Google : une docilité réelle ou apparente ? La balle provisoirement dans le camp des plaignants ! Attente du retour d’informations.

 Google est prêt à d’importantes concessions pour éviter une lourde amende de Bruxelles dans le cadre de l’enquête ouverte en 2010 pour abus de position dominante sur le marché de la publicité en ligne. Le moteur de recherche américain a proposé des remèdes aux services du commissaire européen ­Joaquin Almunia. Ces derniers reprochaient à Google de mettre en avant ses filiales (YouTube, Google Maps?) dans les résultats de recherche. Google s’engage donc à afficher une signalétique claire, pour que les internautes identifient bien ses services, et à afficher trois services concurrents. C’est le scénario qu’a connu en son temps Windows. Bruxelles reprochait au groupe américain d’imposer aux annonceurs des règles d’exclusivité dans l’achat de liens sponsorisés. Google propose aujourd’hui de cesser ce genre de pratique.

Bruxelles (la Commission européenne)reprochait à Google d’utiliser dans ses propres services des contenus appartenant à des tiers sans leur demander l’autorisation. Cela concernait notamment des contenus produits par les médias ou des avis d’internautes. En réponse, Google s’engage à offrir à tous les sites Web la possibilité de refuser l’utilisation de leurs contenus sans pour autant être pénalisés dans les résultats de recherche. De plus, les journaux se verront offrir un mécanisme pour pouvoir contrôler leur contenu dans Google News. Le commissaire européen Joaquin Almunia a intérêt à boucler cette première enquête avant la fin du mandat de la Commission en 2014. Les délais indiqués par la Commission viennent d’atteindre leur terme, l’attente est pressante mais le verdict de la Commission européenne ne doit pas être attendu avant l’automne prochain .

Le géant américain du Net est prêt à prendre ces engagements pour une durée de cinq ans. Bruxelles a ensuite lancé une consultation auprès des concurrents de Google pour savoir si cela les satisfaisait. Car déjà une autre enquête se profile. Début avril 2013, Microsoft, Nokia, Oracle, TripAdvisor ou encore Expedia ont porté plainte à Bruxelles contre le géant américain, l’accusant d’imposer ses propres applications aux fabricants de portables utilisant son système d’exploitation ­Android. (CF. Nea say)

Le moteur de recherche américain s’engage à mettre des solutions en place pour remédier aux accusations d’abus de position dominante sur le marché de la publicité en ligne. La Commission demande un retour d’information sur les engagements proposés par Google pour résoudre ses inquiétudes en matière de concurrence. A cet effet la Commission européenne invite les parties intéressées à présenter leurs observations sur les engagements proposés par Google concernant la recherche en ligne et la publicité contextuelle. La Commission craint que Google n’abuse de sa position dominante sur les marchés de la recherche sur l’internet, de la publicité contextuelle en ligne et de l’intermédiation publicitaire liée aux recherches en ligne dans l’Espace économique européen (EEE). Google a présenté des propositions visant à répondre aux quatre préoccupations exprimées par la Commission en matière de concurrence. Les parties intéressées ont un mois pour faire part de leurs observations. La Commission en tiendra compte dans son analyse des propositions d’engagement de Google. Si elle estime que ces engagements permettent de résoudre les quatre sujets de préoccupation qu’elle a soulevés, la Commission peut décider de les rendre juridiquement obligatoires pour Google. Le débat prend une tournure technique compréhensible par un petit nombre d’experts. C’est pourquoi dans un aide-mémoire la Commission a tenté de clarifié le dossier (CF. infra « Pour en savoir plus ») et d’autre part elle interroge les plaignants et les autres : qu’en pensez-vous ?

En mars 2013, la Commission a formellement informé Google de sa conclusion préliminaire selon laquelle les quatre pratiques commerciales mises en ?oeuvre par Google et décrites ci-dessous pourraient enfreindre les règles antitrust de l’UE qui interdisent l’abus de position dominante (article 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne – TFUE):

 

i) le traitement préférentiel dont bénéficient, parmi les résultats d’une recherche Google sur l’internet, les liens renvoyant vers les services de recherche spécialisés de Google, par rapport aux services spécialisés concurrents (services permettant par exemple aux utilisateurs de rechercher certaines catégories spécifiques d’informations comme des restaurants, des hôtels ou des produits);

 

ii) l’utilisation, par Google, dans ses propres services de recherche spécialisés sur l’internet, du contenu original de sites web appartenant à des tiers, sans leur consentement;

 

iii) l’existence d’accords obligeant les sites web de tiers («éditeurs») à obtenir la totalité ou la majorité de leurs annonces publicitaires contextuelles en ligne de Google; et

 

 

 

iv) les restrictions contractuelles relatives à la portabilité des campagnes de publicité contextuelle en ligne vers les plateformes publicitaires de moteurs de recherche concurrents et à la gestion de ces campagnes à la fois sur la plateforme Adwords de Google et sur les plateformes concurrentes.

 

À ce stade, la Commission estime que ces pratiques pourraient porter préjudice aux consommateurs en diminuant le choix disponible et en étouffant l’innovation dans les domaines des services de recherche spécialisés et de la publicité contextuelle en ligne.

 

Les propositions de Google. Pour répondre à ces préoccupations, Google propose, pendant une période de cinq ans:

i) – de labelliser les liens vers ses propres services de recherche spécialisés faisant l’objet d’un traitement préférentiel afin que les utilisateurs puissent les distinguer des autres résultats de recherche naturels,

            – de séparer clairement ces liens faisant l’objet d’un traitement préférentiel des autres résultats de recherche en ligne par un graphisme clair (un cadre par exemple) et

            – d’afficher des liens vers trois services de recherche spécialisés concurrents à proximité de ses propres services, à un endroit clairement visible pour les utilisateurs,

ii) – d’offrir à tous les sites web la possibilité de refuser l’utilisation de tout leur contenu dans les services de recherche spécialisés de Google, tout en garantissant que ce refus n’affectera pas indûment le classement de ces sites parmi les résultats des recherches générales de Google sur l’internet,

            – d’offrir à tous les sites de recherche spécialisée qui sont axés sur la recherche de produits ou sur les recherches locales la possibilité de marquer certaines catégories d’information de façon à empêcher que ces informations ne soient indexées ou utilisées par Google,

            – de fournir aux éditeurs de journaux un mécanisme leur permettant de contrôler l’affichage de leur contenu dans Google News, page web après page web,

iii) de cesser d’insérer dans ses accords avec les éditeurs toute obligation écrite ou non écrite qui exigerait d’eux qu’ils se procurent leurs publicités contextuelles en ligne exclusivement auprès de Google, et

iv) de ne plus imposer d’obligations empêchant les annonceurs de gérer les campagnes publicitaires contextuelles sur différentes plateformes publicitaires concurrentes.

Ces engagements couvriraient l’Espace économique européen (EEE).Les propositions prévoient aussi qu’un mandataire indépendant chargé du suivi assistera la Commission dans son contrôle de la bonne exécution des engagements. Des détails supplémentaires sur les engagements proposés peuvent être trouvés dans la note d’accompagnement (MEMO/13/383) Cf.; infra « Pour en savoir plus). Un résumé est  publié au Journal officiel de l’UE.

 

Et maintenant ? Décision après les vacances d’été, au plus tôt

Les parties intéressées avaient  un mois pour faire part de leurs observations. Si la Commission estime que ces engagements sont suffisants, elle pourra les rendre contraignants pour Google. Dans le cas contraire, elle pourrait lui infliger une amende allant jusqu’à 10% de son chiffre d’affaire annuel mondial. Le commissaire européen chargé de la Concurrence, Joaquin Almunia, a fait part à plusieurs reprises ces derniers mois de sa préférence pour une solution passant par un accord avec Google. Rappelons que son porte-parole, Antoine Colombani, a déclaré il y a plusieurs semaines que la Commission rendrait sa décision « après les vacances d’été dans le meilleur des cas ». Interrogé par l’AFP, un porte-parole de Google à Bruxelles s’est refusé à tout commentaire, indiquant seulement que le groupe continuait de « coopérer avec la Commission ».Quant aux  plaignants, ils demandent plus de temps. Les plaignants et concurrents de Google, parmi lesquels Microsoft, mais aussi les sites de voyages Expedia et Tripadvisor, ou les sites de comparateurs de prix Twenga et Foundem, regroupés dans les organisations FairSearch et Icomp (cf. Nea say), ont réagi en réclamant plus de temps que le mois qui leur a été accordé pour apporter leur analyse, soulignant que « Google a mis un an pour préparer les propositions publiées aujourd’hui ». Après une rapide étude de ces propositions, FairSearch a d’ores et déjà jugé jeudi que les engagements de Google « ne mettaient pas fin au traitement préférentiel (de ses propres produits), qui faisait l’objet de la plainte de 17 entreprises ». « Le fait de labelliser les résultats ne va rien faire ou presque pour empêcher Google de manipuler les résultats de recherche et de pratiquer la discrimination vis-à-vis des services concurrents », a réagi de son côté l’organisation européenne de défense des consommateurs Beuc. (Cf. infra « Pour en savoir plus »)

Rappelons que Google, qui contrôle environ 70% de la recherche en ligne aux Etats-Unis et plus de 90% dans l’Espace économique européen, avait été blanchi début janvier par la justice américaine dans un dossier d’entrave à la concurrence très similaire à celui instruit par la Commission européenne, moyennant des engagements de bonne conduite.

 

 Pour en savoir plus :

      – . Texte complet des engagements de GOOGLE http://ec.europa.eu/competition/elojade/isef/case_details.cfm?proc_code=1_39740

      -. Aide Mémoire de la Commission (EN) http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-13-383_en.htm

      -. Dossier Google de Nea say http://www.eu-logos.org/eu-logos-nea-recherche.php?q=google&Submit=%3E

      -. Réactions du Beuc (Organisation européenne des unions de consommateurs) http://www.beuc.org/BEUCNoFrame/Docs/1/FMCDGIFDHLPKICKKDBONFEGMPDW69DBYCD9DW3571KM/BEUC/docs/DLS/2013-00280-01-E.pdf

      -. Publication au Journal officiel de l’Union européenne de la communication de la Commission européenne concernant Google(FR) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2013:120:0022:0024:FR:PDF (EN) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2013:120:0022:0024:EN:PDF

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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