La peine de mort: un problème de l’Europe

Le 28 avril, huit prisonniers ont été fusillées par les autorités indonésiennes qui les avaient condamnés pour trafic de drogue. Sauf Zainal Abidin, les autres condamnés à mort n’étaient pas indonésiens, trois d’entre eux étaient nigérians, deux australiens, et un du Ghana et du Brésil. Les prisonniers ont été exécutés sur l’île de Nusakambangan ( vallée de la mort ) malgré les pressions de la communauté internationale qui sont restées ignorées par le président Joko Widodo. Les prisonniers ont été autorisés à choisir d’avoir les yeux bandés ou pas, ou d’être assis ou à genoux. Puis, chacun a eu trois minutes pour prier et enfin un médecin a mis une croix noire sur la poitrine de chaque condamné. Ensuite, ils ont été fusillés par un peloton d’exécution composé de douze hommes.

L’Australie avait mis en œuvre une vigoureuse campagne pour sauver ses deux compatriotes qui étaient dans le couloir de la mort depuis près d’une décennie. Le ministre des Affaires étrangères, Julie Bishop, avait demandé une attente de suspension dans l’attente de l’issue d’une enquête de corruption sur les deux juges qui présidaient le cas. Mais le président Joko Widodo a rejeté la demande. Après la sentence de mort, l’Australie a rappelé son ambassadeur en Indonésie et, en fait, le premier ministre, Tony Abbott, a déclaré que les relations entre Australie et l’Indonésie sont très importantes mais suite à l’exécution elles ont souffert et souffriront. L’Australie n’avait jamais pris une telle mesure quand un de ses ressortissants était mis à mort par un pays étranger, et n’avais jamais retiré son ambassadeur en Indonésie.

Actuellement, un citoyen français, Serge Atlaoui, risque également la peine de mort en Indonésie. Il a été incarcéré depuis dix ans et il affirme qu’il n’a fait qu’installer des machines industrielles dans ce qu’il croyait être une usine d’acrylique, et qui abritait en réalité une fabrique clandestine d’ectasy. Après que la Cour suprême indonésienne ait rejeté sa demande finale de clémence, la diplomatie française est intervenu avec force en soulignant que l’exécution serait « préjudiciable aux relations bilatérales » et dénonçant « de graves lacunes dans le système de justice indonésienne » au cours du processus. Selon François Hollande cette exécution « serait dommageable pour l’Indonésie, dommageable pour les relations que nous voulons avoir avec elle ».La mise à mort est pour l’instant repoussée dans l’attente d’un complément d’enquête.

L’Union Européenne a vivement réagi aprés la décision du president Joko Widodo, elle est totalement opposée à la peine de mort. « Nous reconnaissons que l’Indonésie doit affronter un problème de drogue, mais l’expérience dans d’autres pays montre que la peine capitale n’est pas la bonne réponse » a dit Federica Mogherini, chef de la diplomatie européenne en ajoutant « l’UE est prête à réfléchir aux moyens de soutenir les efforts de l’Indonésie dans la lutte contre la drogue ».

Mais la peine capitale n’est pas seulement un problème de l’Indonésie, en fait, Amnesty International rapporte que 58 Etats appliquent encore la peine de mort dans leur législation, alors que 139 ne l’appliquent pas, en droit ou dans la pratique. Selon l’ONG, les exécutions ont baissé du 22% entre 2013 et 2014. L’Iran est le pays qui exécute le plus, 1972 condamné entre 2009 et 2014, 289 dans le 2014. Ensuite se place l’Irak, l’Arabie Saoudite et les Etats-Unis. Pays comme la Chine et la Corée du Nord considèrent la peine capitale comme un secret d’Etat mais, selon les estimations, ce sont les pays qui exécutent le plus.

Pour appartenir à l’Union Européenne, une des questions requises est l’interdiction de la peine de mort dans la législation des Etats. Mais, le 28 avril, le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, a affirmé que « la question de la peine de mort doit être remise à l’ordre du jour en Hongrie », selon Orban les sanctions existantes pour des crimes graves comme le meurtre sont « trop faibles ».

Le 30 avril le président de la Commission Jean-Claude Junker a déclaré  » nous n’avons pas besoin de discuter des choses évidentes. La Charte des droits fondamentaux de l’UE l’interdit et M.Orban devrait immédiatement clarifier sa position en indiquant que la Hongrie n’a pas l’intention d’appliquer la peine de mort. Si c’est son intention, alors il y aura une bataille ». Une porte-parole de la Commission a laissé entendre que la Hongrie risque de perdre son droit de vote.

Quelques heures la déclaration de Viktor Orban, le chef du personnel du premier ministre Orbán, Janos Lazar, a déclaré que Budapest « n’a pas de plans » pour mettre en vigueur les condamnations à mort. Dans un appel téléphonique avec le président du Parlement européen, Martin Schulz, Janos Lazar a indiqué, qu’Orban a expliqué que «il y a un débat en Hongrie sur la peine de mort », mais il a n’a pas l’intention de l’introduire dans le pays ». Pourtant quelques jours plus tard, début mai, il récidivait dans ses déclarations. La question de fond reste entière et sans réponse.

La lecture des articles de Nea say sur la peine de mort montre combien l’UE est un acteur militant particulièrement actif pour sa suppression. La marche vers sa suppression semble irréversible mais il y a encore beaucoup de travail : le cas indonésien comme celui de Viktor Orban en sont la preuve éclatante. L’UE concentre ses attaques sur les Etats-Unis, car elle sait que si ce verrou saute, l’abolition sera alors proche et nombre de pays pratiquant la peine de mort font observer que l’UE serait plus convaincante si elle arrivait à convaincre les Etats-Unis

Chiara Rossi

Pour en savoir plus :

 Dossier peine de mort de Nea say http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?idr=4&idnl=3500&nea=156&lang=fra&arch=0&term=0

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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