Mise à jour du billet précédent: Accord Grèce et Turquie sur l’immigration ! vont-ils finir par s’entendre sur le dossier de l’immigration ? Une épine enlevée du pied de la Commission qui n’a pas ménagé ses efforts ? Mais les reproches réciproques n’ont pas tardé à ressurgir : les accords de réadmission contre la suppression des visas peuvent fournir une « bonne » occasion ? Non finalement ! c’est l’appel au secours de la Grèce qui oblige la Commission ( Cecilia Malmström) à déclencher les mesures d’urgence. Succession d’épisodes peu glorieux pour tout le monde. Une grande inconnue la coopération avec la Turquie. Un bilan très provisoire.

 

Grèce et Turquie s’engagent à coopérer sur l’immigration : la  Grèce et la Turquie se sont engagées vendredi  22 octobre à développer leur coopération dans le domaine de la lutte contre l’immigration clandestine et à résoudre leurs contentieux territoriaux.  Mais la Grèce quelques heures plus tard appelle au secours la présidence belge et la Commission…

Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, qui effectuait vendredi 22 octobre sa seconde visite à Athènes en cinq mois, signe de l’amélioration des relations entre les deux pays,  et son homologue grec, George Papandréou, ont  estimé que les deux pays progressaient dans leurs discussions sur la délimitation du plateau continental de l’un et de l’autre. Sur le plan de l’immigration, ils ont décidé de présenter une initiative conjointe à l’Union européenne concernant la lutte contre les franchissements illégaux et un assouplissement des visas pour les Turcs, a ajouté Papandréou. »Après nos discussions, mon ministre des Affaires étrangères et moi-même allons quitter la Grèce satisfaits », a dit Erdogan.

La France avait appelé la Turquie, il y a quelques jours, à combattre les trafics d’être humains sous toutes leurs formes.  Lors d’une visite à  Chypre le 18 octobre), le ministre français de l’Immigration, Eric Besson, a déclaré que la Turquie devait « faire mieux » en matière d’immigration en protégeant ses frontières et en admettant à nouveau les migrants illégaux, y compris les centaines de prostituées qui travaillent dans le nord de Chypre. La commissaire Malmström a fait un déplacement important en Grèce (cf. Nea say)

Traditionnellement depuis quelques années la Commission appelait la Turquie à faire des efforts, des efforts dignes de son statut de candidat à l’adhésion à l’Union européenne. L’année passé, l’ancien commissaire à la Justice, Jacques Barrot, avait décrit l’immigration illégale via la Turquie comme « un risque pour la démocratie grecque » et avait appelé Ankara à en faire plus pour combattre les trafiquants d’êtres humains (commerce florissant d’esclaves sexuels vers la parie nord de Chypre notamment, des rapports dénoncent l’inaction de la police et des autorités et le pouvoir sans partage de la mafia). M. Barrot avait également accusé la Turquie d’avoir fermé les yeux sur le trafic de migrants illégaux vers la Grèce. Ankara affirme que les migrants viennent de pays tels que l’Irak et le Pakistan et qu’elle ne devrait pas avoir à s’occuper de ceux qui traversent la Turquie pour atteindre la riche UE. La Turquie est restée longtemps sourde aux appels de l’UE et de la Commission en particulier au moment où l’UE a besoin de signes concrets venant de Turquie dans ce domaine et d’autres.

La Grèce , de son côté, a appelle l’UE à l’aide (cf. Nea say). « La Grèce ne peut plus supporter cette situation […] nous appelons l’UE à assumer ses responsabilités vis-à-vis de notre pays », avait  récemment lancé le ministre chargé de l’immigration, Christos Papoutsis. Une situation insupportable.

La commissaire chargée des affaires intérieures, Cecilia Malmström, qui se trouvait en Grèce le mois dernier, a déclaré qu’Athènes faisait face à un « gigantesque » défi dans sa lutte contre l’immigration illégale.  Cependant Frontex, l’agence européenne basée à Varsovie qui coordonne le travail dans le domaine de la sécurité des frontières, a ouvert un bureau opérationnel en Grèce dans la ville de Pirée le 1er Octobre. Il s’agit des premiers locaux de l’agence en dehors de ses quartiers généraux à Varsovie.(cf. Nea say) et dans son rapport trimestriel Frontex a fait état d’une chute spectaculaire du franchissement illégal des frontières entre les deux pays http://www.frontex.europa.eu/newsroom/news_releases/art68.htm

Mais Ankara réticent à l’idée d’accepter la réadmission.Les citoyens turcs sont sujets au régime des visas pour visiter l’UE. La Turquie exhorte l’Union à mettre en place un programme de facilitation des visas similaire à celui permettant à plusieurs pays des Balkans occidentaux de voyager sans visa en  UE.

Toutefois, ces pays ont dû remplir une condition préalable. Ils ont signé des accords de réadmission avec l’UE où ils étaient d’accord d’admettre sur leur territoire les migrants illégaux qui avaient été capables de se rendre dans les pays membres. La Turquie reste peu enthousiaste à l’idée de la signature d’un tel accord. « Cet accord met la Turquie face à un problème majeur : elle doit décider entre une exemption de visa et les immigrants. Il pourrait s’agir d’une nouvelle tactique alternant la carotte et le bâton de la part de l’UE dans ses négociations avec la Turquie. De sérieux doutes émergent sur la question de savoir si l’UE abolirait réellement ou non les restrictions sur les visa, même si la Turquie était prête à accepter l’accord », écrit M. Korkut.

Le malentendu, l’inaction, la mauvaise volonté risquait à tout moment de ressurgir. Elle a ressurgit beaucoup plus tôt que prévu. Un instant apaisée par son voyage en Grèce (cf. Nea say) , les propos lénifiants de Frontex et puis cet « accord », Cecilia Malmström aurait pu estimer avoir un peu de temps devant elle. Hélas non

Le gouvernement grec souhaite que l’UE déploie immédiatement « ses équipes frontalières d’intervention rapide » avec le soutien de l’Agence européenne de surveillance des frontières extérieures (Frontex) .La Grèce a demandé à l’Union européenne de déployer des patrouilles de surveillance à la frontière gréco-turque, où un afflux sans précédent de migrants clandestins a été enregistré ces derniers mois, indiqué dimanche le ministre de la Protection du citoyen Christos Papoutsis.

« Un afflux massif de ressortissants de pays tiers tentant de pénétrer illégalement dans le pays avec l’objectif de gagner d’autres pays de l’UE est recensé quotidiennement à la frontière terrestre de la Grèce avec la Turquie », a indiqué le cabinet de Christos Papoutsis, qui est responsable de la police.Le gouvernement grec souhaite que l’UE déploie immédiatement « ses équipes frontalières d’intervention rapide » avec le soutien de l’Agence européenne de surveillance des frontières extérieures (Frontex), dont les patrouilles maritimes ont contribué à diminuer l’afflux de clandestins par la mer. La Grèce a présenté cette demande dans des lettres adressées à la Commissaire européenne aux Affaires intérieures Cecilia Malmström et au ministre belge de l’Intérieur Annemie Turtelboom, dont le pays assure la présidence de l’UE, a ajouté le cabinet de M. Papoutsis. « La pression croissante des flux de l’immigration illégale sur les frontières grecques est de toute évidence un problème européen qui exige une réponse européenne », a souligné M. Papoutsis.

L’ONU a appelé cette semaine les pays de l’UE à faire plus pour alléger le fardeau de l’immigration clandestine qui pèse sur la Grèce.A l’issue d’une mission de 10 jours en Grèce, le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, Manfred Nowak, a notamment dénoncé les conditions de détention « inhumaines » dans les centres de rétention surpeuplés. En 2008, 50% des migrants illégaux arrêtés sur le territoire de l’UE l’ont été en Grèce, mais au cours des huit premiers mois de l’année 2010, ils étaient 90%, selon l’ONU. Selon Frontex, plus des trois quarts des 40.977 personnes interceptées aux frontières de l’UE au cours du premier semestre 2010 entraient en Grèce, principalement en provenance de Turquie.

De façon répétitive, mois après mois, années après années, les mêmes constats, griefs, apaisements, appels au secours selon un cycle infernal et bien connu. Bien entendu Cecilia Malmstrôm ne pouvait que déclencher l’intervention des équipes d’urgence aux frontières (Rabit « Rapid Border Intervention Teams »). Avec quelle efficacité et pour combien de temps ?

Dés dimanche soir dans un communiqué Cecilia Malmström indiquait que Rabit avait été activé….(texte du communiqué http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=MEMO/10/516&format=HTML&aged=0&language=EN&guiLanguage=en )

Maintenant dit le communiqué, pourquoi ce « maintenant » un peu tardif ? »La Grèce va maintenant être en mesure de bénéficier concrètement de la solidarité européenne dans la gestion des frontières extérieures ».Athènes a demandé à l’Union européenne de déployer des patrouilles de surveillance à la frontière gréco-turque, où un afflux sans précédent de migrants clandestins a été enregistré ces derniers mois, a indiqué dimanche le ministre de la Protection du citoyen Christos Papoutsis. Le gouvernement grec souhaite que l’UE déploie immédiatement « ses équipes frontalières d’intervention rapide » avec le soutien de l’Agence européenne de surveillance des frontières extérieures (Frontex), dont les patrouilles maritimes ont contribué à diminuer l’afflux de clandestins par la mer.

La réponse de la Commissaire indiquant qu’elle avait « activé » le mécanisme de liaison avec Frontex « de manière à gérer cette situation d’urgence de la façon la plus rapide et efficace possible ». « La situation à la frontière terrestre gréco-turque est de plus en plus préoccupante, les flux de personnes traversant la frontière clandestinement ont atteint des proportions alarmantes et la Grèce n’est manifestement pas en mesure de faire face à cette situation toute seule », a dit Mme Malmström. La commissaire européenne s’est déclarée « très préoccupé par la situation humanitaire ».

Bilan provisoire

Il est trop tôt pour le faire : la situation sur le terrain est encore mal connue et les besoins pas encore évalués. Tout semble se concentrer sur une distance réduite de 12, 5 km , pas ou mal surveillée autour de la ville d’Orestiada, une situation difficilement compréhensible à distance. Il reviendra au directeur exécutif de Frontex de déclencher les opérations et il doit le faire dans les cinq jours suivant l’introduction de la demande. C’est la première fois qu’est demandée par la Grèce la mise en œuvre du Règlement 863/2007 qui organise le déroulement des interventions. Se mélangent différents problèmes les uns relevant du maintien de l’ordre, de garantie des droits fondamentaux, d’autres de l’humanitaire. En ce qui concerne le problème récurrent du partage du fardeau, les fonds européens existent et les sommes allouées à la Grèce sont importante. Elle est l’un des plus grands bénéficiaires pour les quatre fonds existants pour la gestion des flux migratoire  (18 millions du fonds européen des réfugiés pour la période2008-2013 aux quels s’ajoutent 8 pour le renforcement de l’accueil  et de la capacité de réception, 20  au titre du Fonds européen pour l’intégration des citoyens des pays tiers, 180 au titre du Fonds pour les frontières extérieures pour la période 2007-2013, 97 au titre  du fonds pour les  retours pour la période 2008-2013). Ces allocations sont-elles suffisantes ? Il est difficile de répondre en toute rigueur en tout cas elles sont loin d’être complètement dépensées. Quant aux centres de rétentions, il est vrai que la situation n’est pas satisfaisante : Euronews a fait état d’une grève de la faim de 35 iraniens, certains d’entre eux ayant cousu leurs lèvres avec du fil de chirurgie pour ne pas avoir à répondre aux questions. La Commission fait valoir que la Grèce a pris des engagements dans son plan d’action, mais il ne faut pas s’attendre à des résultats rapides, elle suit attentivement le déroulé de la feuille de route. La Commission rappelle qu’une procédure d’infraction est engagée contre la Grèce pour non application de la directive asile. En ce qui concerne les opérations Frontex, la Grèce a déjà l’expérience de trois opérations actuellement en cours (Attica, Poseidon, Poseidon sea) et il ne faut jamais perdre de vue qu’elles se déroulent sous la supervision et les instructions de l’Etat demandeur. Surplombant le tout, un non-dit chaque jour un peu plus « criant » : que fait la Turquie ? quels sont les engagements pris  de part et d’autre ? Les questions à son sujet ne reçoivent pas des réponses clarifiantes ou apportant des solutions rapides. Il n’est guère satisfaisant de recevoir comme réponse  que se négocie depuis une assez longue période un accord de réadmission , les négociations progressent, le Conseil Justice et affaires intérieures devrait s’en saisir en novembre.  Certes il est évident que ce serait un instrument utile pour garantir la coopération avec la Turquie dans la lutte contre l’immigration irrégulière à la frontière avec la Grèce. Mais est-ce suffisant ? Il y a six mois l’accord de réadmission avec la Turquie semblant devenir imminent, la députée européenne écologiste Hélène Flautre avait dans un communiqué http://europeecologie.eu/Silence-on-readmet-L-accord-de,1443 appelé l’attention sur le fait que ces négociations se déroulaient en l’absence de transparence vis-à-vis du Parlement européen, pourtant co-législateur, un champ d’application obscur, , les documents de voyage, des incertitudes concernant la date d’entrée en vigueur, le contenu et les preuves de la demande, les délais, l’assistance technique, les principes etc…Disons plus simplement que ce futur accord, quel qu’l soit ne peut être qu’une cote mal taillée aussi longtemps que n’existe pas un accord général multilatéral et non pas une succession d’accords bilatéraux : hier le Pakistan, demain la Turquie et ainsi de suite. Pour le PNR, l’UE semble vouloir s’orienter vers une approche multilatérale et la nécessité ou l’urgence politique ayant leur contrainte, la Commission a indiqué quelle pouvait être une stratégie d’ensemble, des principes généraux valables pour tous ceux qui étaient intéressés par des accords PNR concernant les passagers aériens.

Les jours qui viennent devraient apporter leurs lots d’informations et d’avancées au moins partielles tant le problème est ancien. Seront-elles durables et pourrions nous, enfin, n’avoir pas à renier des écrits vieux d’à peine six mois : ainsi avions nous écrit le16 mai dernier « apaisement sur le front greco-turc, un accord en vue en matière  de réadmission »  encouragé par la déclaration de Cecilia Malmström à la sortie du Conseil des ministres  du 10 mai « un accord est sur le point d’être conclu »….

Texte du Règlement 863/2007 concernant Rabit : création d’équipes d’intervention rapide aux frontières définissant les tâches et compétences des agents invités (FR) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2007:199:0030:01:FR:HTML

 (EN) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2007:199:0030:01:EN:HTML

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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