Roms : les conclusions de la Commission européenne sont tombées. La France n’est pas condamnée, elle n’est pas sortie d’affaire, loin delà. A l’avenir, l’important c’est la bonne intégration économique sociale et humaine des ROMS, rendez-vous le printemps prochain pour faire le point.

Ni apaisement, ni indulgence, mais la simple application des procédures et le respect des usages habituels tels qu’ils ont été pratiqués des milliers de fois. A peine un sursis tant les délais sont courts pour que la France apporte les preuves concrètes sinon de sa bonne fois, du moins de sa bonne volonté. Ce n’est pas un jugement politique, mais l’aboutissement provisoire d’un dossier juridique présenté avec clarté et adopté à l’unanimité par la Commission. Si les commentateurs ont fait le silence sur le second volet du dossier, l’intégration des Roms, la Commission  lui a donné la place qu’il méritait, c’est-à-dire la première.

La Commission a présenté immédiatement ses conclusions au Parlement européen qui lui a apporté son soutien quasi unanime malgré quelques voix discordantes, inévitablement dans un Parlement comprenant 38 députés identifiés comme d’extrême droite en raison de leur parti d’origine. La mobilisation des fonds, leur bon usage, l’échange de bonnes pratiques occuperont désormais la première place de l’actualité. Mme Reding a ouvert la boîte de Pandore du dossier de la libre circulation. Il lui était difficile de faire autrement. Plusieurs pays seront impliqués. L’alliance Parlement /Commission s’est resserrée : un bloc difficile à contourner ou à effriter. C’est la nouvelle donne du fonctionnement des institutions. C’est la première fois qu’on débat avec autant d’ampleur et de résonnance dans l’opinion publique des droits fondamentaux, des valeurs et des grands principes. Que cette ardeur demeure au-delà de l’enthousiasme médiatique du moment ! La preuve est donnée que l’Europe peut intéresser, passionner même.

Le scénario s’est déroulé de façon prévisible et conventionnelle ainsi qu’il avait été décrit il y a quelques jours dans Nea Say.

Bruxelles a décidé mercredi d’ouvrir la première phase d’une procédure d’infraction (mise en demeure) contre Paris pour non transposition en droit national de la directive sur la libre circulation des citoyens de l’UE à l’intérieur de l’Union européenne, mais n’a pas convenu à ce stade de poursuites pour discrimination. Sur cet aspect, la Commission demande des informations complémentaires à la France, qui a aussitôt salué sa décision et s’est engagée à transmettre les précisions demandées.

Selon la commissaire européenne à la Justice Viviane Reding, Paris « n’a pas transposé en droit français les garanties procédurales » introduites par la directive concernant la libre circulation des citoyens de l’UE. « La France n’a pas appliqué le droit européen comme il se devrait et donc nous avons décidé de lancer une procédure d’infraction contre la France », a-t-elle expliqué  à la presse et aux députés européens. « A ce stade, la Commission considère que la France n’a pas transposé la directive (…) de manière à rendre (les) droits » des personnes « complètement efficaces et transparents », souligne Bruxelles dans un communiqué officiel. Cette procédure ne pourrait toutefois être lancée que le mois prochain: la Commission a en effet décidé « qu’elle enverra une lettre de mise en demeure à la France en demandant la transposition complète de la directive » si « un projet de mesure de transposition ainsi qu’un calendrier précis pour son adoption » ne sont pas « transmis avant le 15 octobre 2010 ». Dans ce cas, la lettre serait « envoyée dans le contexte du paquet du mois d’octobre 2010 sur les procédures d’infraction » dans leur ensemble selon la pratique habituelle.

Parallèlement, la Commission a dit analyser la situation dans tous les autres Etats membres au sujet de la « transposition de la directive sur la libre circulation pour évaluer la nécessité ou pas d’entamer des procédures d’infraction » à leur encontre. Si tel était le cas, une « lettre de mise en demeure » serait envoyée « pour tous les cas similaires » dans le cadre des « prochains paquets sur les procédures d’infraction ».

Reste que Bruxelles n’a pas convenu de poursuivre Paris pour discrimination des Roms. La commission a « pris note » de ses « assurances » sur le fait que les mesures françaises prises cet été « n’ont pas eu comme objectif ou comme effet de viser une minorité ethnique spécifique » -à savoir les Roms-, que la circulaire du 5 août -« qui n’était pas conforme à cette orientation »- avait été « annulée » et remplacée par un autre texte, et que la France assurait une application « totalement effective et non-discriminatoire » du droit de l’UE. La commission a néanmoins annoncé l’envoi dès ce mercredi aux autorités françaises d’une « lettre » avec des « questions détaillées » et concrètes concernant « l’application dans la pratique des assurances politiques » données. « Nous sommes d’avis que ces assurances sont bien mais nous voudrions voir les détails », a indiqué Viviane Reding. « Qu’est-ce qui est arrivé à ces citoyens européens? Est-ce que véritablement ils ont été discriminés ou non? Alors nous demandons à la France de nous fournir les preuves, les documents de l’expulsion, les documents du passage devant le juge de toutes ces personnes qui ont été expulsées pendant l’été en France », a-t-elle précisé.

Dans une déclaration, le porte-parole du Quai d’Orsay a souligné que la France « fournirait, bien entendu » toutes « les informations nécessaires ». Quant au ministre de l’Immigration Eric Besson, il s’est félicité devant les députés de la décision de la Commission, une « bonne nouvelle pour tout le monde ». « C’est loin d’être un camouflet, c’est le contraire », a-t-il affirmé. Bruxelles « prend acte qu’il n’y a pas eu de discrimination ». « La France sort la tête haute de l’échange avec la Commission européenne ».

Texte intégral de la Déclaration de la Commission

« La Commission européenne évalue les récents développements en France, discute la situation générale des Roms et le droit de l’UE sur la libre circulation des citoyens de l’UE. Comme annoncé en début de ce mois, la Commission européenne a évalué aujourd’hui les récents développements en France et discuté la situation générale des Roms et le droit de l’UE sur la libre circulation des citoyens de l’UE.

La Commission a entendu les présentations de la Vice-présidente Viviane Reding, responsable de la Justice, Droits Fondamentaux et Citoyens, du Commissaire Lászlo Andor, responsable de l’Emploi, Affaires Sociales et Inclusion, et de la Commissaire Cecilia Malmström, responsable des Affaires Intérieures.

La Commission a conclu dans les termes suivants:

1. Le droit de chaque citoyen de l’UE à la libre circulation à l’intérieur de l’Union est un des principes fondamentaux de l’UE. En tant que gardienne des Traités, il est du devoir de la Commission de s’assurer de son application complète et effective dans tous les Etats membres.

2. Les Etats membres sont responsables et ont le droit de prendre des mesures pour s’assurer du respect de l’ordre public et de la sécurité publique dans leur territoire. Ce faisant, ils doivent respecter les règles établies par la directive de 2004 sur la libre circulation, les droits fondamentaux des citoyens de l’UE et éviter toute discrimination, en particulier sur la base de la nationalité ou de l’appartenance à une minorité ethnique.

3. Les récents événements en France ont amené à un échange détaillé entre la Commission et les autorités françaises sur l’application du droit de l’UE à la libre circulation des personnes. La Commission a pris note aujourd’hui des assurances apportées par la France au plus haut niveau politique le 22 Septembre 2010 sur le fait que:

•les mesures prises par les autorités françaises depuis cet été n’ont pas eu comme objectif ou comme effet de viser une minorité ethnique spécifique, mais ont traité tous les citoyens de l’UE de la même manière;

•la circulaire du 5 août 2010 qui n’était pas conforme avec cette orientation, a été annulée et remplacée par une autre circulaire adoptée le 13 septembre 2010;

•les autorités françaises assurent une application totalement effective et non-discriminatoire du droit de l’UE, en conformité avec les Traités et avec la Charte de l’UE sur les Droits Fondamentaux.

4. La Commission a également noté que la France réaffirme son engagement à une coopération étroite et loyale sur ces questions. La Commission continuera l’échange avec les autorités françaises et envoie aujourd’hui une lettre aux autorités françaises avec des questions détaillées concernant l’application dans la pratique des assurances politiques qu’elles ont données.

5. Dans le but d’apporter une certitude juridique aux Etats membres et aux citoyens de l’UE, en particulier dans des situations controversées, il est extrêmement important de s’assurer que les sauvegardes procédurales et substantielles, prévues par la directive de 2004 sur la libre circulation, soient correctement transposées dans sa totalité par les Etats membres. A ce stade, la Commission considère que la France n’a pas transposé la directive sur la libre circulation en droit national de manière à rendre ces droits complètement efficaces et transparents. Par conséquent, la Commission a décidé aujourd’hui qu’elle enverra une lettre de mise en demeure à la France en demandant la transposition complète de la directive, à moins qu’un projet de mesure de transposition ainsi qu’un calendrier précis pour son adoption ne soit transmis avant le 15 Octobre 2010. La lettre de mise en demeure serait envoyée dans le contexte du paquet du mois d’Octobre 2010 sur les procédures d’infraction.

6. En même temps, la Commission est en train d’analyser la situation dans tous les autres Etats membres en ce qui concerne la transposition de la directive sur la libre circulation pour évaluer la nécessité ou pas d’entamer des procédures d’infraction également à l’encontre d’autres Etats membres. Si tel était le cas, elle enverra une lettre de mise en demeure pour tous les cas similaires également dans le contexte des prochains paquets sur les procédures d’infraction.

7. La Commission a réitéré aujourd’hui que l’intégration sociale et économique des Roms représente un défi commun et une responsabilité partagée de tous les Etats membres. La Communication de la Commission sur cette question, adoptée le 7 Avril 2010, énumère une série de mesures importantes qui doivent être prises au niveau national et de l’UE dans le but d’améliorer la situation des Roms au plus vite.

8. A cet effet, et sur la base du travail de la Plateforme sur les Roms et de la Task Force sur les Roms, établie par la Commission le 7 Septembre 2010, avec l’objectif d’analyser l’utilisation et l’efficacité des fonds nationaux et de l’UE de la part des Etats membres pour l’intégration des Roms, la Commission présentera un Cadre au niveau de l’UE pour des stratégies nationales d’intégration des Roms en Avril de l’année prochaine. Ce Cadre de l’UE, qui se basera sur le rapport de la Task Force sur les Roms, évaluera en particulier l’utilisation nationale et européenne du financement et fera des propositions pour une meilleure application des fonds de l’UE de façon à viser l’exclusion des Roms lors des actuels et des prochains périodes de programmation. Les problèmes multidimensionnels de la minorité Rom seront traités dans le contexte des dix principes de base de la Communication sur l’intégration des Roms et dans le cadre d’une coopération renforcée entre toutes les parties prenantes. De plus, le Cadre au niveau européen visera à assurer un suivi plus efficace et un soutien aux efforts nationaux et européens en ce qui concerne l’intégration des Roms. Dans ce but, et dans le contexte de la Stratégie Europe 2020, la Commission invitera les Etats membres à présenter leurs propres stratégies nationales pour l’intégration des Roms comme un élément de leurs programmes nationaux de réformes. La prochaine initiative phare sur la « Plateforme contre la pauvreté » constituera un cadre intégré d’actions en soutien des priorités horizontales comme celle de l’intégration des citoyens Roms. La Commission européenne considère aussi que les Etats membres doivent être explicites et ambitieux sur les Roms lors de l’adoption des objectifs nationaux Europe 2020 dans le domaine de la réduction de la pauvreté, de l’emploi et de l’éducation.

9. La Commission travaillera étroitement ensemble avec tous les Etats membres dans la préparation du Cadre au niveau de l’UE pour des stratégies nationales d’intégration des Roms. L’Agence européenne des droits fondamentaux sera associée à ce travail.

10. La Commission fera rapport des progrès réalisés au Parlement européen et au Conseil européen avant l’été 2011.

Texte intégral en anglais http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/10/1207&format=HTML&aged=0&language=EN&guiLanguage=en

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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