Visas, obligation ou exemption pour les pays tiers : quand l’exemption de visa s’étend et les listes de pays tiers s’étoffent.

La réunion de la Commission LIBE du 27 juin a porté, entre autres, sur la COM(2012)0650 à propos de « la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des Etats membres et liste de ceux sont les ressortissants sont exemptés de cette obligation ». En effet, ce texte porte sur une proposition de Règlement du parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n°539/2001.

             La Rapporteur Mariya Gabriel (PPE) a ouvert la discussion avec un bref résumé de la situation après s’être félicitée du dialogue constructif animant le sujet. Elle rappelle donc les deux listes existantes : la liste négative (pays tiers soumis à une obligation de visa) et liste positive (pays tiers exemptés de l’obligation de visa). L’appartenance à une liste ou l’autre est déterminée par une évaluation pondérée par six éléments : immigration clandestine, ordre public, sécurité, relations extérieures, cohérence régionale et la réciprocité. Ces critères sont amenés à évoluer. Selon la Rapporteur, il faut revoir la composition de la liste. Elle apporte son soutien à la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil qui comprend deux éléments majeurs :

–          1. Le transfert de pays tiers de la liste négative à la liste positive

– pour les Etats insulaires des Caraïbes : Dominique, Grenade, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines ou de Trinité-et-Tobago

– pour les Etats insulaires du Pacifique : Kiribati, les îles Marshall, la Micronésie, Nauru, les Palaos, les Iles Salomon, le Samoa, le Timor-Oriental, les Tonga, les Tuvalu, le Vanuatu.

-pour des catégories spécifiques de ressortissants britanniques (la plupart résidant dans des îles de la région des Caraïbes).

Par rapport à ce transfert, la Rapporteur insiste sur le principe de réciprocité qui devra être assuré. Selon elle également, il n’est absolument plus justifié de laisser ces catégories de ressortissants soumis à une obligation de visa alors qu’ils ne présentent plus aucun risque. De même, si dans la proposition « une attention particulière à la sécurité des documents de voyage délivrés par les pays tiers concernés » doit être donnée, la rapporteur affirme que posséder des passeports biométriques ne doit pas être une exigence dans le sens où ces pays ont déjà des passeports avec un niveau de sécurité élevé et que le basculement vers des passeports biométriques est envisagé.

–          2. La mise à jour de la liste négative et l’inclusion du Soudan du Sud indépendant depuis le 9 juillet 2011.

 Au vu de ces propositions, la rapporteur Mariya Gabriel (PPE) établit un certain nombre de recommandations : d’abord, elle insiste sur la volonté du parlement européen d’être impliqué et informé par la Commission et les Etats des accords bilatéraux et en ce sens de respecter le droit d’information. Elle préconise une information régulière, qui serait au moins établie tous les six mois. Elle invite également la Commission à une modification du règlement via une inclusion des critères de l’appartenance à une certaine liste dans un article plutôt que dans le préambule en vue notamment d’une approche plus détaillée. Enfin, elle propose une mise à jour des annexes (qui comprennent les listes) via l’introduction d’actes délégués.

 Louis Michel (ALDE), rapporteur fictif dans ce dossier étant absent, Sophie in’t Veld a transmis son analyse de la proposition de règlement. Il est lui aussi très favorable à la proposition de la Commission et invite à reconnaître de façon plus souple la sécurité existante dans les pays d’origine. Ainsi, en plus de se détourner d’un climat de méfiance mutuelle, cela aurait un réel impact économique : des exemptions de visas signifient plus de touristes car une baisse des coûts et des formalités pour ces derniers. De même, les paroles de Louis Michel penchent également vers une exemption de visa pour les membres élus et les représentants des pays ACP notamment dans les milieux d’affaires. Lors du Conseil des ministres ACP/UE il aurait été étudié les possibilités quant à une optimisation du code visa vers une réciprocité concernant notamment des visas à entrées multiples de longue durée pour les représentants. Cela constituerait une solution transitoire dans l’attente d’une suppression définitive des visas. Ainsi, Louis Michel termine en évoquant les démarches des autorités belges allant déjà en ce sens. Ces démarches se basent sur une approche presque schématique : chaque pays Caraïbes/Pacifique rédigerait une liste avec les membres qui sont des représentants permanents, puis les secrétaires Caraïbes/Pacifique transmettraient cette liste à la Commission qui elle même ferait le lien avec les autorités belges, celles-ci remontant en dernier lieu l’information aux consulats dans les pays concernés. Le tout, en vue d’une procédure accélérée. A l’heure actuelle, la Commission envoie dès que possible une liste avec les dates des réunions avec les pays Caraïbes-Pacifique de façon à ce que les personnes soient connues des autorités belges et que les procédures soient plus rapides. Deux bémols : la réciprocité doit être assurée et les demandes de visa ne doivent pas, comme cela est souvent le cas être présentées en dernière minute.

 Ensuite, c’est vers l’avis de la Commission que les débats se sont poursuivis : celle-ci se réjouit de l’accueil favorable du Parlement européen de la proposition de la Commission. Cependant, les recommandations évoquées méritent d’y accorder plus d’attentions. Ainsi, concernant la demande par le Parlement européen d’une information régulière, la Commission, tout en soulignant l’absence de rôle juridique du Parlement européen, s’est empressée d’accorder cette garantie au Parlement. Ensuite, concernant l’inclusion dans un article des différents critères plutôt que dans le préambule, la Commission trouve cette proposition intéressante, cependant le préambule n’a pas été choisit par hasard : celui-ci permet d’être plus large et donc de laisser une plus grande marge de manoeuvre à la Commission afin de voir si le pays est réellement prêt ou non. Quant à la recommandation concernant l’élaboration d’acte délégués pour l’évolution des listes, le traité ne permet pas selon la Commission à des actes délégués de changer un règlement aussi fondamental que le règlement n°539/2001 du Conseil. De plus, le parlement européen n’a rien à y gagner, ayant plus de pouvoirs dans le cadre de la codécision que pour la mise en place de tels actes.

 Enfin, l’avis du Conseil a été demandé. Le Conseil s’est opposé à la recommandation concernant les actes délégués jugés « ni appropriés ni nécessaires » mais pour le reste se sont montrés très favorables aux différentes recommandations du Parlement européen, le tout dans l’objectif de « boucler le dossier rapidement ». La majorité du Conseil s’est prononcée également vers le passage des Emirats Arabes Unis de l’Annexe 1 à l’Annexe 2 (exemption de l’obligation de visa) et demande donc en ce sens l’avis du Parlement européen sur la question. Enfin, l’accent est mis sur la collaboration fructueuse entre le Rapporteur et la présidence irlandaise sur ce dossier.

 

Pour conclure, Mariya Gabriel affirme avoir bien pris en compte la demande du Conseil concernant les Emirats Arabes Unis tout en soulignant son introduction tardive. Elle se prononce donc en faveur d’une discussion à ce sujet avant de se prononcer sur la question. Le délai pour le dépôt des amendements est de toute façon fixée au 11 juillet. On peut néanmoins observer que les débats semblent arriver à leur terme et qu’une vision assez consensuelle sort de l’ensemble des discussions.

 

 Louise Ringuet

 

Pour en savoir plus 

–            COM(2012)650 final, Proposition de règlement du Parlement  et du Conseil modifiant le règlement (CE) n°539/2001 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des Etats membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation :

            http://www.ipex.eu/IPEXL-WEB/dossier/document/COM20120650.do

 –            Règlement (CE) n° 539/2001 du Conseil fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des Etats membres et la liste de ceux sont les ressortissants sont exemptés de cette obligation :

http://eurlex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.douri=OJ:L:2001:081:0001:0007:FR:PDF

 

 

 

 

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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