Un représentant spécial de l’UE pour les droits de l’homme? Un nouveau pas en avant : le Parlement européen apporte son soutien à un « mandat solide »

Les eurodéputés ont voté le mercredi 13 juin une recommandation visant à désigner un représentant spécial de l’UE en charge des droits de l’homme. Ils veulent un mandat solide pour le représentant spécial. L’objectif est de donner davantage de visibilité, d’efficacité et de cohérence à la politique de l’Union en la matière.

Un mandat fort, indépendant et flexible : telles doivent être les conditions d’exercice de la mission de cet émissaire spécial aux droits de l’Homme voulu par les députés. Son mandat – renouvelable – devrait être de deux ans et demi.

 

Ce nouveau représentant devrait refléter la politique européenne des droits de l’homme et s’intéresser au renforcement de la démocratie, à la justice internationale, au droit humanitaire, à l’abolition de la peine de mort, à la liberté d’expression, aux questions de genre et aux conflits armés. Jusqu’à maintenant, il existe dix représentants spéciaux de l’UE mais ils sont en charge de zones géographiques spécifiques (Afghanistan, Proche-Orient, Soudan, Sud dela Méditerranée…). La mise en place d’un représentant spécial sur une thématique transversale serait donc une grande première.

 

L’eurodéputé José Ignacio Salafranca (Parti populaire), à l’origine de la position du Parlement, souhaite que les parlementaires jouent un rôle dans la désignation du nouveau représentant. Il prône une candidature reconnue sur le plan international, forte d’une large expérience et de succès à son actif dans le domaine des droits de l’Homme. La décision devrait être prise par le Conseil de l’UE (représentant les Etats membres) le 25 juin. Une audition devrait ensuite être organisée devant la commission parlementaire des affaires étrangères.

 Au cours des débats les députés ont réaffirmé leurs exigences : un mandat solide. Pour Cristian Dan Preda (PPE, roumain), la désignation de ce Représentant signifie que nous voulons renforcer la cohérence de l’UE dans le domaine des droits de l’homme. Richard Howitt ( S&D UK) a précisé qu’il ne veut pas « d’une nomination politique »,mais de « quelqu’un d’irréprochable au niveau des droits de l’homme, qui s’y connaisse (…) avec une qualification juridique »Par contre Gay Mitchell (PPE, UK) ne souhaite pas un juriste, » mais «  quelqu’un qui a un cœur bon, du courage, un sens du jugement et politiquement correct et qui recherche la vérité ».La plupart des députés souhaitent un mandat large ( (problématique droit de l’homme,relations avec les pays tiers, accords commerciaux), cependant  Franz Obermayr (NI autrichien) il ne faut pas se disperser.

 

Quant à Catherine Ashton, elle a tenu à préciser que contrairement à ce qui était prévu initialement, le mandat du Représentant sera de deux ans et demi et non de un an : « il faut un mandat long pour aborder des questions de long terme » a-t-elle mis en avant. Elle a tenu à assurer aux députés européens qu’il sera un interlocuteur privilégié du Parlement européen à qui il fera des rapports réguliers. En effet les députés ont insisté sur la nécessité d’une relation étroite entre leur institution et le Représentant spécial.

 

Mandat du représentant spécial

Les députés rappellent que l’article 21 du traité sur l’Union européenne (TFUE) réaffirme l’engagement de l’Union à promouvoir les droits de l’homme et la démocratie dans l’ensemble de ses actions extérieures et que l’article 33 du traité UE (TUE) fournit la base juridique pour la nomination d’un représentant spécial de l’Union européenne (RSUE) pour les droits de l’homme.

 

Sachant que le Parlement européen a demandé à plusieurs reprises la nomination d’un représentant spécial de l’Union pour les droits de l’homme (résolution du 16 décembre 2010 et résolution du 18 avril 2012), ils adressent une nouvelle fois une recommandation allant dans ce sens au Conseil. Ils rappellent que le représentant spécial de l’Union pour les droits de l’homme doit renforcer la visibilité et la cohérence de la politique des droits de l’homme de l’UE en tant qu’élément fondamental de sa politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et contribuer à l’élévation du profil des droits de l’homme de l’Union européenne dans le monde.

 

Les principales recommandations faites au Conseil dans ce contexte peuvent se résumer comme suit :

 

Nomination et rôle du Parlement européen dans ce contexte :

 

      -. la nomination du tout premier représentant spécial thématique de l’Union doit accroître la visibilité, l’efficacité, la cohérence et la responsabilité de la politique des droits de l’homme de l’UE;

      -. le Parlement européen doit jouer son rôle dans la procédure de nomination et la surveillance de l’ensemble de son mandat, c’est la raison pour laquelle un échange de vues/une audition avec ce représentant spécial doit avoir lieu devant la commission pertinente du Parlement européen.

Mandat :

      -. la mise en œuvre du mandat et sa cohérence avec d’autres initiatives de l’Union dans le même domaine doivent faire l’objet d’une évaluation régulière;

      -. le représentant spécial de l’Union doit travailler en étroite coopération avec le groupe de travail « droits de l’homme » du Conseil (COHOM), être un interlocuteur de haut niveau pour ses homologues des pays tiers et des organisations internationales (il doit collaborer avec les Nations unies et des organisations régionales compétentes) et présider les dialogues de haut niveau sur les droits de l’homme ;

      -. le représentant spécial de l’Union doit se voir attribuer un mandat fort, indépendant et flexible qui n’est pas défini par des responsabilités thématiques étroites et spécifiques, mais qui lui permet plutôt d’intervenir rapidement et efficacement ;

      -. il doit traiter différentes questions horizontales, contribuant ainsi à une action plus efficace et plus cohérente des politiques extérieures de l’Union ;

la portée de son mandat doit se conformer aux principes d’universalité et d’indivisibilité des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et couvrir le renforcement de la démocratie, de l’état de droit et des institutions, la justice internationale et le droit humanitaire international ;

      -. le mandat doit englober l’abolition de la peine de mort, les défenseurs des droits de l’homme, la lutte contre l’impunité, la lutte contre la torture, la liberté d’expression (y compris sur l’internet), les libertés d’association, de réunion, de religion et de convictions, les droits des minorités, la protection de l’enfance, les droits des femmes, la paix et la sécurité, les questions de genre et la lutte contre toutes les formes de discrimination.

 

Qualifications requises et durée du mandat :

 

      -. le représentant spécial doit posséder les qualifications professionnelles nécessaires, une expérience étendue et une expertise avérée dans le domaine des droits de l’homme, et doit faire preuve d’une intégrité personnelle et professionnelle ;

      -.il doit être nommé pour une période de 2,5 ans (mandat renouvelable) et le Parlement européen doit être consulté de manière adéquate et en temps voulu sur la procédure de renouvellement;

      -. il doit travailler en étroite collaboration avec le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et le Président du Parlement européen, en vue d’assurer la cohérence et l’intégration des droits de l’homme dans tous les domaines politiques propres au travail de l’ensemble des institutions européennes ; il doit interagir avec le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) et toutes les délégations multilatérales de l’Union et les délégations de l’Union dans les pays tiers …

 

Missions spécifiques :

 

      -.le représentant spécial devra faire régulièrement rapport à la commission pertinente du Parlement européen sur la situation des droits de l’homme dans le monde et sur l’état d’avancement de la mise en œuvre de son mandat ;

      -. il devra coopérer avec les représentants des organisations de la société civile au niveau local, régional et national, les ONG, les experts etc. intervenant dans le domaine de la protection des droits de l’homme et de la démocratie.

 

Ressources financières et humaines:

      -. des ressources financières et humaines adéquates devront être mises à sa disposition et son budget devra être revu tous les ans ;

      -.il sera responsable de son équipe ; celle-ci pourra inclure du personnel détaché des États membres et des institutions européennes.

 

La proposition de recommandation demande que l’on inclue une référence au texte de la recommandation adoptée en Plénière dans le futur mandat du représentant spécial de l’Union pour les droits de l’homme.

 

Cf. article de Mathieu Arnaudet dans le numéro 123 de Nea say

 

Projet de recommandation (FR) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//NONSGML+COMPARL+PE-489.344+01+DOC+WORD+V0//FR&language=FR

 (EN) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//NONSGML+COMPARL+PE-489.344+01+DOC+WORD+V0//EN&language=EN

 

Intervention de la Haute représentante, Catherine Ashton, à la plénière du Parlement européen le 12 juin http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=SPEECH/12/433&format=HTML&aged=0&language=EN&guiLanguage=en

 

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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