La liberté numérique : une valeur de l’Union Européenne ?

Le 11 décembre dernier, les eurodéputés, réunis à Strasbourg pour la dernière séance plénière 2012, ont approuvé à une large majorité (630 voix) le rapport de Marietje Schaake (ALDE – NL). Ce rapport porte sur une proposition de résolution du Parlement européen, visant à établir une stratégie pour la liberté numérique dans la politique étrangère de l’Union Européenne.Doit-on encore préciser l’important rôle que jouent désormais Internet et les nouvelles technologies de l’information et de la communication (TIC) dans nos sociétés, aujourd’hui mondialement interconnectées ?

Alors que plusieurs Etats membres de l’Union ont déjà élevé l’accès à Internet au rang de droit fondamental ou encore que la Commission insiste sur l’importance des libertés numériques dans les critères de Copenhague (à remplir par tous les Etats candidats à l’accession à l’Union Européenne),  la députée de l’ALDE propose que l’Union se dote d’une stratégie adaptée aux nouvelles technologies dans ses actions extérieures. Elle axe sa proposition de résolution sur six axes :

       -. Sécurité et liberté

 Dans un premier temps, elle opère un parallèle avec les différentes initiatives prises afin de lutter contre la cybercriminalité. Si l’Union met en place des outils pour renforcer la sécurité en ligne, elle ne doit pas oublier son corollaire qu’est la liberté. Le monde numérique doit tout autant garantir la liberté que la sécurité.

       -. Droits de l’homme

 Force est de constater, aujourd’hui, que les droits de l’homme doivent être respectés également dans la sphère numérique. C’est pourquoi l’Union Européenne doit faire figure d’exemple en la matière, surtout lorsque que des régimes autoritaires usent de plus en plus des TIC pour censurer leurs opposants.

Qui plus est, des outils ou technologies développés dans l’Union ne devrait en aucun cas servir des exactions à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme.

      -. Commerce et exportations

D’un côté l’Union Européenne doit empêches que les systèmes technologiques produits sur son territoire puissent servir  de mauvais desseins, dommageables notamment pour le respect droits de l’homme dans les pays tiers. D’autre part , des outils technologiques qui porteraient atteinte aux droits de l’homme doivent tout simplement être bannis du marché européen.

Ce contrôle devrait être assuré par la Commission européenne qui, à son tour, informerait aussi les entreprises européennes des limites de la légalité sur certains produits.

Aujourd’hui, dans une économie  mondialisée, l’Union Européenne et ses entreprises doivent travailler conjointement dans leurs actions extérieures pour éviter une contradiction avec les valeurs prônées par l’Union.

       -.Développement

 L’Union Européenne représente un élément essentiel dans l’aide au développement des pays tiers. C’est pourquoi elle doit intégrer la dimension des TIC dans ses politiques liées au développement. L’Union doit viser à réduire la fracture numérique, en permettant un accès à l’information et aux technologies à une population sans cesse plus large : favoriser l’éducation dans les zones éloignées, mettre en place des accès aux TIC après des catastrophes naturelles ou des crises humanitaires, ou encore assurer un suivi et un contrôle efficaces des processus électoraux pour les citoyens.

 C’est en ce sens que l’Union Européenne pourra se présenter comme un « protecteur » des libertés numériques.

       -. Crédibilité

Garantir les libertés numériques dans le monde n’est crédible que si l’Union Européenne implémente concrètement cet objectif dans ses textes. A ce propos il convient de noter que  la Commission européenne travaille sur une des lignes directrices sur les droits de l’homme et la responsabilité des entreprises dans le secteur des TIC (sur base des principes directeurs des Nations Unies en la matière).

       -. Gouvernance de l’Internet

 Sur fond de conférence mondiale des TIC à Dubaï,( cf. autre article dans l’actuel numéro de Nea Say) le rapport Schaake appelle un modèle pluripartite de la gouvernance d’Internet, incluant tous les acteurs : gouvernements, entreprises et utilisateurs.

Il faut avant tout éviter deux menaces : d’une part que les pays développés élaborent des textes à huis clos (ACTA, par exemple), d’une autre part que les pays émergents essaient de mettre en place un cadre de réglementation mondial d’Internet (renforçant les contrôles).

 Internet doit rester ouvert : le rôle de l’Union doit être d’assurer les libertés numériques. Donc, alors que la majorité des technologies de l’Internet proviennent d’outre-Atlantique, l’Union doit assurer ses utilisateurs que ceux-ci ne soient pas contraints par les législations, parfois plus restrictives, américaines.

       -. Stratégie pour la liberté numérique

 « Les libertés numériques sont des droits essentielles et elles sont indispensables à l’exercice des droits de l’homme traditionnels que sont, par exemple, la liberté d’expression et la liberté de réunion, ainsi que pour la garantie de la transparence et de la responsabilité dans la vie publique. ». Par ces mots concluant l’exposé des motifs du rapport de Marietje Schaake, on comprend bien l’importance de la mise en place d’une stratégie de l’Union Européenne pour les libertés numériques dans ses actions extérieures. Tout en assurant une collaboration entre les responsables politiques, les entreprises et la société civile.

 Située entre la stratégie numérique à l’horizon 2020 et la réforme de la protection des données, l’Union Européenne est placée  dans la tourmente d’un monde en pleine transformation sous l’influence de la mondialisation, elle a donc tout intérêt à prendre le pli de la révolution numérique.

 François Balate

 

Pour en savoir plus :

 

–        Portail de l’Union Européenne sur la stratégie numérique –  (EN) http://ec.europa.eu/digital-agenda/

 

 

      -. Rapport sur une stratégie numérique pour la liberté numérique dans la politique étrangère de l’Union (2012/2094(INI)) – Marietje Schaake – 15.11.12 – (FR) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?type=REPORT&reference=A7-2012-0374&language=FR

 (EN) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+REPORT+A7-2012-0374+0+DOC+XML+V0//EN

 

 

      – Texte  de la Résolution (FR) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7-TA-2012-0470+0+DOC+XML+V0//FR&language=FR

 

 (EN) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P7-TA-2012-0470+0+DOC+XML+V0//EN

 

 

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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