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Missions locales : un outil local pour des actions régionales

Lancée en 1991, la Mission Locale pour l’Emploi de Saint-Josse (Bruxelles) a fêté son 25ème anniversaire. A cette occasion, l’ensemble des acteurs (autorités locales, partenaires, bénéficiaires et membres de l’équipe) étaient réunis pour célébrer l’action menée ces 25 dernières années en matière d’emploi et d’insertion socio professionnelle. Cet évènement était aussi l’occasion de débattre, dresser un bilan et se tourner vers l’avenir.

Ces initiatives développées au niveau local, accessible directement par les citoyens et soutenues par l’UE, montre que l’Union est présente et s’intéresse aux réalités locales des citoyens européens. Cela rappelle également que bien qu’elle soit qualifiée d’organisation supranationale détachée des réalités quotidiennes, l’UE est en fait active au niveau local et contribue à la réalisation de projet touchant directement les citoyens.

Au cours de tables rondes réunissant politiques et acteurs de terrains, il a été question de l’impact que peut avoir des dispositifs telle que la mission de Saint Josse pour l’emploi présente au niveau local sur les politiques de l’emploi au niveau régional. Le bourgmestre de Saint Josse a en effet lors de l’événement réitéré l’important rôle de la Mission Locale dans l’amélioration de la qualité de vie du quartier et l’a qualifié d’outil indispensable dans la politique de proximité. Ces types de projets sont en effet cruciaux pour le bien être des collectivités.

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Les missions locales ont émergé à Bruxelles dans les années 1990, soutenues par la région Bruxelles-Capital en tant que mission à la fois associative, communale et régionale.
Philippe Boiketé, un acteur de terrain de la mission de Saint-Josse a rappelé les bienfaits de ces missions, qui par leurs caractères locaux, permettent la prise en compte de caractéristiques spécifiques d’un territoire. Dans ce sens, les projets développés localement permettent une plus grande adaptation aux réalités du terrain, ainsi répondant précisément aux besoins des bénéficiaires concernés. Ces types de missions ont plusieurs rôles : un rôle accompagnateur pour les bénéficiaires, souvent des personnes dites « hors radar » ; un rôle de thermomètre, permettant d’évaluer ce qui se passe sur le terrain et de le relayer aux politiques ; un rôle de coordinateur ; et un rôle de développeur de projet.

Les Missions Locales de la ville de Bruxelles se sont développées dans le but de répondre et lutter contre la précarisation massive du marché du travail et l’émergence du chômage de masse dans les années 1990. La Mission Locale de Saint-Josse a accompagné plus de 52 000 personnes à la recherche d’emploi ou de formation, avec une attention tout particulière aux personnes dites « hors radar », c’est à dire les chômeurs de longue durée et victime de discrimination. Les femmes, les personnes d’origine étrangère, les handicapés, les jeunes sans diplôme de Saint-Josse ont pu être accompagné dans leur recherche d’emploi. La Mission leur a permis de suivre des formations et ateliers « de recherche active d’emploi », de rencontrer des conseillers, ainsi que décrocher des contrats d’insertion. La Mission a en effet organisé 26 formations, proposé 169 sessions de formations à ses bénéficiaires. Ces sessions proposent notamment des formations de gardiens de parc, de chauffeurs-livreurs, de chocolatiers, agents de sécurité, aides ménagères et agents d’entretien, vendeurs, fontaniers, auxiliaires de l’enfance, ainsi que des initiations informatiques. Au delà des formations, 423 personnes ont bénéficié du Service de Travaux d’Intérêt Collectif (STIC) et 1700 personnes ont obtenu des stages.

La Mission Locale contribue donc à la réduction du taux de chômage de la collectivité et les accompagne sur le chemin de l’emploi. La finalité ne doit pas être la mission à l’emploi mais doit contribuer plus largement à l’accompagnement des demandeurs lors de leur démarche.

Les Missions Locales portent de plus une attention toute particulière à l’insertion des personnes « d’origines étrangères ». La question de l’emploi est de plus en plus présente dans le débat de la migration et de l’asile. La Mission Locale de Saint Josse soutient notamment le « Forum pour la Diversité », qui accueille des personnes d’origine étrangère en grande difficulté et exclus par les structures institutionnelles. Afin d’améliorer la situation de ces personnes, la Mission Locale permet l’alphabétisation par le travail depuis 2010 à Saint Josse.

Béa Diallo, échevin de la Mission Locale d’Ixelles à également fait part des constats et des difficultés rencontrées par les Mission Locales Bruxelloise. Il a noté l’amélioration de la proximité entre demandeurs d’emploi locaux avec les entreprises locales. Ce rapprochement a permis aux demandeurs d’emploi de trouver un stage ou un emploi, ainsi que le développement de formation en entreprise. Cette dynamique de partenariat avec le tissu économique local a diversifié les acteurs participants au projet et a également contribué à toucher et à aller chercher les jeunes en décrochage.

Après constat que de plus en plus de personnes, notamment les jeunes en décrochage (en nombre croissant) n’osaient pas pousser les portes de la maison de l’emploi, La Mission Locale de Saint-Josse a fait preuve d’innovation en développant un projet de guichet mobile de promotion de l’emploi, « Ça roule pour l’emploi ! ».

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Ce guichet mobile pour l’emploi, sillonne les rues de Saint-Josse afin d’encourager les jeunes demandeurs d’emploi peu qualifiés de 18 à 30 ans du quartier à se faire aider par la Mission Locale et de les intégrer dans le circuit de l’accompagnement de l’emploi. 1700 jeunes de Saint Josse ont en effet été touchés par ce guichet mobile depuis son lancement en 2013. Le guichet va à la rencontre des jeunes du quartier afin de les accueillir, les informer et les orienter dans leur recherche d’emploi ou vers une formation an adéquation avec leurs parcours ou aspirations. Ce projet facilite la rencontre avec les jeunes et permet une identification et un suivi personnalisé des potentiels bénéficiaires, ainsi ne laissant personne hors du système social.
Il a également pour but de faire face à la montée du chômage grandissant chez les jeunes en Belgique. Selon l’OCDE, le taux de chômage de cette population a augmenté de 18.8% à 23.5% entre 2008 et 2010 et le taux de chômage des jeunes dans la Région bruxelloise atteint 32%. En effet, le taux de chômage auprès des jeunes de Saint-Josse est actuellement de 37.9%, contre 19.8% dans la commune de Woluwé Saint-Pierre. Le projet a également été développé afin d’accompagner plus particulièrement les jeunes issus de l’immigration, nombreux à Saint-Josse, qui subissent un phénomène de discrimination à l’embauche.

Les financements des Missions Locales extérieurs à la commune se font sur projets, comme par l’exemple très positif du module de formation « Au Top pour un Job » lancé par la Mission Locale d’Ixelles. Ce projet permet l’insertion socio-professionnelle des jeunes entre 18 et 25 ans. Ce programme est financé à 50% par l’Union Européenne et notamment le Fonds social européen (FSE), qui soutient de nombreux projet liés à l’emploi des moins de 30 ans au sein de l’UE.

Partant de la conclusion que le décrochage scolaire est lié à l’exclusion sociale, le principe du programme est de mêler coaching sportif et job coaching. Se déroulant sur six semaines, le programme s’articule autour d’ateliers et cours sportifs le matin et de sessions sur l’emploi l’après-midi au cours desquels les jeunes explorent les différents métiers possibles, rencontrent des professionnels, effectuent des simulations d’entretiens, rédigent leur Curriculum Vitae. A la suite de cette formation, le jeune entre en stage en entreprise pour une période d’un mois. L’objectif du programme est de « dynamiser les jeunes, de les aider à se prendre en main et à s’insérer dans la vie sociale et professionnelle ».

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Depuis sa création, le programme affiche un taux de réussite de 80%, et un taux de décrochage de 0%. Béa Diallo, responsable du programme et champion du monde de boxe, soutient que la pratique du sport a un impact important sur l’insertion professionnelle des jeunes. Au delà de transmettre aux jeunes bénéficiaires du programme des valeurs de respect des règles, de rigueur et de persévérance, la pratique du sport est un moyen pour ces jeunes de retrouver leur confiance et de se donner l’envie de se dépasser. Comme indiqué par les organisateurs du programme, « les ateliers visent à permettre aux participants de s’approprier les valeurs éducatives et sociales du sport et à les transférer dans le domaine de la recherche d’emploi. ».

Les Missions Locales pour l’Emploi comme celle de Saint Josse et des projets comme « Au Top pour un Job » ont donc permis une meilleure intégration des demandeurs d’emploi dit « hors radar » et les laissés pour compte tels que les jeunes en décrochages, les personnes d’origine étrangère en grande difficulté, mais également les femmes et les handicapés. En outre, ces Missions luttent contres les discriminations et contribuent à un renforcement du tissu local entre demandeurs et entreprises. Malgré les bienfaits de ce type de projets et missions, celles-ci font face à de nombreuses difficultés.

La Mission Locale de Saint-Josse, à l’image de projets similaires fait cependant face à de nombreux problèmes et contraintes : le manque critique de financement et la surcharge administrative. Les membres de l’équipe de la Mission Locale ont en effet tous souligné l’inadéquation entre le manque de financement reçu et l’augmentation du nombre de demandeurs d’emploi envoyé par Actiris, ayant un impacte négatif sur leur travail. Ils ont exprimé le besoin de plus de reconnaissance et de crédibilité, afin d’élargir leurs sources de financement et de développer des projets sur le long terme.

En matière de financement, les acteurs de la Mission Locale de Saint Josse ont également fait part de leur difficulté face au complexe administratif imposé par des organismes tel que le FSE. Leur recours aux fonds communautaires est en effet limité pour les Missions Locales, car ces sources de financements imposent des contraintes administratives lourdes, demandent un grand nombre de documents et les financements arrivent souvent très en retard. Les membres des équipes des Missions Locales de Bruxelles ont de ce fait appelé à une réduction des temps d’attente et de la surcharge administrative qui accompagnent les demandes de financements par des fonds européens. Alors que l’UE contribue de manière significative, les missions locales ont donc besoin de moyens plus larges afin de donner la possibilité aux acteurs de terrain de continuer et d’améliorer leur engagement sociétal.

Ce type d’initiative rappelle que malgré les critiques, l’UE n’est pas aussi distante et désintéressée de ses citoyens que nombreux se prêtent à le dire. Elle permet et contribue à la réalisation de projets concrets sur le terrain qui touchent les citoyens directement, influe sur le tissu social et la qualité de la vie des communes.

Kim Chardon

Pour en savoir plus :
« Ca roule pour l’emploi ! », URL : http://www.stjoost.irisnet.be/index.php?id=10367; http://www.stjosse.irisnet.be/pdf/divers/fiche-projet-312-guichet-mobile.pdf;
https://www.youtube.com/watch?v=RpIXC4vmdN0

« Forum pour la Diversité » , URL : http://www.cbai.be/news/774/0/

« Au Top pour un Job », URL : http://emergencexl.com/Relaxation-43?lang=fr

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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