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Obama à Londres : un véritable encouragement au maintien du Royaume Uni en Europe ou le début de la fin de la ‘relation spéciale’ ?

La récente visite du Président Obama en Angleterre, dans le cadre du tour officiel qui a lieu autour de l’Europe et du Moyen-Orient, a soulevé la question géopolitique de l’importance des conséquences de l’après referendum du 23 Juin. Jeudi dernier le président Américain, rentrant à Londres après sa visite officielle de l’Arabie Saoudite, a déclaré explicitement qu’il était de l’intérêt des Etats-Unis que le Royaume-Uni reste au sein de l’Union européenne à 28, tout en ajoutant que les électeurs britanniques étaient libres de leur choix.

« Je crois qu’un poète britannique a dit: ‘Personne n’est une île’, même une île tellement belle comme celle-ci » a déclaré le Président, faisant référence au poème de John Donne, écrivain contemporain de Shakespeare. Avec les limites imposées par la tradition présidentielle de ne pas donner des déclarations trop intrusives dans les affaires internes des autres pays, Barak Obama a donné celle qui a été définie par son staff comme une ‘simple déclaration d’opinion à la presse’. Et pourtant, cette simple déclaration n’a certainement pas été reçue comme telle par les politiciens britanniques, à l’exception de David Cameron. De son coté, le premier ministre et partisan du maintien de son Pays dans l’UE, a bien su rallier le charismatique Obama dans le camp de « Britain Stronger in Europe ». Le Président américain a bien confirmé sa position en faveur du maintien du Royaume Uni dans l’Union, non seulement dans l’intérêt des citoyens britanniques et européens, mais aussi pour préserver l’ordre global, particulièrement fragile de nos jours.

Samedi, lors de la conférence conjointe avec le premier ministre britannique, Obama a essayé d’atténuer sa déclaration précédente, en précisant que: « Les électeurs britanniques doivent décider pour eux-mêmes, mais, en tant que partie de notre ‘relation spéciale’ et de notre amitié, je vais être honnête et vous communiquer ce que je pense ». Selon Ben Rhodes, le conseiller à la sécurité nationale adjoint de la Maison Blanche, le souhait présidentiel d’une Europe unie doit être regardé dans le cadre « des expressions amicales » adressées de Washington à Londres. Mais elles ont étés reçues différemment dans la capitale britannique, à l’exception des formalités échangées avec la royauté anglaise, comme souligné par l’éditeur en chef du journal Majesty, Joe Little : « Ces [deux rencontres] sont des réunions entre amis de longue date ». Disons que les apparences ont été préservées avec une bonne dose de flatterie, d’ailleurs Obama est allé jusqu’à argumenter que le détachement de la Grande Bretagne de l’UE serait nocif, pas seulement pour les citoyens britanniques, mais aussi pour les américains, car « la sortie du Royaume-Uni serait contraire aux intérêts nationaux des Etats-Unis, en menaçant la stabilité et la prospérité de l’Occident en ce moment d’inquiétudes». En reconnaissant que rendre sa position manifeste constitue un exercice de démocratie, et non pas une menace d’intrusion dans la politique britannique, il a remercié la reine Elizabeth II pour être une ‘source d’inspiration’.

S’il est vrai que le charisme du Président a beaucoup d’effet parmi les ‘millenials’, il n’est pas autant le cas pour la société anglaise considérée dans sa globalité. Selon un sondage réalisé par YouGov pour le site de droite CapX / UK, la plupart (51%) des britanniques pensent que l’intervention anti-Brexit d’Obama a comme but de faciliter les relations extérieures des Etats-Unis avec un seul bloc européen. Notons encore, les 24% croient que le Président a comme intérêt la stabilité globale, alors que les 14% estiment qu’il s’agit d’une stratégie dans l’intérêt de Cameron. Seulement 4% des britanniques voient dans la position d’Obama un vrai souci pour le destin et le bien-être du Royaume. Sur le même site, le récit du week-end a été titré comme « Time for America to lead again in Europe », tout en soulignant l’imposant rôle américain, d’une façon similaire au reste de la presse tabloïd anglaise. Il semblerait qu’on assiste au coucher de soleil sur la ‘relation spéciale’ transatlantique, même si les deux représentants poursuivent la vielle narration des faits. Si Obama a déclaré vouloir à son coté le premier ministre britannique dans les discussions des décisions capitales, surtout en ce qui concerne la sécurité globale et dans le cadre de l’OTAN, mais il est très clair qu’en dehors de l’UE, la Grande-Bretagne ne sera plus dans une position privilégiée. « Le Royaume Uni va être le dernier de la queue » a-t-il précisé, « Je pense que l’on peut envisager un accord commercial US-UK, mais il ne verra pas le jour de si tôt ».

L’idée de l’existence d’une relation spéciale entre la Grande Bretagne et les États Unis existe depuis l’entre deux guerres et a été renforcée dans l’esprit de ceux qui étudiaient les relations internationales et de ceux qui en faisaient leur métier. A vrai dire le début du processus d’intégration européenne, l’existence d’une telle préférence a toujours était mise en avant par le Royaume-Uni comme la « limite naturelle » du potentiel d’engagement dans la cohésion autour du projet européen. Selon Winston Churchill, la vision globale des relations externes de son pays était organisée par cercles concentriques, au centre desquels on trouva le gouvernement de la Grande-Bretagne. Autour de l’île, on avait d’abord le petit cercle des relations à l’intérieur du Commonwealth, à suivre la bonne entente avec les Etats-Unis, et, seulement à la fin, le cercle des relations avec le continent européen.

La visite d’Obama a pourtant fait un grand bruit dans les medias, surtout en raison de la féroce critique des eurosceptiques pro-Brexit, accompagnée à la fois d’une contrariété plus mitigée des partisans du maintien, qui n’ont pas digéré l’intrusion dans les affaires internes. En pole position on trouve le maire de Londres et leader du mouvement « Vote Leave », Boris Johnson, qui, depuis les colonnes du The Sun, a attaqué le président américain, qui, dans son opinion, n’aurait jamais eu à cœur la GrandeBretagne. Selon Johnson, l’intérêt purement américain d’Obama est visible dans le fait qu’il a déplacé le buste de Churchill du Bureau Ovale. Bien qu’Obama aie toujours répondu a ce sujet en tant que premier président afro-américain, il l’avait substitué avec le buste de l’activiste des droits civils Martin Luther King (et que le buste de Churchill a été déplacé en face de son bureau personnel dans la résidence de la Maison Blanche), Johnson a insisté sur cette saga jusqu’à affirmer que l’attitude du Président à l’égard de la Grande-Bretagne se fonde sur la partie Kényanne des origines du Président et sur son ‘aversion ancestrale à l’Empire Britannique’.

Dans l’incertitude qui concerne le referendum du 23 juin, à l’heure actuelle on peut estimer que, même si les sondages voient encore les deux positions du « rester dans l’Union » ou « sortir de l’Union » au coude à coude, l’opposition manifeste de l’administration Obama va jouer un rôle important, dans la mesure où on ne pourrait plus imaginer une relation spéciale au lendemain d’un Brexit éventuel. Dans la campagne pro-Brexit, un des points majeurs a toujours été la vision d’un accord commercial pour surmonter les pertes à la suite de l’abandon du Marché Unique, un scénario qui n’est clairement plus envisageable. Et encore, l’idée de jouer un rôle de pivot dans la coopération transatlantique n’est pas probable, surtout à la suite des critiques américaines envers Cameron pour l’absence d’un engagement majeur dans la gestion des flux migratoires, sans oublier le fait que, selon la vision américaine, en tant que membre de l’OTAN, Cameron a tourné son regard ailleurs après l’intervention de l’OTAN en Libye en 2011.

Dans une concertation à deux chez Cameron, au 10 de Downing Street, le principe d’une future entente a été convenu au sujet d’un plan commun pour la libération de Mossoul, dans l’Iraq du Nord, où Daech est en contrôle depuis deux ans, mais cela reste une initiative limitée dans la stratégie d’Obama, à évaluer après le prochaines rencontres officielles que le président a prévu pour l’étape allemande de son tour. Le Président sera réuni auprès des leaders européens tels que la Chancelière allemande Angela Merkel, le Premier Ministre italien Matteo Renzi et le Président français François Hollande. Cameron, étant également partie de ce sommet, aura encore une fois en charge la défense de son mandat de renforcement de la position britannique dans le consortium international, pour montrer, encore une fois, qu’ en dehors de l’Union il y aura peu de « spécialité » dans l’échiquier global.

Francesca Sanna

Pour en savoir plus:

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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