Le Parlement européen reçoit Janet Napolitano, secrétaire d’Etat à la sécurité intérieure. Une explication franche, mais apaisée.

Le Parlement européen reçoit Janet Napolitano, secrétaire d’Etat à la sécurité intérieure (USA). Une explication franche, mais apaisée.

La réciprocité est la formule utilisée par beaucoup d’intervenants pour progresser dans les sujets de controverse entre l’UE et les Etats-Unis sur les questions de libertés civiles comme la protection des données et les exemptions de visa, le PNR, c’est ce que les députés ont estimé lors de la réunion avec la secrétaire d’Etat  à la Sécurité intérieure, Janet Napolitano, le 6 novembre dernier. Concernant le centre de détention de Guantanamo Bay, Mme Napolitano a dit clairement que « Guantanamo a servi davantage comme outil de recrutement qu’autre chose ».

Rencontre utile, ce fut l’occasion pour les deux parties de prendre la mesure de l’autre. A cet égard cette rencontre a été a été infiniment plus profitable que la précédente avec Chertoff, ne serait-ce que parce que les députés ont offert une image  bien meilleure. La fois passée, hormis une intervention de Sophie In’t Veld, les eurodéputés étaient apparus timorés, inhibés et sans grand relief dans leurs intervention. Le climat, certes,  n’était plus le même….Janet Napolito est apparue comme une personne intelligente, ouverte, mais aussi comme une personne ferme et déterminée. La secrétaire d’Etat a donné l’impression de saisir les spécificités  du Parlement européen, surtout une fois le Traité de Lisbonne : ce n’est pas le Congrès américain, (dont chacun a pu sentir le souffle permanent et pressant dans le dos de la secrétaire d’Etat)  mais à l’avenir elle ne  sous-estimera pas le Parlement européen, a-t-il semblé. On peut  espérer des rencontres et séminaires mutuels donnant lieu à une compréhension, voire une coopération plus authentique et une évaluation permanente des relations transatlantiques dans le domaine de  la justice, la sécurité et la liberté comme cela fut souligné par plusieurs intervenants

Ce fut « business as usual », où chacun a déroulé le rituel bien connu des dossiers marquants de la relation Etats-Unis/ Union européenne. Deux remarques venant des deux co-présidents de la réunion : Elmar Brok a clairement fait remarquer que l’impression en Europe est que la politique américaine  à l’égard de l’Europe est de diviser pour mieux régner et cela ne sert l’intérêt de personne. De son côté Juan Fernando Lopez Aguilar a souligné qu’une des priorités de la future présidence espagnole est d’obtenir une déclaration politique commune contre le terrorisme.

Le Président de la commission des Libertés civiles, de la Justice et des affaires intérieures Juan Fernando Lopez Aguilar (S-D, ES) a rappelé qu’avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le Parlement européen aura « beaucoup plus de pouvoirs que par le passé » et pourra pratiquer la diplomatie parlementaire sur des dossiers auparavant limités à la coopération intergouvernementale.
« Il y a de nombreuses attentes de notre part vis à vis de l’administration Obama » a déclaré Carlos Coelho (PPE, PT), président de la commission temporaire du PE sur les activités de la CIA en Europe. Il a appelé la secrétaire d’Etat à « lever l’interdiction d’accès aux documents relatifs aux négociations » intergouvernementales. Il a estimé que la réciprocité devrait guider le dialogue transatlantique. Thème repris par plusieurs intervenants

Autre thème important, l’exemptions de visa.Elmar Brok (PPE, DE), Président de la délégation du Parlement aux relations avec les Etats-Unis, a déclaré qu’il est « de notre devoir de discuter avec le Congrès américain dans le cadre du dialogue transatlantique » sur des questions comme l’exemption de visa. Il a souligné le besoin de faire se rencontrer les rapporteurs des deux parties sur les dossiers abordés pendant la réunion. Sur l’exemption de visa, Janet Napolitano a estimé que « cela doit être évalué au cas par cas (…) les exemptions de visa sont très importantes, mais certains, au Congrès, pensent qu’elles représentent une lacune dans le système de sécurité américain ». Autant dire , ce thème restera sensible et les Etats-Unis, ne veulent connaître que les Etats et continueront à ignorer d’autres identités telle que l’Union européenne.

Données des passagers aériens (PNR), »Pourrait-on en arriver à une situation ou l’on pourrait renégocier l’accord PNR ? » a demandé Sophie in’t Veld (ADLE, NL). « Nous avons urgemment besoin d’informations sur les résultats des politiques anti-terroristes », a-t-elle ajouté. Mentionnant ses vacances aux Etats-Unis et la mesure américaine visant à taxer les voyageurs exemptés de visa, elle a demandé : « Devrai-je laisser dix dollars et dix empreintes digitales » la prochaine fois ? Cet argent sert à la promotion du tourisme et des voyages (…), l’objectif est d’aider les touristes », a répondu Mme Napolitano. Sur le PNR, la Secrétaire d’Etat a indiqué qu’elle « serait heureuse d’avoir une discussion commune sur le sujet et de fixer une date (…) la révision du PNR est un travail que nous devons entreprendre ensemble ».

Guantanamo. Ana Gomes (S&D, PT) s’est interrogée sur la fermeture de Guantanamo, et demandé à l’administration US de publier l’information relative à la participation d’Etats membres de l’UE aux restitutions extraordinaires. Concernant le centre de détention de Guantanamo Bay, Mme Napolitano a estimé que « Guantanamo a servi davantage comme outil de recrutement qu’autre chose ». La secrétaire d’Etat a été discrète sur les intentions et muette sur le fait que les européens ont plutôt traîné les pieds pour aider Obama, elle a cependant remercié ceux qui avaient fait un effort….

Rui Tavares (GUE/NGL, PT), faisant référence à la date de fermeture de Guantanamo fixée au 22 janvier, a estimé que « ce serait une déception si cette date n’était pas respectée ».

Système Entrée-sortie . Un point douloureux qui roque à l’avenir de prendre de l’importance. Pour s’en convaincre il suffit de prendre connaissance de l’article du Washington Post du 7 novembre.
Sarah Ludford (ADLE, UK) s’est pour sa part interrogée sur le projet américain de mécanisme de contrôle des sorties et souhaité que les études et conclusions sur ce projet soient partagées, une proposition de la Commission européenne pour un système européen similaire devant être étudiée l’année prochaine.

Profilage : éviter de stigmatiser des communautés, un point qui traditionnellement est hypersensible pour les eurodéputés. Timothy Kirkhope (ECR, UK) s’est inquiété des conséquences du profilage des données personnelles, à cause duquel « certains groupes ont l’impression d’être tous des suspects potentiels, notamment les citoyens musulmans ». Face à cela, « nous devons tendre la main à certaines communautés » a répondu Mme Napolitano. « Nous avons tous des lois contre de tels profils et nous devons être prudents » a-t-elle déclaré. Jan-Philipp Albrecht (Greens/EFA, DE) a demandé qu’une évaluation indépendante soit réalisée « afin d’éviter que l’on touche le fond » en matière de protection des données.

Texte de la transcription des interventions de la réunion. (services du Parlement européen)

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

Laisser un commentaire