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6. NOTE DE CADRAGE – Les « Fake News » ou la «Désinformation»

Définir les termes à utiliser : « Fake News » ou « Désinfor­mation » ?

Le terme de « Fake News », traduisible par « fausses nouvelles », définit un concept déjà ancien sur le web et dont l’utilisation s’est largement démocratisée par l’inter­médiaire du candidat à la présidentielle puis Président américain, Donald Trump. Au terme de « Fake News », la Commission européenne préfère celui de « désinforma­tion ». En effet, selon le Rapport du groupe d’experts de haut niveau sur les fausses informations et la désinfor­mation, d’une part les informations ne sont pas nécessai­rement complètement fausses mais ont plutôt tendance à manipuler la vérité pour amener à une réflexion qui s’éloigne de la réalité. D’autre part, le terme «Fake News» est devenu trompeur en ce qu’il a largement été utilisé par certains politiciens et leurs partisans pour rejeter toute couverture qu’ils trouvent désagréable ou qui ne leur convient pas.

La désinformation, telle qu’elle est définie par la Com­mission, comprend toutes les formes de discours qui échappent au cadre actuel (diffamation, discours haineux, incitation à la violence, etc.) mais qui peuvent néanmoins être nuisibles. C’est un problème qui doit être compris dans le contexte plus large de la façon dont l’information est produite, comment elle est distribuée et comment les gens s’engagent dans la sphère publique. Cela inclut les changements dans les modèles économiques et la profes­sion de journaliste, le passage aux médias numériques et la montée des plateformes, ainsi que la crise de confiance entre une grande partie du public et de nombreuses insti­tutions publiques au niveau national ou européen.

La désinformation a un impact sur le réel

On serait tenté d’admettre que la désinformation a, de tous temps, existé et que seule son amplification par les technologies de l’information et de la communication pose réellement un problème. Néanmoins, la désin­formation est un problème qui peut avoir de sérieux impacts dans la vie « réelle ». L’exemple le plus utilisé, mais aussi le plus parlant est celui du « Pizzagate » aux États- Unis.  Lors des élections présidentielles aux États-Unis, des éditeurs de « fausses nouvelles » ont propagé une fausse théorie de conspiration selon laquelle la can didate à la présidence, Hillary Clinton, associée à d’autres person­nalités de son parti politique, coordonnait un réseau de trafic d’enfants à Washington sous couvert d’une en­seigne de pizzeria « Comet Ping Pong ». Néanmoins, l’affaire a pris une ampleur toute autre lorsqu’en dé­cembre 2016, après avoir lu cette désinformation sur Facebook, un homme s’est décidé à braquer de nuit la­dite pizzeria. Heureusement, seul un cadenas fut brisé et le justicier malavisé fut rapidement appréhendé.

Un deuxième exemple, le cas de la 20th Century Fox, stu­dio de création de film. Début 2017, la compagnie a créé 5 sites web de désinformation imitant traits pour traits les sites d’information traditionnels. Ces faux sites ont ainsi publié des articles complètement faux sur des per­sonnalités publiques comme Donald Trump ou Lady Gaga ou encore sur des sujets d’intérêt public tels que la san­té mentale ou encore les vaccins. Ces articles furent très largement partagés sur Facebook. Lorsque le pot aux roses fut découvert en février 2017, la compagnie expliqua qu’il s’agissait d’une campagne de promotion pour son site « A Cure for Wellness » et que tous les articles faisaient systé­matiquement référence au site.

Les mesures déjà prises par certains

La grande majorité des plateformes en ligne (comme Twit­ter, Facebook ou YouTube) a déjà commencé à mettre en place des réponses à la propagation de la désinformation. Cela passe par l’identification et la suppression de faux comptes, l’intégration de signaux de crédibilité et de fiabilité dans les algorithmes de classement des tendances, l’inclusion de recommandations alternatives, la démonéti­sation d’informations délibérément fausses pour augmen­ter les revenus (souvent présenté comme le contenu « pu­taclic ») et enfin, la collaboration avec des organisations de vérification des faits et des sources.  Les éditeurs de nouvelles en ligne et radiodiffuseurs sont en train de renforcer leurs capacités de vérification des faits. Concernant la presse papier, ce type d’activité est déjà in­tégré dans les services d’enquête des salles de rédaction ou l’implication d’ONG d’évaluation des médias, notamment celles qui utilisent les données des journalistes pour identifier, suivre, déraciner la désinformation et ses sources.  Au sein de l’Union européenne plus particulièrement, des vérificateurs de faits et des ONG s’établissent petit à petit afin de tisser un réseau de vérification et de certification de l’information mais également pour sensibiliser la popula­tion à la vérification des sources et des faits.  Les citoyens se sentent particulièrement concernés et tou­chés par la désinformation. Selon la dernière enquête Eu­robaromètre (environ 26 000 personnes interrogées), le pu­blic a le sentiment que beaucoup de fausses informations circulent dans l’UE, 83 % des participants indiquant que ce phénomène représente un danger pour la démocratie. Les citoyens se sentent particulièrement concernés et tou­chés par la désinformation. Sans qu’elle soit nécessairement illégale, la désinformation peut néanmoins être nuisible pour les citoyens et la société en général. Le risque de préjudice inclut des menaces pour les processus et aux valeurs démocratiques qui façonnent le politique dans divers secteurs tels que la santé, la science, l’éducation, la finance et plus encore. La production et promotion de la désinformation peut avoir de réels impacts sur la croissance économique ou encore l’ordre social par l’exacerbation d’objectifs politiques ou idéolo­giques de différents publics et communautés à l’origine de ces différentes désinformations.

La ligne de conduite choisie par la Commission européenne : « Prudence est mère de sûreté »

Il convient toutefois de mettre en place une réponse appropriée et conforme aux principes fondamentaux de la liberté d’expres­sion, de la liberté de la presse et du pluralisme. La solution à la désinformation ne peut être simple (censure d’État ou liberté to­tale d’expression). La Commission européenne penche pour une ap­proche prudente et procède à l’évaluation des mesures concrètes adoptées par les différents acteurs. Selon le Groupe d’Experts sur les fausses informations, la solution doit reposer sur cinq piliers :

  1. Améliorer la transparence de l’écosystème de l’infor­mation numérique ;
  2. Promouvoir et améliorer l’utilisation des médias et de l’information pour contrer la désinformation et aider les utilisateurs à naviguer dans l’environnement numé­rique ;
  3. Développer des outils pour responsabiliser les utilisa­teurs et les journalistes et favoriser un engagement positif avec des informations en évolution rapide (les technologies) ;
  4. Sauvegarder la diversité et la stabilité des médias d’in­formation ;
  5. Calibrer l’efficacité des réponses à travers une étude continue de l’impact de la désinformation en Europe.

Adeline Silva Pereira

Après avoir effectué la deuxième année du master Sécurité Globale analyste politique trilingue à l'Université de Bordeaux, j'effectue un stage au sein d'EU Logos afin de pouvoir mettre en pratique mes compétences d'analyste concernant l'actualité européenne sur la défense, la sécurité et plus largement la coopération judiciaire et policière.

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