#LaRéplique: L’instrumentalisation d’un discours nationaliste par le parti social démocrate roumain au détriment de la consolidation de l’état de droit

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Le 11 décembre 2016 ont eu lieu les élections législatives en Roumanie pour élire la VIIIème législature du Parlement roumain. Hormis la large victoire du Parti Social-Démocrate (PSD) dirigé par L. Dragnea avec 45%, ce qu’il ressort de ces élections est, d’une part, la faible participation des citoyens roumains. Selon R. Coman, professeur à l’Université libre de Bruxelles et directrice de l’Institut des études européennes, l’électorat roumain a été représenté, dans sa majorité, par des retraités et des personnes issues du milieu rural. Les grands absents ont été surtout les jeunes. Ainsi, lors de sa campagne, le PSD a utilisé, entre autres, un discours populiste, méprisant lois nationales et institutions publiques, afin d’obtenir un maximum de voix. Le parti a par exemple proposé une disparition du taux d’impôts comme solution aux problèmes économiques du pays. Les roumains ont ainsi préféré accorder leurs voix à un parti leur promettant une meilleure retraite et une réduction d’impôts –ou plutôt une disparition d’impôt en l’espèce ; une promesse qui leur avait été pourtant déjà faite il y a quatre ans par le PSD.

D’autre part, durant la campagne, la corruption a été un thème central. En effet, depuis novembre 2015, le pays est administré par un gouvernement de transition dirigé par D. Ciolos, ancien commissaire européen de l’agriculture. Son prédécesseur était V. Ponta, membre du PSD. Cependant, en raison d’un incendie d’une discothèque causant 64 morts en novembre 2015 à Bucarest, ce drame a mis en relief une affaire de corruption des autorités locales ainsi que des manquements à la règlementation nationale. Par conséquent, le premier ministre social-démocrate, V. Ponta, démissionna sous la pression de fortes protestations populaires. D’autant plus, que celui-ci avait été accusé par la justice de complicité d’évasion fiscale et de blanchiment d’argent de 2007 à 2011.

Par ailleurs, le président du parti, L. Dragnea a exprimé son souhait de se présenter au poste de premier ministre malgré une condamnation à deux ans de prison avec sursis pour fraude électorale. Or, selon une loi pénale roumaine de 2001, toute personne ayant fait l’objet de condamnation ne peut se présenter au poste de ministre. Par conséquent, si cette loi est correctement appliquée, l’ancien premier ministre devrait être inéligible, ce qui vaudrait également pour V. Ponta. C’est ce que prétend le président roumain, K. Iohannis, en refusant de nommer L. Dragnea au poste de premier ministre en raison de sa condamnation. Cependant, en matière de justice, le PSD a fait part de sa volonté de réformer le code pénal dans le but de protéger les personnes accusées de corruption, un aspect portant préjudice à l’état de droit.

A travers sa campagne, le PSD a fait valoir un discours nationaliste, au détriment d’une consolidation de l’état de droit, réussissant ainsi à renforcer sa position au sein du Parlement roumain. Il a affirmé que la formation du nouveau gouvernement se ferait aux côtés de l’Alliance des Libéraux et Démocrates et que le nom du premier ministre serait connu suite à l’investiture du nouveau Parlement, c’est-à-dire le 19 décembre.

Avant la victoire du PSD aux élections législatives, celui-ci méconnaissait certaines lois nationales – en particulier en matière pénale – et institutions publiques. En effet, comme le relève N. DAN, leader du parti l’Union Sauvez la Roumanie (USR), « à Bucarest où le PSD a pris le pouvoir il y a six mois, les conseillers municipaux, qui ont été élus par les citoyens donc, n’ont plus accès aux contrats qui sont signés par la mairie pour des travaux publics. » Par conséquent, suite à la victoire du parti, il est primordial de préserver les institutions publiques telle que la direction nationale anticorruption au regard de la forte présence de corruption en Roumanie.

Enfin, contrairement à ses voisins limitrophes, la Roumanie ne connait pas de forte présence d’extrémisme au sein du pays. Effectivement, B. Manole fait remarquer à juste titre qu’en Roumanie « le vote pour l’extrême droite n’a jamais rencontré un grand succès ». En effet, ils n’ont pas passé le seuil des 5% pour entrer au Parlement lors de ces élections législatives. C’est pourquoi, il est nécessaire que le pays conserve l’orientation pro-européenne et pro-occidentale, en ayant un vrai PSD et non un « parti déguisé » derrière des propos populistes.

Kristell Prigent

Bibliographie et Pour en savoir plus :

– Entretien de R. COMAN, professeur à l’Université libre de Bruxelles et directrice de l’Institut d’études européennes, 12 décembre 2016. URL : http://fr.radiovaticana.va/news/2016/12/10/roumanie__le_parti_social-d%C3%A9mocrate_favori_des_%C3%A9lections_l%C3%A9gislatives/1278054.

– B. MANOLE, La radicalisation politique: Loin des yeux politiques, près du cœur populaire, Le Sursaut. URL : http://lesursaut.fr/roumanie/.

Presse international :

– Courrier international, Faible participation et victoire écrasante de la gauche, 12 décembre 2016. URL : http://www.courrierinternational.com/revue-de-presse/roumanie-faible-participation-et-victoire-ecrasante-de-la-gauche.

Presse européenne :

– Euro topics, 13 décembre 2016. URL : https://www.eurotopics.net/fr/170729/roumanie-le-come-back-du-parti-de-victor-ponta?zitat=171061.

Presse nationale :

– M. UDRESCU, Roumanie: “L’idée qu’indifféremment des partis au pouvoir rien ne changera a été incrustée dans l’esprit des gens”, La Libre, 13 décembre 2016. URL : http://www.lalibre.be/actu/international/roumanie-l-idee-qu-indifferemment-des-partis-au-pouvoir-rien-ne-changera-a-ete-incrustee-dans-l-esprit-des-gens-584ffbdbcd70bb41f08e4546.

– M. BRAN, En Roumanie, les électeurs désabusés avant les législatives sous le signe de la corruption, Le Monde, 9 décembre 2016. URL : http://www.lemonde.fr/europe/article/2016/12/09/en-roumanie-les-electeurs-desabuses-avant-des-legislatives-sous-le-signe-de-la-corruption_5046238_3214.html.

– Le Monde, Le premier ministre roumain démissionne après l’incendie de la discothèque de Bucarest, 4 novembre 2015. URL : http://www.lemonde.fr/europe/article/2015/11/04/le-premier-ministre-roumain-demissionne-apres-l-incendie-de-la-discotheque-de-bucarest_4802832_3214.html.

 

 

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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