Procédures d’infraction du mois de septembre 2015 : la Commission vise le respect du droit d’asile

Le mardi 22 septembre 2015, la Commission européenne a annoncé le lancement de 56 procédures d’infraction à l’encontre des pays européens ne respectant pas le droit européen ou ne se conformant pas à leurs obligations européennes. Si ces 56 procédures visent plusieurs secteurs de la politique européenne, pour ce mois de septembre la Commission a relevé surtout un non-respect du droit d’asile de la part des Etats membres. 41 procédures relatives à la mauvaise application du système européen d’asile ont été lancées à l’encontre de 19 Etats membres.

La crise migratoire actuelle reste donc apparemment un réel problème dans le système politique européen : la non-application des règles européennes en matière d’asile et immigration en est la preuve. C’est pour cette raison que la Commission européenne « intensifie ses efforts pour assurer l’entière application du droit de l’Union dans le domaine des migrations et de l’asile ».

La procédure d’infraction est un moyen juridique qui permet à la Commission d’engager une action « pré-contentieuse » contre le non-respect ou la non-application, même partielle, des obligations européennes de la part d’un Etat membre. Ce dernier a trois mois pour répondre à la Commission sur la façon dont il a mis en œuvre ou compte mettre en œuvre le droit européen. Si la réponse est considérée insatisfaisante ou si cette réponse ne parvient pas à la Commission, cette dernière peut émettre un avis motivé par le biais duquel elle explique de quelle façon l’Etat membre concerné viole le droit communautaire. Suite à cet avis, le pays a deux mois de temps pour se conformer au droit européen. Si ce n’est pas le cas, la Commission peut alors saisir la Cour de Justice européenne qui se prononcera sur l’infraction et imposera, si nécessaire, une amende ou une astreinte si l’Etat ne notifie pas la mise en œuvre de la directive pas respectée.

Ce mois-ci, la Commission a relevé 56 procédures d’infraction à l’égard de 22 Etats membres : une procédure concerne le domaine des actions pour le climat, une le domaine des affaires sociales, deux le domaine de l’énergie, trois le domaine de l’environnement, cinq le domaine de la mobilité des transports et trois le domaine de la fiscalité. Mais la Commission a surtout engagé une action très importante à l’égard du non-respect de la règlementation européenne en matière d’asile et d’immigration : 19 Etats membres ont été épinglé et 41 procédures d’infraction ont été lancées « pour transposition incomplète de certains des instruments législatifs qui constituent le régime d’asile européen commun ».

Ces instruments législatifs concernent principalement l’application de la directive relative aux procédures d’asile afin que celles-ci soient « plus équitables, plus rapides et plus efficaces », de la directive relative aux conditions d’accueil afin que « les demandeurs d’asile partout dans l’Union bénéficient de conditions matérielles d’accueil respectueuses de la dignité humaine » et de la directive relative aux conditions que doivent remplir les demandeurs d’asile afin de définir plus précisément les motifs d’octroi d’une protection internationale.

Concernant la non-application de « Directive relative aux conditions que doivent remplir les demandeurs d’asile 2011/95/UE », deux pays ont été visés par un avis motivé : l’Espagne et la Bulgarie. Ces deux pays n’ont pas mis en exécution la transposition de la directive dans le cadre du droit national qui devait se faire avant le 21 décembre 2013. Malgré les lettres de mise en demeure, l’Espagne et la Bulgarie n’ont toujours pas notifié à la Commission les mesures nationales de transposition qu’elles souhaitent prendre. La directive 2011/ 95/UE vise à l’harmonisation des normes relatives « aux conditions que doivent remplir les ressortissants de pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale » : elle prévoit notamment une série de droits concernant la protection contre le refoulement, les titres de séjour, les documents de voyage, l’accès à l’emploi, l’accès à l’éducation, la protection sociale, les soins de santé, l’accès au logement et aux dispositifs d’intégration ainsi que des dispositions spéciales pour les enfants et les personnes vulnérables.

D’autre part, une lettre de mise en demeure concernant la transposition, dans le droit national, de la directive relative aux procédures d’asile (2013/32/UE) a été adressée à 18 Etats membres : la Belgique, la Bulgarie, Chypre, la République tchèque, l’Allemagne, l’Estonie, la Grèce, l’Espagne, la France, la Hongrie, la Lituanie, le Luxembourg, la Lettonie, Malte, la Pologne, la Roumanie, la Suède et la Slovénie. Cette directive fixe les règles pour l’octroi et le retrait de la protection internationale et les modalités de demande du droit d’asile. Le délai de transposition et celui de notification à la Commission étaient fixés pour le 20 juillet 2015.

En outre, 19 Etats membres ont reçu de la Commission une lettre de mise en demeure pour non-transposition, dans leur propre cadre juridique, de la directive relative aux conditions d’accueil qui donne « l’obligation juridique de faire en sorte que les demandeurs aient accès aux conditions matérielles d’accueil lorsqu’ils demandent une protection internationale ». Ces Etats sont : L’Autriche, la Belgique, la Bulgarie, Chypre, la République tchèque, l’Allemagne, l’Estonie, la Grèce, l’Espagne, la France, la Hongrie, la Lituanie, le Luxembourg, la Lettonie, Malte, la Pologne, la Roumanie, la Suède et la Slovénie.

Enfin la Grèce a reçu de la Commission européenne une lettre de mise en demeure complémentaire pour violation de deux directives : la directive relative à la condition d’accueil et celle relative aux procédures d’asile. La Commission a constaté de graves dysfonctionnements dans le système grec relatifs aux « conditions matérielles d’accueil réservées aux demandeurs d’une protection internationale, dont ceux ayant des besoins particuliers à cet égard et les personnes vulnérables, et des anomalies structurelles affectant le fonctionnement du système de tutelle ou la représentation légale de tous les mineurs non accompagnés pendant la procédure d’asile ».

Face à ce contexte de non-application de la part des Etats membres, il est difficile de pouvoir trouver une solution au niveau européen face à l’afflux massif de réfugiés en Europe. Cette crise migratoire ne peut être résolue que par le biais du droit européen et son non-respect diminue les solutions pour résoudre le problème.

Selon le vice-président de la Commission, Frans Timmermans : « La Commission européenne étant la gardienne des traités, les 40 procédures d’infraction engagées ce jour visent à ce que les États membres mettent effectivement en œuvre ce qu’ils se sont engagés à faire – et engagés à faire pleinement et rapidement. Notre régime d’asile européen commun ne pourra fonctionner que si tous les États membres respectent les règles.» Ce qui a été confirmé par le Commissaire pour la migration et les affaires intérieures Dimitris Avramopoulos qui a affirmé « En Europe, les normes établies d’un commun accord pour l’accueil des demandeurs d’asile doivent être observées par tous. Tous les États membres participants doivent traiter leurs demandes d’asile conformément aux critères et normes communs, auxquels les autorités nationales recourent pour déterminer si une personne a droit à une protection internationale. Il est impératif que les États membres appliquent ces normes et ces critères et s’y conforment tout en témoignant d’un respect constant pour la dignité et les droits fondamentaux des demandeurs d’asile

Emilie Gronelli

Pour en savoir plus

     -. Procédure d’infraction-septembre 2015europa.eu/rapid/press-release_MEMO-15-5657_fr.pdf

     -. Directive 2011/95/UE concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection

http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2011:337:0009:0026:fr:PDF

      -. Directive 2013/32/UE relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale

http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32013L0032&from=FR

      -. Directive 2013/33/UE établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale

http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=celex:32013L0033

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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