Lors du Conseil JAI qui s’est réuni au Luxembourg, le 8 et le 9 octobre 2015, l’immigration a été le principal objet de discussion entre les ministres de la Justices et les ministres des Affaires Intérieures des pays de l’UE. Malgré cela ces derniers se sont concertés aussi sur la question de la sécurité intérieure, notamment pour ce qui concerne la lutte contre la grande criminalité organisée et la lutte contre le terrorisme.
Malgré la gravité de la crise migratoire actuelle et les défis auxquels l’UE a dû faire face ces derniers mois, il ne faut pas oublier que la menace terroriste est toujours d’actualité et que la lutte contre la grande criminalité est un problème auquel les Etats européens font face tous les jours.
Lors de la réunion du jeudi 8 octobre dernier les ministres européens du Conseil JAI ont convenu que, face à la crise migratoire actuelle, l’UE a besoin d’agir à travers la création de règles et d’actions communes pour les États membres. Le débat sur la crise migratoire a donc aboutit à des résultats concrets : les ministres se sont mis d’accord sur une future gestion des frontières extérieures à travers le renforcement du rôle et de la capacité de Frontex, sur la politique de retour, sur la politique des VISA et sur la question de la relocalisation de 160.000 personnes.
Malgré l’importance de cette question, les ministres ont consacré une grande partie de leur réunion pour discuter de l’action européenne concernant la sécurité intérieure.
La première question abordée lors de cette réunion est la lutte contre le crime international organisé : à de cette occasion Europol a présenté les résultats obtenus dans la coordination des Etats dans la lutte contre la criminalité organisée et en particulier lors de l’ « Opération Blue Amber ». Coordonnés par Europol, 33 pays dans le monde, dont 28 pays de l’UE, ont coopéré entre le 4 mai et le 24 juin 2015 pour combattre différents groupes faisant partie de la criminalité organisée et le trafic de drogue, d’armes, de véhicules volés et d’êtres humains. Cette opération a aboutit à un grand nombre d’arrestations dans 160 endroits dans le monde avec la saisie de 600 véhicules, de 1300 tonnes de métal et de 7 tonnes de drogues dont 2, 8 tonnes de cocaïne.
Cette question a été ensuite approfondie avec l’exposé d’un cas particulier de criminalité organisées de la part du ministre de l’Intérieur belge, Jam Jambon, qui a exprimé ces préoccupations à l’égard de la montée de la violence entre des gangs de motards sur le territoire belge, en particulier à la frontière avec l’Allemagne et les Pays-Bas. A cela les ministres européens ont montré leur volonté de renforcer la coopération transfrontalière et ont engagé des pistes de réflexion pour la lutte des la criminalité organisée.
La deuxième question affrontée par le Conseil JAI le 8 octobre a été la lutte contre le terrorisme. Pour ce qui concerne ce dossier les ministres ont décidé d’adopter 13 conclusions visant la lutte contre le trafic illicite d’armes à feu dans le contexte de la Stratégie européenne concernant la Sécurité interne pour la période 2015-2020 et des récentes attaques terroristes dont l’attentat à Charlie Hebdo à Paris, l’attentat au Musée Juif de Bruxelles ou l’attentat avorté du Thalys.
Ces conclusions invitent les Etats membres à coopérer pour lutter contre le trafic d’armes illicites, notamment avec l’échange d’informations entre Interpol et Europol, la surveillance , la coopération transfrontalière et l’échange d’information par le biais des bases de données dans les enquêtes. La Commission devra proposer, pour le début de l’année 2016, une révision de la directive des armes à feu 91/477 de 1991 pour renforcer la législation sur les armes à feu.
De plus, la Commission est invitée à proposer, avant la fin de l’année 2015, « un règlement d’exécution de normes techniques de désactivation des armes à feu » a précisé Etienne Schneider, ministre luxembourgeois de l’Intérieur, lors de la Conférence de Presse.
Dans ce cadre, Gilles de Kerchove, coordinateur de l’UE pour la lutte contre le terrorisme, a fait le point sur l’activité de l’Union dans ce domaine suite à la Déclaration du Conseil européen du 12 février 2015 en soulignant le progrès en la matière et le Conseil a approuvé 5 mesures prioritaires à mettre en place avant la fin de 2015.
Ces mesures concernent :
- L’opérationnalisation des indicateurs de risque commun par FRONTEX
- Le renforcement de l’utilisation des bases de données aux frontières pour surveiller les déplacements des combattants étrangers
- Le renforcement de l’échange d’informations à travers l’action de Europol
- La lutte contre la radicalisation sur Internet
- La coopération avec les pays tiers dans la politique de contre-terrorisme
La sûreté des transports ferroviaires a aussi été discutée : les ministres ont convenu sur la nécessité de recourir à une approche adaptée et proportionnée à la menace terroriste tout en préservant la facilité d’accès à ce moyen de transport. La Commission a d’ailleurs annoncé sa volonté de lancer une étude sur la sécurité ferroviaire qui prendra en compte aussi les aspects sociaux, économiques et légaux.
La sécurité intérieure de l’UE est donc toujours au centre des politiques européennes et la volonté d’une action commune est évidente. Cela est d’autant plus évident que le vendredi 9 octobre les ministres de la justice ont approuvé la position du Conseil sur le projet de directive sur la protection des données personnelles qui est en négociation au trilogue avec la Commission et le Parlement européen.
Cette directive a comme but la protection des données personnelles pour la prévention, l’investigation, la détection ou la poursuite dans le cadre de crime ou délit qui sont une menace pour la sécurité interne : cela vise donc à améliorer la coopération judiciaire et policière avec la simplification de l’échange de données personnelles entre les autorités judicaires dans l’Union européenne tout en assurant le renforcement de la confiance mutuelle.
Malgré cet aspect évident on peut constater que la crise migratoire (cf. autres articles de Eulogos)a pris le dessus sur l’aspect sécuritaire de l’Union européenne et que malgré la nécessité d’agir dans ce domaine la politique européenne suit souvent la vague de l’actualité et s’adapte à celle-ci.
Emilie Gronelli
Pour en savoir plus
– . Conférence Presse Conseil JAI du 8 octobre 2015 http://tvnewsroom.consilium.europa.eu/event/justice-and-home-affairs-council-october-2015/final-press-conference-part-114
-. Council conclusions on strengthening the use of means of fighting trafficking of firearms http://www.consilium.europa.eu/en/press/press-releases/2015/10/08-jha-fighting-trafficking-firearms/
-. Data protection for police and judicial cooperation in criminal matters: Council ready for talks with EP http://www.consilium.europa.eu/press-releases-pdf/2015/10/40802203348_en_635799894000000000.pdf