Paquet infraction du mois de septembre : les mauvais élèves doivent revoir leur copie à propos des atteintes à la libre circulation.

La rentrée étant bien entamée, la Commission européenne rend ses premières copies et pointe du doigt les cancres, ceux qui devront passer les prochaines semaines à réviser leurs cours de droit européen. Ainsi, le paquet mensuel d’infractions a été rendu public ce 26 septembre 2013 : rappelons, qu’en vertu de l’article 258 du TFUE, la Commission, en tant que gardienne des traités, dispose du pouvoir d’engager des poursuites à l’égard d’un Etat membre qui ne respecterait pas ses obligations au niveau du droit européen. Ici, libre circulation et non-discriminations semblent être particulièrement mis à mal par les Etats membres.

 D’abord, ce qui touche à la libre circulation des travailleurs. La Commission européenne pointe d’abord du doigt la Belgique pour un accès discriminatoire aux services publics dans la région de langue française, de langue allemande et la région bilingue de Bruxelles-capitale. Ainsi, les candidats à de telles fonctions se doivent de prouver leurs compétences linguistiques et ce, uniquement via un diplôme délivré par SELOR (organisme de recrutement en Belgique). S’il n’est certes pas interdit de demander un certain niveau de connaissance linguistique pour l’occupation d’une fonction, le fait que n’importe quel diplôme prouvant le niveau linguistique ne puisse être accepté constitue un accès discriminatoire au marché du travail et une mesure disproportionnée car contraire à l’article 45 du TFUE.

  C’est ensuite au tour de Chypre d’être visé par la Commission dans le cadre de la libre circulation des travailleurs pour une discrimination envers les anciens fonctionnaires chypriotes travaillant par la suite dans un autre Etat membre. Ainsi, à Chypre, un fonctionnaire âgé de plus de 45 ans et ayant au moins 5 ans de service perçoit une somme forfaitaire à son départ et peut disposer d’une retraite consolidée à l’âge de 55 ans. Par ailleurs, pour les personnes qui quittent le service public avant l’âge de 45 ans, s’ils décident d’aller travailler dans un autre Etat membre, et ce, même en ayant déjà comptabilisé 5 ans de service, perdent leur droit à la retraite consolidée. De même, si un individu chypriote quitte son emploi pour un autre qui se situe à Chypre, il dispose de plusieurs années de congé sans solde avant d’être obligé de démissionner alors qu’un individu chypriote quittant son emploi pour un autre situé dans un Etat membre différent ne dispose que de 9 mois de congé sans solde. Il s’agit donc une nouvelle fois d’une forme de dissuasion à l’exercice de la libre circulation.

 Enfin, la Roumanie est visée par la Commission pour l’établissement de mesures discriminatoires à l’égard des non-résidents, qui, malgré leur insertion dans la vie professionnelle n’auraient droit à aucune déduction personnelle ou familiale, ce qui revient une nouvelle fois à dissuader les individus d’autres Etats membres à s’installer en Roumanie pour y exercer une activité professionnelle.

 Ensuite, c’est la libre circulation des capitaux qui est, elle aussi mise à mal, notamment par un Etat membre : la Belgique. Premier cas, celui des droits de succession. En Belgique, les héritiers peuvent choisir entre différents cours boursiers pour leurs droits de succession : généralement et assez logiquement ils vont donc choisir le plus favorable pour eux. Cependant, cela n’est valable que pour les cours boursiers belges et non les européens qui eux, ne peuvent faire l’objet d’un choix. Du coup, logiquement, vu que les cours belges sont généralement plus en leur faveur car plus bas, moins d’investissements sont réalisés dans les actions européennes, ce qui nuit très largement à la libre circulation des capitaux. Deuxième et dernier cas, toujours en Belgique, la taxation appliquée par la région wallonne pour les dons de certaines unités dans les organismes de placement collectif en valeurs mobilières en provenance d’autres membres de l’Union européenne. Là aussi, une réduction des taxes a lieu pour les organismes de placement collectif en valeurs mobilières belges, ce qui nuit une nouvelle fois à la libre circulation des capitaux, créant une préférence pour les organismes nationaux.

 En ce qui concerne maintenant la libre circulation des services, c’est au tour de l’Irlande d’être ciblée par la Commission : ainsi, les prestataires de services souhaitant exercer en Irlande se doivent de remplir des conditions jugées comme disproportionnées : obtention d’une autorisation, souscription à une obligation irlandaise, minimum de capital requis et adresse postale en Irlande. Tout cela est perçu comme disproportionné dans le sens où ces prestataires de services doivent déjà souscrire à ce genre de conditions dans leur propre pays.

 Enfin, on retrouve deux dispositions touchant au domaine de la justice : la Roumanie est  épinglée pour  sa non transposition de la « Employed activity Directive » qui permettrait à des millions de femmes d’accéder à une forme de protection sociale sur le marché du travail ainsi que d’avoir accès plus facilement à l’entrepreneuriat. De même, la Bulgarie est invitée à cesser les restrictions posées à la candidature et le vote d’un résident issu d’un autre Etat membre aux élections locales et européennes.

 Finalement, on le voit, c’est principalement la libre circulation qui est mise à mal par de nombreux Etats membres. Reste à espérer que de cancres, les Etats membres concernés passeront au statut d’élèves modèles. Suite le mois prochain !

 

Louise Ringuet

 

 Pour en savoir plus :

        -.TFUE  : http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2008:115:0047:0199:fr:PDF

       -. European Commission – Memo – « September infringements package : main decision » – 26 september 2013 : http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-13-820_en.htm

       -.Pour en savoir plus sur la procédure des infractions – Europa :

http://ec.europa.eu/eu_law/infringements/infringements_en.htm

 

 

 

 

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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