Libye : le retour ?

De combien de points d’interrogation aurions-nous dû compléter le titre, beaucoup de questions et pas même l’esquisse d’une réponse. Quel avenir pour la Libye ? Faut-il sanctionner les fauteurs de troubles ? Lesquels et comment ? Une intervention militaire en Libye est-elle utile, nécessaire, envisageable, possible et faisable, comment, à quel prix ? En un mot comment les européens peuvent-ils agir et pour quels objectifs.

La réponse nous ne la trouvons pas dans la réunion des chefs d’Etat et de gouvernement du 18 mars. Certes ils ont rappelé être prêts à soutenir le gouvernement d’entente national libyen,  » en tant que l’unique gouvernement légitime de la Libye  » et empêcher qu’une nouvelle route migratoire s’ouvre vers l’Europe.

Ainsi, à la demande de ce gouvernement, qui à l’heure où nous écrivons n’a toujours pas reçu l’approbation du Parlement libyen, l’UE et ses Etats membres sont prêts à l’aider à restaurer la stabilité dans le pays à combattre le terrorisme et à gérer la migration dans la Méditerranée centrale. « Il faut empêcher que se développent les routes alternatives de la Libye vers l’Italie «  a souligné Angela Merkel. De son côté dans une lettre adressée le 12 mars aux ministres européens des Affaires étrangères, la Haute représentante, Federica Mogherini, a estimé qu’il y avait plus de « 450 000 personnes déplacées et réfugiées à l’intérieur de la Libye, lesquelles pourraient être des candidats potentiels pour la migration en Europe« . De son côté Jean-Yves Le Drian, ministre français de la défense les estime autour de 800 000 à 900 000 mille.

En marge du Conseil européen, Federica Mogherini, François Hollande, Angela Merkel, les ministres italiens, espagnols, britanniques et maltais ont discuté ensemble de l’aide que l’UE pourrait apporte à la Libye. Il s’agirait de fournir des formations aux garde-côtes , à la police, assurer un soutien aux municipalités ou encore faire passer l’opération navale de l’UE en Méditerranée (EUNAVFOR MED SOPHIA) à la phase suivante de son mandat pour qu’elle mène des opérations dans les eaux territoriales libyennes . Cette opération  » ne peut pour le moment se faire que dans les eaux internationales. Or pour que cela soit efficace, il faut être au plus près des côtes. Cela suppose que le gouvernement libyen puisse autoriser l’opération et puisse éviter, qu’il y ait des mouvements contre les embarcations  » a déclaré François Hollande. Le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi a également estimé que ce  » serait une erreur d’intervenir sur le plan militaire sans requête explicite  » de la part du gouvernement libyen légitime. La boucle est bouclée, le cercle vicieux est installé. Attendons le 18 avril et 19 quand se réuniront les Ministres des Affaires étrangères et de la Défense. Faudra-t-il attendre jusqu’à ce qu’un gouvernement libyen prenne le relai ? Jusqu’à ce que ce  » cimetière insatiable  » (Pape François) de la Méditerranée et de la Mer Egée cesse d’enterrer les morts ? Or personne n’accepte de rendre le pouvoir, fut-il un pouvoir illusoire, un pouvoir en miettes se fragmentant à l’infini où on voit, par exemple, les partisans d’un même camp s’opposer entre ceux qui soutiennent l’accord des Nations Unies et ceux qui s’y opposent !

Fragmentée, gangrénée par l’Etat islamique et d’autres groupes extrémistes, traversée par un flot croissant de migrants, touchée par l’inflation la Libye n’en finit pas depuis l’été 2014 de s’empêtrer dans ses problèmes. La Libye a aujourd’hui trois gouvernements : celui de Tripoli composé d’islamistes et de personnes se présentant comme les garants de la « révolution » de 2011. Celui de Beida (est du pays) lié à la Chambre des représentants de Tobrouk , regroupant modérés et anciens khadafistes, et le Gouvernement d’union nationale fruit des négociations menées par l’ONU, en exil qui navigue, difficilement,  entre le Maroc et la Tunisie. Trois gouvernements, donc, mais très peu de pouvoir sur le terrain. Les salaires des fonctionnaires ne sont pas versés régulièrement, les hôpitaux manquent de personnel, de médicaments, les enlèvements de personnes s’enchaînent, les affrontements armés également et la hausse des prix font souffrir toutes les populations.

Et pendant ce temps, surfant sur de chaos, l’Organisation islamique a très fortement progressée depuis son arrivée en Libye à l’automne 2014. Aujourd’hui ils seraient 5000 dans leur base principale de Syrte sur la côte méditerranéenne à 550 kilomètres des côtes européennes.

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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