En attendant Schengen, la Croatie et Chypre s’offrent de quoi patienter!

Le 17 octobre dernier, la Commission LIBE se penchait sur un sujet dont la longueur du titre ne laissait présager rien de bon, et pourtant ! Ainsi, le sujet portait sur « le contrôle des personnes aux frontières extérieures, fondé sur la reconnaissance unilatérale par la Croatie et Chypre de certains documents comme équivalant à leurs visas nationaux aux fins de transit par leur territoire ou de séjours envisagés sur leur territoire ne dépassant pas 90 jours sur une période de 180 jours ». Le titre ne laissant guère plus de place à la mise en contexte, entrons directement dans le vif du sujet.

D’abord, développons l’objet du rapport, tel que développé par la Commission. Rappelons-le, lorsque un Etat membre rejoint l’Union européenne, celui-ci n’est pas directement membre de Schengen. Cela signifie que la Croatie et Chypre doivent délivrer des visas nationaux pour l’entrée ou le transit sur leur territoire à la fois aux ressortissants de pays tiers titulaires d’un visa uniforme et aux titulaires de visas de long séjour ou d’un titre de séjour délivré par un Etat membre, partie de Schengen. Or, cela représente une charge administrative superflue au vu du fait que les Etats membres de l’Union européenne ne présentent aucun risque pour la Croatie.

Du coup, la possibilité est laissée à Chypre et à la Croatie de reconnaître unilatéralement certains documents issus des Etats membres comme ayant la même valeur que leurs visas nationaux. Bien sûr, cela reste facultatif : ces deux pays peuvent décider de continuer à appliquer l’obligation de visas nationaux.

Sont proposés d’être reconnus comme équivalents à leurs visas nationaux :

      -. les visas uniformes de courte durée

      -. les visas de long séjour

      -. les visas à validité territoriale limitée délivrés aux ressortissants du Kosovo

Le cas du Kosovo est particulier : en effet, tous les Etats membres de l’UE ne reconnaissent pas l’existence de celui-ci : Slovaquie, Roumanie, Espagne, Chypre, Grèce qui ont ainsi rejoint entre autres la Chine et la Russie. Du coup seule le visa LTV s’applique. Il est prévu dans le texte la possibilité de reconnaître les visas du Kosovo pour l’ensemble des membres de Schengen le reconnaissant. : Les titres de séjour et documents similaires délivrés par les EM de Schengen

      -. les visas et titres de séjour délivrés par les pays associés à Schengen

      -. Les titres de séjour délivrés par Chypre ou la Croatie

Le transit et le séjour seraient alors autorisés pour une période de 90 jours sur une période totale de 180 jours.

Cela vient modifier la décision 895/2006/CE qui permettait aux nouveaux Etats membres de reconnaître une équivalence entre leurs visas nationaux et des titres de séjour délivrés par les Etats membre uniquement pour le transit des individus. Il s’agissait là aussi d’une reconnaissance unilatérale.

Une question persiste : Pourquoi ne pas y inclure la Roumanie et la Bulgarie ? La réponse de la Commission à ce sujet est claire : elle est partie du postulat que ces deux pays seraient très prochainement parties à Schengen, bien avant que la proposition arrive à son terme. Cependant, si tel n’était pas le cas, les deux pays seront incorporés au même titre que Chypre et la Croatie.

Pour Fajon (S&D) autant que pour Zdanoka (Verts/ALE), cette proposition ne pose aucun problème politique, il ne s’agit que d’un aménagement technique ici. De toute façon, ces pays souhaitent rejoindre Schengen, éliminer le trop-plein administratif ne peut qu’être une bonne chose.

En conclusion, alors que l’Union européenne est souvent pointée du doigt pour être trop bureaucratique, ici elle montre qu’elle est capable de prendre des décisions pour réduire cet aspect. D’ici là, la Roumanie et la Bulgarie seront-elles parties à Schengen ? Rien n’est moins sûr au vu des débats, mêlant confusions et arguments non tenables. D’ailleurs, mentionnons-le, pour tous ceux qui seraient perdus par la vague Schengen, d’ici peu EU-Logos publiera un dossier spécial « Schengen pour les nuls ».

Louise Ringuet

Pour en savoir plus :

      -. Europarl – 2013/0210 – Document de base législatif : http://www.europarl.europa.eu/oeil/popups/summary.do?id=1279392&t=d&l=fr

      ._. Décision n°895/2006/CE établissant un régime simplifié de contrôle des personnes aux frontières extérieures, fondé sur la reconnaissance unilatérale par la République tchèque, l’Estonie, Chypre, la Lettonie, la Lituanie, la Hongrie, Malte, la Pologne, la Slovénie et la Slovaquie de certains documents comme équivalant à leurs visas nationaux aux fins de transit par leur territoire (FR): http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2006:167:0001:0007:FR:PDF (EN) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2006:167:0001:0007:EN:PDF

      -. Décision n°582/2008/CE établissant un régime simplifié de contrôle des personnes aux frontières extérieures, fondé sur la reconnaissance unilatérale par la Bulgarie, Chypre et la Roumanie de certains documents comme équivalents à leurs visas nationaux aux fins de transit par leur territoire  (FR) :  http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2008:161:0030:0035:FR:PDF (EN) :  http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2008:161:0030:0035:EN:PDF

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

Laisser un commentaire