forcée, les activités criminelles, le prélèvement d’organes, les mariages forcés et la vente d’enfants, etc.) s’élève à 14 %. Ce rapport met également en évidence que le nombre de victimes de la traite à l’intérieur de l’Union et en provenance de pays tiers s’est accru de 18 % entre 2008 et 2010, et que les victimes de l’exploitation sexuelle sont pour la majorité femmes, tandis que la majorité des victimes de l’exploitation du travail sont des hommes.

Malgré cette situation préoccupante, seuls six États membres de l’Union sur vingt-sept ont, à ce jour, pleinement transposé dans leur droit national la directive européenne concernant la lutte contre la traite des êtres humains (2011/26/EU), dont le délai de transposition a expiré le 6 avril 2013, et trois pays n’ont notifié qu’une transposition partielle de cette directive.

Cette directive, qui met l’accent sur la prévention de la criminalité, sur la protection des victimes, sur la poursuite des trafiquants et sur l’établissement de partenariats, en particulier avec la société civile, prévoit des actions dans différents domaines tels que:

–          Des dispositions de droit pénal, qui comprennent une définition commune du crime, ainsi que les circonstances aggravantes, des peines plus sévères et le principe de non-sanction des victimes d’activités illégales (comme l’utilisation de faux documents) ;

–          En termes de poursuites des coupables, la directive établit, entre autres, la possibilité de poursuivre des ressortissants de l’UE pour les crimes commis dans d’autres pays et d’utiliser des outils d’investigation typiques pour lutter contre la criminalité organisée ;

–          La directive prévoit un traitement spécifique des victimes particulièrement vulnérables, visant à prévenir la victimisation secondaire (pas de contact visuel avec le défendeur, aucune interrogation sur la vie privée, etc.), ainsi que des mesures de protection spéciales pour les enfants ;

–          La coopération entre les services répressifs et les organisations de la société civile, pour fournir aux victimes des abris, l’assistance médicale et psychologique, de l’information et des services d’interprétation ;

–          Les aspects de prévention couvrent les mesures qui découragent la demande favorisant la traite ainsi que la sensibilisation et des formations destinées aux fonctionnaires susceptibles d’entrer en contact avec les victimes ;

–          La surveillance de l’application des mesures prévues par la directive doit être assurée par des rapporteurs nationaux indépendants qui devraient aussi adresser des recommandations aux gouvernements.

Selon la Commission, si la directive était entièrement transposée, elle aurait le potentiel d’avoir un impact réel et concret sur la vie des victimes et d’empêcher que d’autres personnes deviennent victimes de ce crime dévastateur. Afin de soutenir et de compléter la mise en oeuvre de la législation européenne sur la traite des êtres humains, la Commission a adopté l’an dernier une stratégie de l’UE en se focalisant sur des actions concrètes, notamment pour fournir des informations sur les droits des victimes. Cette stratégie (IP/12/619 et MEMO/12/455) prévoit cinq priorités : renforcer l’identification et la protection des victimes, intensifier la prévention de la traite des êtres humains, augmenter la poursuite des trafiquants, améliorer la coordination, la coopération et la cohérence au sein de l’UE avec les organisations internationales et avec les pays tiers, y compris la société civile, et accroître la connaissance en matière de trafic humain.

 En ce qui concerne les droits des victimes (garantis par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par l’acquis communautaire), ils englobent l’assistance et les soins de santé pour les droits des travailleurs, les droits en matière d’accès à la justice et à un avocat, les droits de résidence, ainsi que les possibilités de demander une indemnisation.

 Même si l’on compte un certain nombre d’opérations réussies dans le domaine du démantèlement des réseaux criminels, avec la collaboration d’Europol et d’Eurojust, il sera impossible d’agir davantage contre ce phénomène désagréable si les États ne démontrent pas leur volonté de le combattre plus efficacement à travers la totale transposition de la directive 2011/26/EU.

 

Giovanna De Maio

 

Pour en savoir plus :

 –            Communiqué de presse de la Commission européenne :

(FR) http://europa.eu/rapid/press-release_IP-13-322_fr.htm

(EN) http://europa.eu/rapid/press-release_IP-13-322_en.htm

  –            MEMO de la Commission européenne :

(EN) http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-13-331_en.htm

 –            Rapport statistique d’Eurostat

(EN)        http://ec.europa.eu/dgs/home-affairs/what-is-new/news/news/2013/docs/20130415_thb_stats_report_en.pdf

 –          Les droits des victimes de la traite des êtres humains :

(EN) http://ec.europa.eu/dgs/home-affairs/e-library/multimedia/publications/index_en.htm#08012624899cc746/c_

 

 

                                                                       

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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