Hadopi :rapport sur la mise en oeuvre de la réponse graduée (2010-2011)

 La Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) a présenté son premier rapport d’activité le 28 septembre 2011. Instituée par la loi du 12 juin 2009, dite « Création et Internet », l’Hadopi est une Autorité administrative indépendanteAutorité administrative indépendante  chargée, en son nom, d’assurer la régulation de secteurs considérés comme essentiels et pour lesquels le gouvernement veut éviter d’intervenir trop directement. Elle est chargée de protéger les œuvres à l’égard des actes de contrefaçon numérique, de promouvoir le développement de l’offre légale, d’observer l’utilisation licite et illicite des œuvres (« réponse graduée ») et de réguler l’usage des mesures techniques de protection.

Depuis son lancement, au premier trimestre 2010, l’Hadopi s’est notamment engagée dans la mise en oeuvre de la réponse graduée (rappel de la loi aux internautes). Dans ce cadre, l’Hadopi a envoyé 470 935 « premières recommandations » (courrier électronique d’avertissement adressé aux abonnés internet soupçonnés d’avoir téléchargé illégalement de la musique ou des vidéos) et 20 598 « secondes recommandations » (courrier électronique, complété d’une lettre recommandée, adressé aux internautes soupçonnés de poursuivre les téléchargements illégaux).

La loi prévoit que l’Hadopi peut transmettre à la justice les dossiers de personnes soupçonnées de ne pas avoir tenu compte des avertissements qui leur ont été adressés. En cas de condamnation, ces personnes encourraient 1 500 euros d’amende et  suspension de leur abonnement Internet.

L’année « 2012 sera l’année du diagnostic, car les offres légales peinent à combler les attentes du public », a lancé, jeudi 29 septembre, Marie-Françoise Marais, de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi). Lors de la présentation de son premier rapport d’activité, l’autorité a d’abord réalisé un bilan chiffré de sa « réponse graduée », censée lutter contre le téléchargement illégal des œuvres protégées par le droit d’auteur.

Sur les 38 millions d’internautes français, 650 000 ont reçu un premier mail d’avertissement, après constat d’une infraction sur les fichiers des réseaux « peer-to-peer ». 44 000 ont reçu un deuxième courriel d’avertissement accompagné d’une lettre remise contre signature, après que la Hadopi a constaté une récidive. Une soixantaine , voire moins)de personnes seulement pourraient être concernées par la troisième phase de la réponse graduée. En cas de condamnation par un tribunal pour acte de « négligence caractérisée », l’internaute encourt 1 500 euros d’amende et un mois de suspension de son abonnement Internet. Ces chiffres sont en sensible hausse par rapport à ceux communiqués en juillet par la Haute Autorité.

Où en est-on avec l’offre légale ? En panne ?

« Le dispositif Hadopi est un rappel à la loi adressé à l’internaute. On ne peut pas faire en sorte qu’il l’entende sans la présence d’une offre légale », poursuit néanmoins la présidente de la Hadopi. « L’offre actuelle est profondément disparate. On ne peut raisonner de la même façon qu’il s’agisse de la musique, du film, du livre, du jeu vidéo, de la photographie. Si l’offre légale en matière de musique est la plus avancée, elle ne peut pas être transposée aux autres domaines, purement et simplement », poursuit Marie-Françoise Marais.

Lors de la conférence, la présidente de la Haute Autorité a défendu son système de labels, permettant d’identifier les sites et services qui proposent une offre légale de musique ou de films. Au total, une trentaine d’offres sont désormais labellisées, qu’elles soient gratuites pour l’utilisateur ou payantes. La Hadopi, qui disposera d’un budget de 11 millions d’euros en 2012, annonce également travailler à la mise en place d’un portail permettant de recenser les offres légales. Ce service « devrait devenir une réalité dès la fin de l’année, ou au début de l’année prochaine », selon Mme Marais. Mais une offre légale de contenus, économiquement pérenne, peut-elle véritablement se développer en France ? Telle était notamment la problématique de la commission Zelnik, du nom du PDG de la maison de disques indépendante Naïve, qui a remis en janvier 2010 une série de propositions au ministère de la culture.

Parmi les pistes évoquées figurait l’idée d’un prélèvement obligatoire sur les revenus de la publicité en ligne, une sorte de « taxe Google ». « Le niveau de décision de cette mesure est d’ordre gouvernemental. Il y aura sans doute, au niveau européen, une forme de taxation, mais cela ne peut pas se faire immédiatement », précise au Monde.fr Jacques Toubon, membre de la mission Zelnik. D’autres militent pour l’instauration d’une licence globale, permettant à l’internaute de télécharger des œuvres, s’il rétribue, de façon mensuelle par exemple, les ayants droit. eur d’un tel dispositif.

A la fin du mois d’août, le ministère de la culture a également reçu une étude sur le partage de la valeur dans l’économie numérique. Ces documents n’ont pas été publiés, mais d’après M. Toubon, « la constatation principale est que l’écosystème est en train de se créer dans la diffusion numérique, et devrait peu à peu combler une partie de la perte des ventes physiques ». « Dans le domaine de la musique, Deezer et Spotify deviennent des acteurs forts. Qui aurait pu penser que le monopole d’Apple sur l’offre légale pouvait être contesté ? » poursuit l’ancien ministre de la culture.Pour Jacques Toubon, « il n’y a pas de modèle économique idéal qui pourrait servir de référence. De l’abonnement pour le grand consommateur à l’accès gratuit financé par la publicité pour l’utilisateur occasionnel, toute la palette doit être présente », conclut-il.

Mais où allons-nous ? « Le pire serait de revenir à la période pré-Hadopi » nous dit dans un grand cri de sincérité la présidente de Hadopi, Marie-Françoise Marais. Mais quoi alors ? la formule de la licence globale est loin de  convaincre tout le monde, une réforme du droit d’auteur au niveau international prendra du temps et il devra comprendre le droit d’auteur sur Internet. Les activistes anti-Hadopi restent minoritaires , les cataclysmes annoncés ne sont pas au rendez-vous. L’étranger est de plus en plus intéressé par la formule Hadopi. S’il reste encore beaucoup de progrès à accomplir il y a un assez net changement des comportements qui se réorientent vers l’offre légale, conversion méritoire, cette dernière restant aussi peu précise, visible, et installée. Au bout d’un an c’est seulement une vingtaine de dossiers ( pour 22 millions de constats d’infractions, rappelons les 580000 premiers mails envoyés et 35000 seconds mails)qui pourrait être transmise à la Justice. La polémique s’apaise mais Hadopi souffre de différents handicaps, le plus important est peut-être de ne pas avoir été porté, d’emblée, au niveau européen même si les autorités européennes se sont exprimées à ce sujet (Parlement européen, Commission européenne par la voix de sa vice-présidente Viviane Reding). Bref, toujours un vaste chantier. Malgré elle, la Hadopi a peut-être encore de beaux jours devant elle.

Les prochaines élections présidentielles en France vont-elles trancher ? Rien n’est moins assuré ! Le sort de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), et de sa « réponse graduée », a en effet quitté le cercle des initiés pour atterrir dans l’arène politique.  Mis à part Nicolas Sarkozy ( et encore sa position n’est pas claire), la plupart des candidats potentiels à l’élection présidentielle promettent à l’Hadopi au mieux une réforme profonde, au pire une disparition pure et simple. Mais les modèles alternatifs sont encore peu clairs et leur faisabilité pas encore assurée totalement. Gauche et droite sont divisées.

La plus clairement exprimée la position de Martine Aubry : elle défend la légalisation des échanges de fichiers, par la création d’une contribution créative. Comprendre la licence globale, sorte de redevance « modeste » intégrée dans l’abonnement à Internet. Un euro, ou plus ? « Nous ne donnons pas de chiffre précis, sinon cela signifierait que le débat est déjà bouclé. Nous allons mener la concertation avec tous les acteurs ». Le dispositif est-il applicable à toutes les œuvres, musique, cinéma, le livre, la photo, les autres medias natifs d’Internet,  tous les champs de la culture ?

« Ni Hadopi ni licence globale, pour une extension du domaine de la création », telle est la position de François Hollande. Il s’est prononcé pour l’abrogation de l’Hadopi puis pour sa révision. Aujourd’hui, il  estime qu’il faut réorienter l’Hadopi, conserver sa dimension pédagogique et supprimer tout ce qui concerne la criminalisation de la jeunesse, dans ses pratiques culturelles. Autre piste avancée : réfléchir à de nouveaux modes de financement pour la création sur Internet et, pourquoi pas, réorienter la taxe sur les fournisseurs d’accès à Internet qui aujourd’hui sert à financer France Télévisions.

Parmi les candidats socialistes, Ségolène Royal continue d’être favorable à la suppression pure et simple de l’Hadopi. Elle préconise une nouvelle loi et veut mettre en place un modèle qui garantit le financement des droits d’auteur. Mais laquelle ? Même position tranchée chez Europe Ecologie-Les Verts (EE-LV). « Hadopi, cela coûte de l’argent et ne sert à rien. L’argent, je le placerais dans un fonds à l’usage des jeunes artistes », explique la députée européenne Sandrine Bélier.

Au nom « de la liberté sur Internet », la présidente du Front national, Marine Le Pen, promet elle aussi d’abroger la loi Hadopi.

Au MoDem, on constate que l’Hadopi n’a réglé aucun problème et que son action ne permet de lutter contre le piratage qu’à la marge. François Bayrou s’est déclaré sur ce sujet favorable à la mise en place d’une licence globale. Sur ce plan il rejoint François Hollande

Au sein des promoteurs de l’Hadopi, les lignes bougent aussi. Fidèle a sa politique d’expérimentation, agrémentée d’une clause de rendez-vous, Nicolas  Sarkozy, a laissé entendre en mai (cf. Nea say)qu’il faudrait réformer l’Hadopi dans un sens moins répressif.  puisque

Site de Hadopî http://www.hadopi.fr/actualites/agenda/telecharger-le-rapport-d-activite-de-l-hadopi

      -. En savoir plus sur la réponse graduée, Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) http://www.hadopi.fr/faq/en-savoir-plus-sur-la-reponse-graduee

      -. Dispositif de « réponse graduée » : la CNIL met en demeure les sociétés de perception et de répartition des droits d’auteurs et leur sous-traitant, TMG, Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) http://www.cnil.fr/la-cnil/actu-cnil/article/article/dispositif-de-reponse-graduee-la-cnil-met-en-demeure-les-societes-de-perception-et-de-repa/

      -.Présentation du rapport d’activité http://www.hadopi.fr/actualites/agenda/presentation-du-rapport-d-activite-de-l-hadopi

      -.Texte du rapport http://www.hadopi.fr/sites/default/files/page/pdf/rapport-d-activite-hadopi.pdf

      -.Dossier Hadopi de Nea say (51 articles) http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?q=hadopi&Submit=%3E

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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