You are currently viewing Compte rendu de la Rencontre citoyenne

Compte rendu de la Rencontre citoyenne

Thème : un budget pour les Européen.ne.s ?

La Plateforme citoyenne européenne (ECP) organisait le mardi 19 décembre de 12h à 14h au Press Club, rue Froissart à Bruxelles une rencontre citoyenne. L’objectif de cette rencontre était de discuter sur l’enjeu du budget européen, à l’heure où les négociations pour l’adoption du futur cadre financier pluriannuel 2021-2027, sont au cœur de l’actualité. 

En effet, en mai 2018, la Commission adoptait ses propositions de budget pour 2021-2027. https://ec.europa.eu/commission/sites/beta-political/files/communication-euco-mff-oct2019_fr.pdf

A total inchangé (1,11% du PIB des 27), elles avancent des réponses communes aux nouveaux défis que l’Union doit affronter : climat et environnement, emploi et compétitivité, sécurité et défense, frontières et migration. Mais sont-elles adéquates et assez ambitieuses, sachant que ce sont le Conseil et le Parlement européen qui décident ? Il s’agit d’un enjeu essentiel pour la capacité de l’Union à résister aux crises à venir et à assumer sa place dans le monde, c’est pourquoi il nous a semblé essentiel d’en discuter aujourd’hui. Pour animer le débat, un questionnaire a également été soumis aux participants et est disponible en ligne sur le site de la plateforme. 

La taille du budget 

La modératrice, Elena Marrez, travaille à la DG budget qui est en charge des négociations pour le cadre pluriannuel 2021-2027. Elle introduit la séance par une courte présentation sur le budget afin d’en expliquer la taille, ses priorités actuelles et pour les années qui viennent. Elle explique tout d’abord que le budget européen ne pèse qu’un peu plus de 1% de l’économie de l’ensemble des Etats membres, ce qui n’est pas très élevé.. Cependant dit la modératrice, même ce 1% de budget peut, quand même, générer beaucoup d’effets et de valeur ajoutée, car il s’agit surtout d’un budget « d’investissements ». 

Elle explique que budget européen n’a pas pour objet le paiement des pensions des citoyens ou les indemnités pour les chômeurs. Le budget européen se focalise uniquement sur des investissements, que ce soit dans le domaine de la recherche, dans les infrastructures, la mobilité et les transports, ou encore les programmes d’échanges et de mobilité des jeunes (Erasmus) et les subsides pour les agriculteurs. Grâce à cela, et malgré son montant peu élevé, le budget européen peut donc générer beaucoup d’effets dans les différentes régions et Etats membres de l’UE. 

Elle ajoute que, comme l’a dit à plusieurs reprises l’ancien président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, le bénéfice pour chaque citoyen d’appartenir à l’Europe et au marché unique lui coûte moins que le prix d’un café par jour. Ce sont donc des avantages vastes, pour un coût qui reste minimal. L’UE et ses EM font donc de leur mieux pour qu’avec un budget peu élevé, on puisse faire le plus possible. D’ailleurs, aucune proposition d’augmentation du budget n’a été présentée pour le futur. Les différentes colonnes sur le graphique représentent ainsi la taille des dépenses par période. En effet, il existe des budgets annuels mais tous, entrent dans un cadre financier dit pluriannuel. 

Par ailleurs, elle évoque aussi le fait qu’en raison de la décision du Royaume-Uni de quitter l’UE, il faut maintenant déduire la contribution britannique qui était proportionnelle à son économie et déduire toutes les dépenses qui lui étaient octroyées. A 27 Etats membres, la Commission a proposé un budget à 1,11% du PIB, en intégrant le Fonds européen de développement qui, traditionnellement, était hors budget. 

La proposition de la Commission européenne pour le futur budget à long terme 2021-2027 assure ainsi une relative stabilité en proportion de la richesse des 27, en dépit de ce que prétendent certains pays comme les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Autriche, la Suède. Désormais, c’est aux EM et au Parlement européen (PE) de négocier.  

Un intervenant observe une légère baisse dans les deux dernières colonnes par rapport à la période précédente, et demande si c’est « à cause du Brexit ou s’il y a d’autres raisons ? » 

E. Marrez répond alors qu’il s’agit d’une baisse car la Commission européenne a décidé de proposer un budget se situant entre les deux points de comparaison : certains EM comparaient avec la situation des 28 EM actuels, donc en y incluant l’économie du RU, ce qui donne 1,03% du produit intérieur brut en incluant le FED. La Commission elle considère qu’étant donné que le RU quitte l’UE, il faut comparer avec la situation à 27 EM. On obtient alors 1,16%. Mais étant donné la divergence de points de vue, la Commission a fait une proposition médiane, en tenant compte du Brexit gap. C’est donc à cause du Brexit qu’on diminue un peu. 

Il faut reconnaitre aussi qu’il y a beaucoup de nouvelles priorités, suite au transfert au niveau européen de politiques comme la défense, la migration, le défi climatique. Par rapport à la situation des 28 EM, il faut quand même une augmentation pour couvrir le soi-disant Brexit Gap. Mais la Commission a décidé de modérer cette augmentation. 

La valeur ajoutée européenne, hors budget

Un autre intervenant dit alors qu’un budget de l’UE à 1,11%, si on tient compte du cofinancement, a un impact supérieur, de l’ordre de 2% ou 1,7% du PIB. La DG budgétaire a produit des chiffres qui sont intéressant, notamment par rapport à la place du Royaume Uni, et par rapport à la place finalement des Pays-Bas et d’autres EM qui parlent au nom d’une soi-disant contribution nette. Il semblerait que les chiffres de la DG BUDGET montrent que les contributeurs nets (Pays Bas et autres) profitent plus que ce qu’ils ne contribuent en réalité et qu’au contraire, ils sont ceux qui profitent le plus du marché unique, en raison des bénéfices liés à la circulation des marchandises, de la main d’œuvre etc. 

Selon lui, même si ce n’est pas budgétaire, il serait possible de calculer ou d’estimer les avantages au-delà des dépenses directes comme l’appartenance au marché unique, le fait que les étudiants peuvent dépasser les frontières, etc. Les études qui existent sur le sujet montrent que les avantages d’être un EM de l’UE sont beaucoup plus vastes que le simple retour sur le budget européen.

Il ajoute ensuite qu’aujourd’hui, il y a 500 000 Grecs qui ont été éduqués par la société grecque, mais qui malheureusement sont allés travailler essentiellement dans les pays plus développés. Si on estime le cout d’éducation d’un diplômé, c’est environ 250 millions d’euros. L’apport de cette main d’œuvre qui n’a pas été financé dans le pays d’arrivée, on pourrait très bien l’estimer, ainsi que l’apport en termes de retraite. Il pense donc que la Commission devrait se battre contre la perspective purement comptable et parler en termes économiques ; cela permettrait d’empêcher certains EM de faire donneurs de leçons, comme s’ils prenaient de leur poche pour donner par charité.

E. Marrez répond alors en disant que c’est un bon point mais cela ne dispense de discuter sur la taille du budget où les EM et le PE doivent trouver un accord. Elle regrette de ne pas avoir rajouté des chiffres là-dessus parce qu’il est clair qu’il faut argumenter et montrer l’impact de l’Europe (les externalités positives). Il existe beaucoup d’études sur ce sujet mais, ce ne sont que des estimations, que sous-tendent de nombreuses hypothèses et des nuances méthodologiques (le taux de cofinancement varie selon les programmes, le taux d’absorption varie selon les régions, etc). Au niveau de la comptabilité, c’est plus facile de dire si c’est correct ou non. 

Une autre intervenante observe que la Commission depuis longtemps parle du bénéfice économique réel (la « valeur ajoutée de l’UE ») par rapport aux calculs de redistribution et de « juste retour » et essaye de produire des chiffres mais ça ne trouve pas sa place dans un débat budgétaire qui est vraiment fermé.

Un autre intervenant regrette qu’il n’y ait pas un président de la Commission européenne pour dire qu’on mobilise 2% du PIB et expliquer, en raison de son autorité morale et politique qu’il ne comprend pas que les Pays-Bas ou l’Allemagne taisent les nombreux avantages de l’UE qui, en réalité, ne sont pas comptabilisés dans ces calculs budgétaires.  

La modératrice reconnait effectivement qu’il ne le mentionne mais il ne le quantifie pas, et qu’on devrait le faire davantage. Récemment, il y a eu dans la presse, surtout en Allemagne et au Pays-Bas, toute une discussion concernant le niveau des dépenses européennes : la question était de savoir si ces pays devraient payer et avoir une augmentation de leur contribution dans les années qui viennent. Sur ce sujet, le Commissaire et le Directeur général à la DG budget ont réagi quand même, immédiatement.

Le même intervenant ajoute qu’il ne dit pas ça par amour des chiffres, mais simplement, parce que les détracteurs de l’UE prétendent que cela ne compte pas. Or, ce 1% de budget génère des gains économiques substantiels, sinon le PIB de l’UE n’aurait pas pu être aussi élevé. Et d’autre part le 1% n’est pas 1%, il est à 1,8% et génère des investissements qui n’auraient pas pu avoir lieu si l’UE n’était pas intervenue à un niveau qui assure la rentabilité. Il souligne aussi que le plan Juncker de 2015 a mobilisé environ 400 milliards d’investissements, basés sur 7 milliards de garanties du budget. Pourquoi ne pas refaire ça ? 

La modératrice répond alors que là, c’est encore différent, car il s’agit d’instruments financiers. Pour les instruments financiers, elle explique qu’effectivement, il s’agit de financer une garantie et puis une banque comme la Banque européenne d’investissement (BEI) peut accorder des prêts. Donc l’impact est beaucoup plus vaste que le montant de la garantie. Mais pour des subsides, il est difficile de dire que quand on donne une subvention de 50 euros, on a un impact de 100 euros, c’est moins évident que pour les instruments financiers. Elle en conclut donc qu’il est parfois difficile de communiquer certaines données parce qu’on ne veut pas heurter les Etats membres. 

La composition du budget

La modératrice montre ensuite les priorités du budget dans le montant global. Pour résumer, le budget de long terme est toujours défini par rubriques. Pour le prochain cadre financier pluriannuel, il y a 7 rubriques. Les plus grandes sont les rubriques sont la 2 et la 3. La rubrique 2 représente la cohésion : il s’agit d’investissements dans les régions et pour les citoyens. En général il s’agit de projets d’infrastructures, de formation professionnelle pour les chômeurs etc. La rubrique 3 représente les ressources naturelles : il s’agit de tout ce qui concerne le secteur de l’agriculture, la protection de la diversité, de l’environnement etc… ainsi que la pêche. 

En dehors de ces deux rubriques, les grandes priorités identifiées pour l’UE actuelle et pour l’avenir sont : la recherche, l’intelligence artificielle et la digitalisation, l’emploi mais aussi les questions de migrations, les questions sociales. La défense et la sécurité de nos frontières est une autre priorité pour notre continent qui n’est pas comme les Etats-Unis qui ont l’avantage de n’avoir que 2 frontières avec le Canada et le Mexique. Le continent européen est quant à lui « au milieu» de populations qui sont confrontées à des guerres civiles. Il faut donc pouvoir trouver une solution et que les EM se mettre d’accord sur ce qu’ils sont capables de faire ensemble. Mais il faut une solution au niveau européen, car c’est impossible que chaque EM décide par lui-même ce qu’il est prêt à faire ou non et, dès lors, cette question est une priorité dans le budget pour les années qui viennent. 

Pour résumer, en regroupant les différentes priorités, elle fait remarquer que dans le passé, dans les années 60 jusqu’aux années 80, le budget agriculture était le plus important dans le budget européen. Aujourd’hui, ce budget a diminué en termes relatifs et à partir de 2021, c’est la première fois que les autres priorités, appelés les priorités nouvelles et renforcées, pèseront plus que le budget agriculture et pêche et le budget cohésion. Cela montre donc l’UE tient compte, dans ses propositions de futur budget, de ce que les citoyens ont demandé, comme plus d’investissement dans le climat, dans la défense, en faveur de l’intelligence artificielle etc. C’est pour cela que, pour compenser ces nouvelles dépenses, il fallait faire une toute petite réduction des budgets agriculture et cohésion

Un intervenant travaillant au Comité des régions dit alors qu’il a un problème avec la notion de nouvelles priorités, parce que la politique de cohésion finance pour l’essentiel des choses tout à fait modernes, notamment avec un fléchage entre 25 et 30% des dépenses sur le climat et l’environnement mais aussi tout ce qui est dans le domaine de la formation professionnelle, via le fonds social européen notamment. Il a donc beaucoup de mal à comprendre comment la Commission peut embrasser ce discours de politique ancienne et moderne. Sur l’agriculture, on comprend que la proportion est importante parce qu’il s’agit de la seule politique qu’on a communautarisée. Par rapport au changement climatique, l’agriculture contribue aussi beaucoup.  

Un autre intervenant ajoute que, pour lui, c’est un choix citoyen, et qu’il faut partager la responsabilité entre les acteurs, et être responsable si on a un discours qui veut protéger la biodiversité. Il y a un réveil sur l’exigence citoyenne de qualité, et la priorité est désormais donnée au secteur primaire qu’est l’agriculture. Cependant, cette exigence ne va pas être prise en charge par le budget européen, elle doit l’être ailleurs. Pour lui, il faut que les citoyens soient responsables même si une partie sont en situation de pauvreté, car ça n’occulte pas qu’un pouvoir d’achat puisse être consacré à la préservation de l’environnement et de la biodiversité.  

Le précédent intervenant dit qu’il considère comme fallacieux d’évoquer les questions du transport et du rail en les présentant comme une politique traditionnelle. Mais la modératrice dit qu’elle n’est pas d’accord car par exemple, le « Connect Europe Facility » rentre dans ce cadre. Mais un autre intervenant rétorque alors que cette segmentation fait quand même l’affaire des contributeurs nets, c’est le problème des rubriques. 

Une autre question est posée sur la baisse pour les fonds structurels. Elle concerne « la flexibilité », c’est-à-dire lorsqu’il y a de l’argent qui va à la Grèce ou la Roumanie par exemple mais que ces pays n’arrivent pas à consommer ces fonds, et à les investir. Il faudrait peut-être envisager une nouvelle méthode pour la politique de cohésion pour pouvoir consommer et améliorer la capacité d’absorption des pays ou de certaines régions. Car les fonds que certains pays n’absorbent pas pourraient peut-être aller dans des pays qui peuvent les absorber, car pour l’instant, ils sont inutilisés. 

La modératrice souligne que toutes les régions sont éligibles pour les investissements cohésion et qu’on essaye d’améliorer leur capacité à investir et à absorber. Mais on ne va pas diminuer leur budget parce qu’il y a des critères objectifs. Elle souligne ensuite les éléments nouveaux dans ce budget, comme, par exemple, la rubrique défense qui n’existait pas avant. Il y a donc la défense, la digitalisation, l’intelligence artificielle etc. Elle évite de dire « ancienne » pour désigner la rubrique cohésion et agriculture, parce qu’elle n’aime pas ce mot non plus. Toutefois, par-là, on veut simplement faire la distinction entre d’une part, les politiques qui existaient déjà avant et, d’autre part, les politiques qui sont vraiment nouvelles et qui n’existaient pas avant, mais qu’à la fois les citoyens et les EM estimaient devoir commencer à traiter au niveau européen. Donc elle comprend que, lorsqu’on parle de « nouveau », on a immédiatement en tête par opposition que les autres politiques sont « anciennes ou démodées » mais elle explique que ce n’est pas le cas, et ce n’est pas ça l’objectif de communication, même si elle comprend bien le problème. 

Pour revenir sur la défense, en prix constants 2018, elle représente 17 milliards, tandis que le programme Europe Numérique représente quant à lui 8 milliards sur les 7 années du Cadre. Les 13 milliards qu’il reste, c’est pour le « Fonds européen de défense » en prix constants mais quand on parle défense, il faut à la fois regarder le Fonds européen de défense mais aussi la mobilité militaire. » 

Un autre intervenant demande de quoi il s’agit lorsqu’on évoque l’intelligence artificielle. La modératrice dit qu’elle n’a pas le montant, parce que c’est inclus dans le programme de recherche, mais explique que l’IA c’est tout ce qui concerne les robots, les outils qui savent communiquer les uns avec les autres, les thermostats intelligents, les objets connectés etc. En revanche, la 5G, c’est plutôt dans la rubrique de la digitalisation, bien que cela fasse aussi partie de l’objectif Horizon 2020, devenu Horizon Europe

Une autre intervenante pose une autre question, un peu technique : vu qu’on procède pour le changement climatique, à un exercice de screening, et que dans le débat budgétaire, on est un peu toujours esclave des grandes rubriques (avant, c’était l’agriculture, même si elles ont été réaménagées), il est regrettable qu’il n’y a pas une présentation plus raffinée de la contribution des grandes rubriques traditionnelles au changement climatique. 

La modératrice répond qu’effectivement, pour chaque rubrique, il a été décidé de combien elle devrait contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique. La Commission s’est dit qu’au niveau global, 25% du budget devrait être centré sur le climat. Pour la migration et la défense par exemple, on ne peut pas dire que ça contribue à 80% au climat, donc il faut aussi définir pour la cohésion et l’agriculture. Donc effectivement, ça existe, mais je n’ai pas de diapositive avec moi. De tête, la contribution de l’agriculture à la lutte contre le réchauffement climatique est de 40%, et pour la cohésion de 30% (il y a un débat entre 25 et 30%). C’est en débat au niveau du règlement-cadre sur les fonds structurels. Le PE demande 30% tandis que la Commission proposait 25%. Dans chaque rubrique, il y a des sous-rubriques qu’on appelle des « clusters ». Par exemple, dans la rubrique Marché Unique, il y a plusieurs sous-rubriques comme « innovation », ou encore « numérisation ». Dans la nouvelle structure budgétaire, l’objectif est qu’un chapitre budgétaire corresponde à un « cluster ». Mais c’est encore en analyse pour s’assurer qu’il n’y aura pas de problème technique lors du changement de structure, de ligne budgétaire oubliée ou mal transférée par exemple. Dans le 9ème axe, environnement et action pour le climat qui devient un sous chapitre des rubriques, on va retrouver uniquement le programme ciblé sur le climat et l’environnement. Ce sont des projets liés à la protection de la biodiversité qui vont aider certaines forêts, ou bien une aide à une région pour se redévelopper lorsque la nature a été négligée. Ce sont donc des projets ciblés à 100% sur l’environnement et le climat, mais il est vrai que l’action sur le climat est beaucoup plus vaste que ce petit cluster. 

La modératrice souligne par ailleurs que c’est le rôle de la Commission de prendre la température de la société et de proposer quelque chose qui semble équilibré : l’objectif est de se situer entre les points de vue de tous les EM, et le point de vue du PE, en tenant compte des ONG, des associations employés-employeurs (syndicats et patronats), des citoyens etc. La Commission ne peut donc pas proposer le point de vue du PE et négliger le point de vue de tous les autres. C’est toujours tout un débat. 

Un intervenant demande ce qu’il en est au niveau de la conditionnalité pour les pays qui ne respectent pas l’état de droit. Est-ce toujours d’actualité ? La modératrice confirme que c’est toujours dans la proposition, c’est en négociation et d’une façon ou d’une autre, elle pense que ça va finir par exister. Elle précise qu’il faudra une procédure pour l’appliquer, mais souligne que, parfois, le simple fait qu’une telle règle existe suffit à avoir un impact sur le comportement de l’Etat-membre, sans qu’il faille même utiliser la procédure. Dans l’article 7, il n’y a pas de bâton financier derrière. Pour la procédure d’état de droit, il ne faudra pas l’unanimité, mais la majorité qualifiée. Sur le cadre financier pluriannuel (budget de LT), il faut l’unanimité en revanche, donc tout le monde doit être d’accord. Il faut trouver alors quelque chose où tout le monde est un peu mécontent mais peut donner le feu vert : on sait alors qu’on a trouvé un accord équilibré. Depuis 60 ans, ç’est comme ça et c’est la façon dont fonctionne l’Europe. 

Un intervenant pose ensuite une question par rapport au budget précédent : il constate que des rubriques ont été modifiées ou ajoutées, comme la migration par exemple, le voisinage et l’Europe dans le monde, mais il trouve qu’il y a une similitude entre la partie migration et voisinage. Ne serait-ce pas un resaucissonnage de ce qui était fait avant ? Et la deuxième question porte sur l’assistance aux pays en préadhésion qui est regroupée dans la partie voisinage : quelle est sa proportion par rapport à l’action extérieure ?  

La modératrice répond que la rubrique préadhésion diminue peu, tandis que la rubrique « action extérieure », est beaucoup plus vaste que la rubrique préadhésion, c’est 6 fois plus. Il y a environ 13 milliards prévus pour la préadhésion et encore 3 milliards pour l’action extérieure. La «gestion des frontières», c’est encore différent. Au niveau du financement des préadhésions, il s’agit d’une coopération avec certains pays qui sont en préadhésion : politiquement, il a été décidé qu’il n’y n’aura pas de nouvelle adhésion pour 2021, mais ça n’empêche pas de continuer le processus de préparation qui prend des années. Cette année, il y a eu des réunions préparatoires avec les pays comme l’Albanie et la Macédoine du Nord. Ces états doivent faire connaissance avec les autres EM, apprendre et intégrer tout l’acquis communautaire, la législation, et déjà préparer l’indépendance de leur banque centrale, le niveau de l’inflation, et toutes les choses d’autres à faire avant même de commencer les négociations. L’UE continue les actions techniques car on sait qu’à un certain moment, il y aura une décision politique, comme avec l’Albanie. 

Un autre intervenant pose une question en ce qui concerne l’environnement et le réchauffement climatique : il souligne que Mme Von der Leyen a déclaré qu’on allait vers une Europe plus verte, mais se demande comment faire ressortir les investissements verts qui sont répartis dans les différentes politiques de l’UE ? 

Un autre intervenant dit qu’une partie de ce budget pourrait offrir des garanties pour soutenir le Green Deal, comme avec le plan Juncker, ou dans les initiatives de la BEI, qu’on ne financerait pas. La question qu’il pose est donc de savoir si on a une idée des montants en question, et est-ce qu’il y aura un nouveau Green New Deal, et qui va le gérer? 

La modératrice explique que le plan Juncker va être renommé en « Invest EU » qui est un programme par subside et par instrument financier. Le partenaire clef sera la BEI, avec un facteur de multiplication. Donc grâce aux garanties, on va pouvoir générer beaucoup plus en termes d’effets. Ce ne sont pas des subventions. Pour le Green Deal, la communication a été publiée la semaine dernière mais les détails ne sont pas encore connus. C’est prévu pour le mois de janvier. Dans l’enveloppe Invest EU, il est question de se centrer sur des projets verts et sur la lutte contre le réchauffement climatique, mais hors subventions. Cependant, cela n’empêche pas de proposer aussi un volet « subventions ». Mais les détails seront précisés au cours du mois de Janvier.

Un intervenant dit qu’il a l’impression qu’en ce qui concerne le FEDER et la Culture, il y a une tendance à mettre le mot « social » un peu partout comme une sorte de nouveau mainstreaming européen. Il se demande si c’est une tendance aussi pour les autres programmes ? 

La modératrice pense que non, même si elle reconnait que le social est devenu de plus en plus important, notamment avec le Pilier social qui a été adopté en 2017. Donc c’est important, mais ce n’est pas quelque chose qu’on va intégrer dans toute les enveloppes. Dans le budget cohésion et en agriculture, c’est important et ça l’a toujours été. Cela s’illustre au travers du fond social pour la cohésion, et pour l’agriculture, dans tous les projets qui visent au développement rural et qui soutiennent la viabilité des entreprises. Dans l’agriculture, il y a des efforts potentiels à faire. Au niveau du climat, c’est un tout petit programme qui vise uniquement à soutenir les projets en faveur de la protection de la biodiversité, etc. Il est donc difficile d’y inclure l’aspect social. 

Un intervenant souligne, qu’au niveau social, pour lui, c’est le marché unique qui créée des problèmes : quand 500 000 Grecs vont travailler en Europe, les forces productives se déplacent là où elles peuvent être utilisées de façon optimale. C’est tout simplement l’économie de marché. Mais dans un état, il y a des effets de redistribution et d’aides, donc au niveau des retraites, on peut dire que les 500 000 qui n’ont pas payé en Grèce leurs retraites car ils sont partis, les ont payées en Allemagne. Donc au final, ces travailleurs payent pour d’autres populations. Le grand manque, de toute cette histoire au niveau de l’UE, c’est la mise en place par exemple d’une assurance chômage européenne et celle d’un revenu universel de base, question qui est posée à la fois par les libéraux et les marxistes. La modératrice lui souhaite alors beaucoup de chance pour vendre cela aux EM car elle dit que, malheureusement, cela coute très cher. Il reconnait que cela coûte de l’argent, mais souligne que cela en rapporte aussi. Il pense donc que la Commission devrait initier ce débat, car le fonctionnement du marché unique créée des inégalités : si on ne les compense pas, cela signifie qu’un des termes du Traité n’est pas respecté à savoir le mot « social » car on a une économie de marché, mais pas une économie sociale de marché.

La modératrice répond que pour cela, on a déjà le budget cohésion, qui comprend vraiment l’aspect social dedans. Dans le budget de cohésion, 75% des fonds sont consacrés aux régions défavorisées. C’est définis en fonction de la prospérité économique de la région et donc en fonction de ce que les gens gagnent. Par exemple, la région qui perd ces gens-là ne va pas connaitre la prospérité économique de l’autre région qui va bénéficier de ces gens qui arrivent avec des diplômes et des compétences et qui vont travailler, développer des entreprises etc. 

Le budget cohésion permet de maintenir l’activité dans certaines régions et finance des formations aussi. Il y a aussi le Fonds d’ajustement à la Mondialisation (Globalisation Action Fund), qui permet que lorsqu’une région perd une entreprise, à cause de la globalisation, l’EM peut demander un soutien du niveau européen ; comme par exemple, en Belgique, à Gosselies, pour l’entreprise Caterpillar qui a dû fermer là-bas. Le budget européen est intervenu pour aider les gens qui y travaillaient à trouver un autre emploi. Le montant de ce fond est de 150 millions par an, et il est hors du budget. 

En ce qui concerne le « RAL », c’est le reste à liquider. Il s’agit de contrats déjà signés mais qu’on n’a pas encore payés parce que le projet n’a pas encore débloqué tous les fonds. Mais ces fonds sont déjà engagés, il s’agit d’un retard d’exécution. Donc il faudra le payer à un moment dans le futur, mais on ne sait pas encore en quelle année.   

Au niveau du Fonds d’ajustement à la Mondialisation, effectivement on regarde s’il y a des reliquats non utilisés pour financer autre chose avec cet argent. Et s’il n’en reste pas, on peut mobiliser des fonds additionnels, en dehors des plafonds budgétaires : en ce cas, il ne faut pas l’unanimité, c’est une procédure normale. 

Un intervenant avait une question au sujet de la mise en œuvre d’une transition juste, du point de vue social et énergétique. La Commission a présenté le 14 janvier le fonds sur la transition juste. Ce fond doit servir normalement à financer les changements structurels induit par la transition énergétique et autre, par exemple, dans les régions charbonnières ou dans l’industrie automobile. Il a cru comprendre que la Commission parlait d’un volume de 100 milliards d’euros sur 7 ans qui serait basé sur le même mécanisme que le fond « Juncker », c’est-à-dire à  partir de 7,5 milliards de fonds mobilisés par l’UE (hors budget) qui auront un effet levier sur les projets (via les cofinancements, un dispositif spécifique d’Invest EU et les facilités de prêts accordées par la BEI) . Il demande s’il la modératrice peut nous en dire plus à ce sujet. 

La modératrice précise qu’elle n’est pas spécialiste là-dessus, mais elle a bien compris qu’il y aurait un volet avec la BEI. Donc effectivement, il y a des garanties qui génèrent beaucoup plus d’investissements, à travers des prêts et instruments financiers. Mais il a y aussi un volet subventions qui est prévu, donc les 100 milliards auxquels il est fait référence sont probablement la somme globale. Cela apparait un peu comme une redite du plan Juncker, sauf que pour cela, il y aura le fond Invest EU qui a été proposé. Donc on peut supposer qu’ici le Transition Fund viendra le compléter. 

Mais cela soulève quand même plusieurs questions : premièrement, sur l’aspect « duplication » par rapport à ce qui pourrait déjà être engagé avec Invest EU, et en quoi il y a une réelle valeur ajoutée. Et une deuxième interrogation sur le recours de plus en plus systématique aux instruments financiers. Est-ce qu’il s’agit vraiment d’outils appropriés ? Car cela suppose une rentabilité, ainsi que la participation d’acteurs privés. Donc on est plutôt sur des projets à court terme, ne serait-ce pas une raison pour s’inquiéter?

La modératrice pense que non : pour réaliser une transition écologique et juste et sociale, on a besoin d’impliquer beaucoup d’acteurs, notamment privés qui peuvent directement jouer là-dessus. Souvent, les grandes entreprises voudraient diminuer leurs émissions de CO2, mais ça leur coûte trop cher, donc ils ne le font pas. Mais si on leur propose des subventions pour les soutenir sur cette voie, ils le feront. Et il ne faut pas les subsidier à 100% ces grandes entreprises qui n’en ont souvent pas besoin pour diminuer leurs émissions de CO2. C’est dans une logique de soutien aux acteurs privés mais pas uniquement. Il peut aussi s’agir d’une région par exemple qui, suite à la fermeture d’une mine, décide de reconstituer un site pour accueillir rapidement les usines de nouvelles. 

L’intervenant souligne tout de même que le reproche fait à ce type d’instrument purement financier – c’est notamment le reproche fait au plan Juncker – c’est de dire que, de toute façon, les financements sont stratégiques, et donc il faut être volontariste. On ne peut pas demander au privé d’agir pour le bien commun s’il n’a pas de rentabilité : ce sont des choses essentielles mais dont la garantie de rentabilité n’est pas assurée. Et c’est pourquoi il pense qu’effectivement, il ne faut pas utiliser uniquement des investissements financiers mais il faut aussi utiliser des subventions. Cela pourrait s’avérer déterminant. Des instruments comme le plan Juncker permettent de faire plus, compte tenu du budget actuel mais en réalité, c’est une réponse au fait que le budget est insuffisant. Et on recommence aujourd’hui. 

La modératrice dit alors que le plan Juncker n’était pas seulement une réponse à l’insuffisance du budget, mais c’était aussi une réponse à l’état du marché de capitaux à l’époque : à cause de la crise financière, tous les EM étaient sous pression et certains en risque de défaut. Le président Juncker a donc décidé de mettre en place ce plan pour relancer l’investissement, car il fallait absolument des partenaires prêts à prendre des risques. Actuellement, pour le Invest EU et pour le Green Deal, les taux d’intérêts restent bas et il y a une certaine liquidité dans l’économie, donc on n’est pas dans le même marché financier qu’en 2014 et il n’y a pas un problème comme il y a 7 ans pour l’accès au capital. Aujourd’hui, certains types de projets, probablement rentables, sont jugés trop risqués par les banques, soi-disant traditionnelles. Et c’est là que la Commission veut avoir un impact, en finançant des projets qui peuvent être rentables, mais qui sont rejetés par les banques traditionnelles, par peur que ce soit trop risqué. 

L’intervenant rétorque que s’il y a des liquidités, c’est qu’il y a une part non utilisée de l’épargne, en raison de la perte de rentabilité. Cela ne peut être compensé que par l’investissement public et non pas seulement par des incitations financières, pense-t-il. Mais bon c’est un autre débat, et il considère que c’est mieux de faire ça que de ne rien faire du tout après tout.  

Les revenus 

La modératrice propose de s’intéresser un peu aussi au côté revenu. Elle explique alors qu’au niveau du financement du budget européen, les budgets long terme sont fait tous les 7 ans. Mais en revanche, du côté des ressources propres, il n’y a pas de cadre ou de limite dans le temps. Dès que la décision ressources propres est en vigueur, et aussi longtemps qu’on n’y touche pas, elle reste en vigueur. Mais à l’heure actuelle, vu que le RU va nous quitter, et que le plafond dans les ressources propres est fixé en termes de pourcentages du PIB, il y a des changements à faire : en effet, si le RU quitte, le % du PIB de l’UE diminue et le plafond des ressources propres que l’on peut demander aux EM diminue aussi. Cependant, la Commission s’est dit que c’était sans doute le bon moment pour le futur budget LT de l’UE de proposer une petite augmentation du plafond des ressources propres. Et elle ne vise pas seulement à augmenter les revenus pour que ce soit équilibré avec les dépenses, mais elle veut aussi une politique européenne du côté revenu, en ligne avec nos priorités au niveau européen. La Commission a donc proposé l’assiette commune de l’impôt consolidé sur les sociétés, qui est une base comptable sur laquelle serait calculée une contribution des EM, tandis que les deux autres propositions de nouvelles ressources propres était focalisé sur le volet Pacte vert. 

Elle précise également que les ressources sont toujours perçues par les EM, et non pas directement auprès des entreprises, car l’UE n’a pas le droit d’aller collecter des impôts directement chez les citoyens et entreprises. Donc c’est une source de revenu basée sur un marché unique dont les entreprises profitent : l’idée est de baser une partie des revenus au niveau européen sur les avantages que les EM ont à appartenir du Marché unique. Il s’agit donc de demander une contribution des EM en percevant une « taxe » auprès des grandes entreprises présentes sur leur territoire qui bénéficient du marché unique. 

Les deux autres ressources sont basées sur l’aspect climatique, d’un côté, c’est 20% du système d’échanges des quotas d’émissions de CO2, et de l’autre, c’est une contribution fondée sur les déchets d’emballage plastiques non recyclés. A nouveau, ce n’est pas l’UE qui collecte auprès des citoyens et des entreprises mais les EM qui paient une contribution sur base des statistiques collectées et analysées par EUROSTAT, à proportion des déchets plastiques non recyclés qu’ils produisent. Cela devrait les inciter sur le plan national à adopter des règles pour diminuer les déchets plastiques. Si les EM se mettent d’accord, ils seront obligés de le faire. 

Par ailleurs, l’ensemble des revenus ne doit pas excéder les dépenses car ce sont les moyens pour atteindre le niveau de dépenses convenu. Lors des négociations, il apparait que sur les trois propositions, les EM pourraient trouver un accord sur le plastique. Pour les deux autres, elle explique que c’est plus compliqué. Notamment pour la taxe des entreprises, il faut une base commune comptable harmonisée, ce qui nécessite beaucoup de travail et un temps énorme, donc ça sera probablement encore discuté et prévu plus tard. Sur la bourse des émissions de C02 (ETS), c’est compliqué aussi car il s’agit d’un impôt régressif : les EM pauvres qui ont beaucoup d’industries anciennes liées au charbon sont réticents car ils devront beaucoup plus contribuer que les EM riches qui ont déjà en partie fait une transition énergétique. Du coup, des trois propositions, le plastique semble pouvoir survivre aux négociations. 

Un intervenant demande si l’idée est d’utiliser cette nouvelle ressource sur le plastique pour diminuer la partie contribution directe des EM. La modératrice confirme. Elle explique également que les ressources propres comprennent les droits de douanes perçus, comme au port d’Anvers. Il y a un pourcentage de cela qui part au niveau européen. En principe, l’état belge peut garder 20% – bien que la Commission ait proposé de diminuer ce montant à 10% – pour financer les contrôles de douanes, etc. mais les autres 80% vont au budget européen. Ensuite, il y a une contribution des EM sur base de la valeur de la TVA, et en dernier, il y a une contribution basée sur le PIB, qui est la plus grosse en générale, mais elle vient en dernier lieu car on va d’abord regarder combien on obtient avec les ressources propres traditionnelles, la TVA. C’est en dernier ressort qu’on demande aux EM de contribuer sur base de la taille de leur économie, pour venir compléter le budget. 

Une intervenante souligne qu’on a perdu de vue un point important sous l’angle fiscal, c’est le lien qu’il y avait traditionnellement depuis 1968, entre la valeur ajoutée européenne, à savoir l’Union douanière, et le fait qu’il y avait un revenu qui était et qui reste d’emblée et d’office, une vraie ressource propre, dans le sens où elle est due à l’UE. Même si on dédommage et qu’on défraie les EM, ce lien-là a aujourd’hui été perdu. Il y avait une union douanière qui n’existait pas avant, une frontière commune extérieure a été créée et des prélèvements douaniers aux frontières mis en place, qui étaient vraiment liés à l’Union douanière. Ce prélèvement aux frontières générait des revenus qui étaient ceux de l’Union douanière, et de la Communauté européenne. Et ce lien-là, nous ne l’avons plus aujourd’hui. La suppression des barrières douanières entre les EM et la création de l’Union douanière ont créé une réalité nouvelle: c’était une valeur ajoutée européenne qui générait un revenu propre via les prélèvements douaniers etc. Aujourd’hui, ce revenu a complètement fondu et est devenu obsolète. Ce qui a été perdu peut-être de manière plus grave, c’est le fondement juridique et ce lien avec la valeur ajoutée européenne. La modératrice répond que le recyclage du plastique, même si les EM pourraient le faire au niveau national, vu les échanges, est plus facile à gérer au niveau européen et on peut dire que c’est une création de l’UE. 

L’intervenante réplique en disant qu’ici, il s’agit plutôt ici d’une pénalité sur une action proprement européenne qui est donc remplaçable par des actions nationales. On a perdu cette confiance ou cette vision qui a existé à une époque : une création européenne, juridiquement parlant, devrait être aussi accompagnée financièrement parlant. Cela veut dire faire le deuil d’un des fondements de l’UE, sans parler des souverainetés fiscales nationales, débat qui tourne en rond depuis 30 ans, et pas nécessairement du fait de la Commission. Mais on a perdu le fait qu’il y avait naturellement et spontanément d’un point de vue juridique et donc financier, un lien entre une valeur ajoutée européenne, et son financement. C’est quand même une sacrée perte, juridique et démocratique, sur lequel on désespère de rebondir. La modératrice dit alors que pour la base commune consolidée et harmonisée pour les entreprises, il y avait cette idée de valeur ajoutée européenne: les grandes entreprises sont devenues ce qu’elles sont aujourd’hui grâce au marché unique et donc c’est logique qu’elles payent une contribution au niveau européen. 

L’intervenante reconnait que ça pourrait être une solution, sauf qu’il n’y a pas un aspect générateur aisé, sur le plan économique, alors que le fait générateur sur le plan douanier est incontestables. La modératrice dit alors que c’est presque la seule chose qu’on peut trouver, car il n’y a pas beaucoup d’autres choses similaires aux droits de douane. Au final, on a 16% des ressources qui sont des droits de douane, 12% basés sur la TVA, et le reste 72%, est basé sur les contributions. 

Une autre intervenante a une question au sujet d’une potentielle taxe climatique à l’entrée dans l’UE, qui est très discutable et qui va faire beaucoup de bruit à l’échelle mondiale. Cela apparait dans le Green Deal et si ça se fait, cela sera d’office des ressources propres. Si cela se fait aux frontières, vu que le commerce est une compétence de l’UE, il n’y a que l’UE qui pourra faire un tel accord commercial avec les pays tiers, pas les EM. 

La modératrice assume que le débat là-dessus existe. Il y a des chercheurs qui analysent comment ça pourrait être fait en pratique parce qu’il y a plein d’aspects juridiques difficiles. Si un produit chinois entre sur le marché, comment calculer combien d’impôt le producteur va devoir payer ? C’est difficile d’aller visiter l’usine là-bas pour estimer, même si certains disent que c’est possible, comme pour les enquêtes anti-dumping. Mais il faut que la Chine l’accepte. Il y a donc tous ces aspects à prendre en compte et qui rendent cela très compliqué. Mais ce n’est pas à exclure pour le futur car on y arrivera sans doute. 

Un autre intervenant voulait revenir sur cette histoire de taxe sur la pollution : il dit que pour résumer, les pays les moins développés, comme la Roumanie, la Hongrie etc. seraient les plus pénalisés d’une telle taxe. C’est donc exactement le débat qu’on a au niveau mondial, avec des pays encore sous-développés qui dénoncent le fait que si, aujourd’hui, on en est là; c’est à cause des pays développés, et maintenant on les oblige à se plier aux règles pour ne pas polluer. Or, dans le contexte de l’UE, il faut quand même rappeler que les pays en retard de développement bénéficient du fond de cohésion qui pourrait aussi être utilisé prioritairement pour lutter contre la pollution. De ce point de vue, il pourrait être intéressant d’utiliser cet instrument financier afin de faire pression sur ces pays comme la Grèce, la Roumanie, ou encore la Bulgarie, pour mieux diriger les investissements vers quelque chose qui est compatible avec les objectifs européens en termes de climat. Dans la mesure où on les aide à se développer et donc à bénéficier du changement climatique, l’argument d’être un pays pauvre, qui n’a pas d’argent et qu’on pénalise ne tiendra plus la route. 

La modératrice acquiesce mais précise que c’est aussi faux de dire qu’il n’y a que les pauvres qui polluent, car si on regarde l’Allemagne, pays riche, ses émissions de CO2 sont très importantes. Elle présente ensuite quelques diapositives sur les contributeurs nets. Les contributions des EM sont calculées en fonction de leur prospérité. Pourtant certains pays payent beaucoup moins, car ils ont obtenu des rabais : on retrouve dans cette catégorie les pays comme l’Allemagne, le Danemark etc… La Commission propose d’éliminer les rabais vers 2027. Le RU est bien évidemment le pays qui bénéficie le plus de son rabais par rapport à sa situation économique. Il y a aussi la Suède, les Pays Bas, l’Autriche et l’Irlande qui en bénéficient. Le Luxembourg, étant un pays avec une proportion élevée de richesse par habitant, paie beaucoup et n’a pas de rabais. De plus, dans les budgets, ce sont les seuls qui défendent les budgets pour l’administration européenne. C’est aussi intéressant de voir que certains pays comme l’Autriche se situe plutôt bien par rapport aux développements politiques de ces dernières années. Le cas de l’Irlande est aussi intéressant, du fait de sa taxation qui est différente, c’est bien de voir que ces pays sont un peu plus généreux, qu’on le pense. 

Un intervenant demande si ces chiffres font-ils l’objet d’une politique de communication et de débat public. La modératrice répond que c’est déjà très technique pour un débat public. Elle explique que pour la communication sur le budget, on se focalise en général sur le fait d’éliminer les rabais, et sur le côté dépenses plutôt. Tandis que ce genre de sujet, c’est plutôt réservé pour des journalistes spécialisés. Cette diapo, je l’ai pris d’une présentation technique que mon directeur général a fait pour des journalistes quand il y avait ce débat en Autriche, Allemagne, PB et qu’il y a eu une désinformation au niveau des chiffres qui avait été publiés. A ce moment, on a directement expliqué aux gens comment ça fonctionne, et quel impact ont les rabais. C’est n’est pas les Pays Bas qui payent le plus, c’est plutôt Malte, et ça il fallait bien l’expliquer et le communiquer aux journalistes qui, eux, ont ensuite publié des articles avec les chiffres corrects et une vue beaucoup plus équilibrée. Dans le cadre de la lutte contre la désinformation, le budget est un élément facile à montrer même si difficile à manier. Il faudrait que cela soit rendu visible et compréhensible. Il existe aussi des factsheets plus agréables à lire. 

https://ec.europa.eu/info/sites/info/files/factsheet-modern-eu-budget-future-challenges_fr_0.pdf

https://ec.europa.eu/info/sites/info/files/factsheet-eu-budget-financing_fr_0.pdf

La séance se clôture alors sur cette conclusion à savoir qu’il est important d’associer le monde des associations pour communiquer là-dessus aux citoyens. 

https://www.facebook.com/EuropeanCitizenPlatform

http://european-citizen.eu

Pauline Delestinne

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

Laisser un commentaire